La droite niçoise semble avoir perdu sa boussole républicaine. La politique extérieure de la France et la lutte contre le terrorisme avaient jusqu’à présent échappé aux querelles politiciennes en donnant lieu à une union nationale salutaire.
Le départ de nos jeunes pour le Djihad est un phénomène complexe, aux causes multiples, qu’il faut analyser dans le calme et face auquel il faut prendre toutes les mesures adéquates, sans complaisance aucune. La recrudescence de ce phénomène appelle à une gravité et à un esprit de responsabilité de chacun des décideurs publics. Le débat peut et doit avoir lieu mais dans un cadre républicain, sans exacerbation des ressentiments et sans dénigrement, mise à l’index ou accusation péremptoire.
Christian Estrosi, député maire de Nice, a publié une tribune sur Facebook et a convoqué, hier, une conférence de presse accusant le gouvernement de laxisme face à la montée du terrorisme. Le ton volontairement polémique, « Djihad : j’accuse », et le visuel anxiogène ajoutent au propos une dimension populiste, à visées électoralistes évidentes. Sa publication sur Facebook a donné lieu, en un jour, à 2432 « likes », 679 partages et 389 commentaires.
Christian Estrosi a annoncé la création d’une cellule municipale d’écoute et d’accompagnement des familles confrontées au départ d’un des leurs et il en a accusé le gouvernement.
Philippe Vardon, chef de file des identitaires locaux, a surenchéri en accusant à son tour le Maire de Nice : « sur le plan local, la politique de collaboration avec l’UOIF mise en place par Christian Estrosi – qui a progressivement fait passer de nombreuses mosquées niçoises sous le contrôle de la formation islamiste et en a fait son interlocuteur privilégié – n’est pas non plus sans liens avec la radicalisation évidente de nombreux musulmans résidant à Nice. »
La mise en cause frontale du gouvernement par le Maire a incité le Préfet des Alpes-Maritimes à répondre en expliquant les actions menées.
Je ne prétends pas le gouvernement exemplaire en toutes choses et il m’est arrivé d’émettre de sévères critiques à son encontre lorsque je l’estimais nécessaire (lire ici et ici). Pour autant, l’argumentaire développé par Christian Estrosi n’apporte aucune solution nouvelle qui ne serait pas actuellement mise en oeuvre, ne signale aucune mesure prise sous le mandat de Nicolas Sarkozy et que François Hollande aurait supprimé à tort, ne mentionne aucune mesure appliquée avec efficacité dans un pays voisin soumis aux mêmes difficultés et non appliquée en France.
J’ajoute que si Christian Estrosi a eu connaissance de faits délictueux tels que l’embrigadement de jeunes par des associations culturelles ou cultuelles, il a obligation légale de les dénoncer devant le Procureur de la République (article 40 du code de procédure pénale) et non simplement de lancer des accusations sur internet.
Enfin, toute tentative de récupération politicienne de tels drames et toute mise en cause abusive du rôle de l’Etat en la matière est indigne d’un élu de la Nation et du 1er magistrat de la 5ème ville de France.
par David Nakache