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22 novembre 2024

L’Edito du Psy : la lente hâte de George Bush en Irak

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En dépit de l’urgence du dossier iraquien, le président George Bush a décidé de se hâter lentement. Le rapport de la Commission Baker lui a pourtant été remis le 6 décembre dernier. Parmi les 79 recommandations, parfois contradictoires, l’une d’entre elles consiste à envisager un retrait progressif des troupes de combat d’ici 2008. Qualifiées par la presse internationale de « processus de révision » de la politique menée jusqu’alors en Iraq, ces conclusions semblaient réduire considérablement la marge de manœuvre du Président américain qui en avait anticipé les effets en se séparant de Donald Rumsfeld, son principal allié dans sa stratégie. On se souvient aussi de l’euphorie, toujours rapide lorsqu’elle ne prend pas en considération l’épaisseur du temps dans l’évaluation d’un événement politique, des détracteurs de la diplomatie US le lendemain de la victoire des Démocrates au Congrès. On se gaussait déjà du « Lame Duck » (canard boiteux) réduit à compter les jours qui lui restaient dans son Bureau Ovale. Dans la première conférence de presse que le chef de l’Administration avait tenue en reconnaissant sa défaite, les observateurs notaient, avec enthousiasme, la soudaine disparition de son vocabulaire des expressions du genre « guerre contre le terrorisme » ou « vaincre la terreur » , alors qu’il en avait abondamment nourri sa rhétorique depuis le 11 septembre 2001. Dernier point et non des moindres, deux tiers des Américains étaient désormais convaincus que l’Amérique ne gagnerait pas la guerre et qu’elle devait s’en désengager. Alors ?

Le chef de la Maison Blanche poursuit tranquillement ses consultations et reporte son discours aux Américains sur ce sujet au début de l’année prochaine. Sans susciter la moindre des réprobations, encore moins de critiques. Il reçoit experts, stratèges et généraux dont certains cherchent à le convaincre de renforcer pour une ultime et courte période, les soldats déjà déployés en Iraq avec un double but : assurer la sécurité de la capitale iraquienne et accélérer la formation des forces de police du nouvel Etat. C’est que les soutiens que le président Bush a perdus en Amérique, il les a soudainement gagnés à l’étranger. Dès sa publication, le rapport Baker-Hamilton a suscité les vives critiques de Bagdad. Le président irakien d’origine kurde, Jalal Talabani, pourtant un habitué des contorsions politiques lorsqu’il était à la tête de l’Union Patriotique du Kurdistan en rébellion contre Saddam Hussein, en a purement et simplement rejeté les conclusions. Un désengagement des forces américaines priverait non seulement les Kurdes d’un rôle d’équilibre entre Sunnites et Chiites dont ils ont su tirer, auprès de Washington, un très large profit. Adeptes d’une autonomie régionale du Kurdistan en Iraq, les Kurdes n’en verraient plus beaucoup la couleur en cas de retrait américain. Le vice-Président de l’Iraq, un Sunnite est venu, lui aussi, prier Washington de ne pas plier trop rapidement bagages. Sans leur contrepoids, les règlements de compte confessionnels de plus en plus sanglants avec les Chiites, majoritaires et armés par l’Iran, laisseraient à terme peu de chance aux Sunnites de retrouver un rôle politique que leur octroie pourtant la nouvelle constitution iraquienne. Ces derniers se sentent à ce point menacés qu’ils ont tiré la sonnette d’alarme auprès de leurs coreligionnaires saoudiens. Riyadh a presque « convoqué » le vice-Président américain Cheney pour lui signifier clairement que le Roi Abdallah soutiendrait ses frères sunnites, financièrement mais aussi militairement en cas de danger. On mesurera l’importante de cette position à l’aune des effets de l’aide wahhabite au FIS algérien au début des années 90. L’affaire revêt suffisamment de sensibilité pour avoir provoqué à quelques jours d’intervalle, la démission d’un conseiller de l’Ambassade saoudienne à Washington, Nawaf Obaid à l’origine de la publicité donnée à cette option, suivie tout récemment du retour inexpliqué de l’Ambassadeur dans son pays.

mc_donald_s.jpg Et comme un « malheur n’arrive jamais seul », les Démocrates du Sénat américain découvrent la fragilité de leur majorité à l’occasion de l’hospitalisation soudaine de Tim Johnson, leur collègue du Dakota du Sud. Son éventuel remplaçant devrait être alors désigné par le Gouverneur républicain de l’Etat. En cas de ballottage, le vote du vice-Président Cheney ferait donc pencher la balance en faveur des Républicains. Sans compter le fait que deux des 51 sénateurs démocrates (celui du Connecticut et celui du Vermont) ont été élus sous une étiquette indépendante. Sans oublier non plus que certains sénateurs démocrates (celui du Nebraska ou celui de Rhode Island) ont, l’année passée, voté plus d’une fois sur deux contre leur Parti. Enfin, la prise de fonction en janvier prochain d’un nouveau secrétaire général de l’Onu, probablement plus sensible aux dangers du nucléaire en raison de son origine sud-coréenne, pourrait constituer un atout supplémentaire.

On peut, dans ces conditions, comprendre la « tranquille » circonspection du Président Bush : elle lui offre un répit appréciable dans ce dossier fortement empreint de sa dimension personnelle. L’Iraq aura été sa guerre. Celle-ci éprouve dorénavant la nouvelle majorité en lui montrant qu’il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir. Après tout, si les Démocrates décidaient de retirer unilatéralement les troupes d’Iraq sans tenir compte des risques encourus par la population, s’ils venaient à renouer avec les régimes, syrien ou iranien, pourtant montrés du doigt par la communauté internationale, ils n’agiraient pas autrement – c’est-à-dire unilatéralement – que celui qu’ils n’ont cessé de critiquer depuis son accession à la Maison Blanche. Sur son départ de l’Onu, Kofi Annan a eu beau jeu de rappeler l’Amérique à son rôle de « leardership clairvoyant ». La suprématie américaine s’exerce, quoiqu’il en dise, par ce qu’aucune autre puissance de la planète ne peut en revendiquer un exercice identique. Républicains comme Démocrates. Pour le meilleur comme pour le pire.

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