Il est un coin de rue en plein centre de Nice, au carrefour de la rue de Suisse et de la rue d’Angleterre, qui fait trembler les Niçois ! Les chauffeurs de taxi et les patrons de bar préviennent leurs clients qu’on s’y trouve « en pleine Arabie Saoudite » (et pourquoi pas Dubaï ? ou le Qatar ?), les policiers municipaux (qui désertent prudemment l’endroit le soir et le week-end) parlent de « coupe-gorge« , et d’autres y font régulièrement des manifs identitaires.
La Griotte, qui habite à deux pas, s’y aventure pourtant presque tous les jours et jamais ne se fait agresser par les grappes de messieurs bien pacifiques qui s’y agglutinent tranquillement pour boire du café (ô sacrilège) sur les trottoirs et discuter, voire rejoindre leur salle de prière. Le Bronx niçois a des allures de Wisteria Lane pour une Griotte ex-parisienne. Et puis, dans la même rue, à quelques pas de là, se trouve La Cave Romagnan, haut lieu du jazz niçois, qui lui aussi encourage les regroupements cosmopolites bon teint sur son trottoir, notamment le samedi soir pour ses apéros-jazz.
Chaque samedi soir, la Griotte n’a qu’à ouvrir ses fenêtres pour profiter des apéros-concerts de jazz, des soirées slam, philo ou théâtre organisées par Manu et constater la bonne ambiance festive qui s’y agglomère (l’endroit est minuscule) sur le trottoir, un verre à la main (l’endroit n’est pas une cave pour rien !) qu’il pleuve ou qu’il vente, en vison ou en jean.
Aujourd’hui, c’est Diwan trio qui s’y colle, en la personne de Jean-Baptiste Boussougou et Serge Pesce. La Griotte va entendre sortir de terre d’Angleterre et jazzy contrebasse, bol, gwoni, bendir, udu (mais non ne me demandez pas ce que c’est, j’en ai aucune idée !). Diwan signifie en breton germer et en persan lieu où l’on discute de musique, de poésie et de littérature, n’est-ce pas un beau melting-pot.
Bon alors, je récapitule, à deux pas de l’avenue Jean-Médecin, dans un quartier extrêmement dangereux où sévissent le menaçant suédois H&M, le redoutable cinéma Pathé, la pernicieuse FNAC, l’angoissant Café Malongo, et les terrifiant McDo et Subway, sans parler des paroissiens agressifs de l’église Notre-Dame, de la patibulaire librairie BD Fugue avec ses funestes statuettes de Tintin et d’une Griotte plus malveillante qu’elle n’en a l’air, il reste un endroit où il fait bon vivre et écouter de la musique en live : la Cave Romagnan.
Heureusement que la musique adoucit les moeurs !
