La Britannique Irina Brook, qui a les clefs du Théâtre national de Nice depuis le 1er janvier dernier, a présenté d’une voix douce et réservée « sa » première saison.
C’est sa première expérience en qualité de directrice d’un théâtre, « Cela a toujours été mon rêve, d’avoir un théâtre », dit la metteuse en scène, qui a connu, adolescente, les coulisses du théâtre parisien des Bouffes du Nord, dirigé pendant plus de 35 ans jusqu’en 2010 par son père Peter Brook, une référence internationale.
Elle dit avoir été « incroyablement bien accueillie » à Nice, notamment par le maire Christian Estrosi qui, pourtant, avait pris fait et cause pour son prédécesseur Daniel Benoin qui, après 12 ans et contre tout règlement, voulait encore rester en selle partageant la charge avec l’actrice-réalisatrice, Zabou Breitman.
Le bras de fer avec la Ministre de la Culture Aurélie Filippetti se conclut avec une marche arrière du Maire de Nice qui dû se contenter de partager avec d’autres commissaires, le choix de la nouvelle direction.
Et il a eu la main heureuse avec la nomination d’Irina Brook qui a tout l’air d’avoir été un excellent choix et l’échange de politesse entre les deux fait penser qu’un climat de complicité s’est établi entre la nouvelle maîtresse des lieux et l’homme de pouvoir politique de la ville et de la métropole.
Signe évident de cette collaboration, le programme « extra muros » qui portera quelques représentations dans les petites communes de la Métropole alors qu’ une activité d’animation et pédagogique est prévue pour les quartiers et les écoles, un des axes forts de la politique du maire de Nice.
D’ailleurs, cette rêveuse aurait aimé partir en vagabondage avec sa compagnie pour faire du « dream theatre » comme autrefois : « Je crois totalement au théâtre sur tous les fronts. J’ai envie de partager le théâtre avec des gens qui ne le connaissent pas »- dit-elle. On doit s’imaginer que les belles vallées de l’arrière-pays niçois pourront être le décor de ces escapades théâtrales ?
Irina Brook, elle même anglaise, née en France, formée artistiquement aux Etats-Unis, présente une programmation mélangeant les cultures. « Ce qui est mélangé, métissé, mixte est plus riche ». La saison présente 40 titres, d’une diversité signifiante de manière à intéresser un public vaste et varié.
Pour le coup d’envoi en septembre, Irina Brook retravaillera une création musicale « atypique » en langue anglaise, tirée de « Peer Gynt » du Norvégien Ibsen.
De plus, celle qui a monté cinq pièces de Shakespeare en français, rêve de créer à Nice « un festival international » du dramaturge avec du surtitrage. Pourquoi pas avec une troupe géorgienne ou tchèque ? Shakespeare est « universel », on monte ses pièces dans le monde entier en se l’appropriant, souligne-t-elle.
Pour cette année , on devra se contenter de « Shake Nice ! », « premier petit festival international Shakespeare » qui se déroulera en janvier et février.
Nice pourrait devenir la ville française où on joue les pièces du dramaturge le plus fameux en continuité ? L’idée serait excellent et Christian Estrosi aurait tort à ne pas en saisir la particularité culturelle: même s’il aime la nissartitude du théâtre Gag, devant le « barde du Globe »* on ne peut que tirer son chapeau !!!
Enfin, féminisme oblige, la programmation prévoit aussi à un « printemps des femmes » au mois de mai, mettant à l’honneur des comédiennes ou des spectacles écrits par des femmes.
On salue avec plaisir cette première d’Irina Brook qui, dans sa présentation , cite les paroles de Jean Vilar: » l’art du théâtre ne prend enfin toute sa signification que lorsqu’il parvient à assembler et à unir ». Pour y ajouter les siennes: » Un théâtre pour tous. Un théâtre ouvert sur l’horizon. ».