L’histoire du Saint Suaire débute au début du XIV° siècle à Lirey (1) fief de Geoffroy de Charmy. Son épouse organise en 1355 les premières ostentations d’adorations de la relique. Selon des documents, le Suaire proviendrait du sac de Constantinople en 1204. Le Pape Clément VI accorde en 1390 des indulgences aux pèlerins venant adorer le suaire à Lirey.
Devant les périls de la guerre de 100 ans, le suaire va se retrouver après plusieurs péripéties à Nice en 1418. Jusqu’en 1442 la relique est la propriété des Charmy. Marguerite de Villersexel(2) l’échange avec Anne de Lusignan (3) contre le château de Varambon. Dès lors le Suaire est la propriété des Savoie. En 1453 le duc Ludovic de Savoie installe cette relique dans une chapelle de son palais de Chambéry. Laquelle est élevée par le Pape Paul II à la dignité de collégiale. En 1506 le Pape Jules II reconnait le culte et la vénération du Suaire. Il en fixe la célébration au 4 mai.
Le Suaire va connaître un premier incendie en 1532 dans cette chapelle de Chambéry. Les Sœurs Clarisses feront des travaux maladroits avec rajout de tissus, d’où des inexactitudes sur la datation au carbone 14.Entre temps les Savoie transfèrent leur capitale et le Saint Suaire à Turin. En 1578 la sainte relique se retrouve dans l’église royale saint Laurent, dédiée aussi à Notre Dame de la neige.
Ce transfert, outre l’aspect politique de lier une relique au centre politique de l’Etat, Turin était depuis 1563 la capitale des Etats de Savoie, obéissait à des conditions pratiques : Charles Borromée après un vœu, souhaitait se rendre à pieds de Milan au Saint Suaire. On comprendra qu’à cette époque, il était peu facile de traverser les Alpes, Turin se trouvait dans la plaine du Pô et donc plus accessible.
En 1694 le Suaire est définitivement installé dans la cathédrale Saint Jean Baptiste de Turin. Ce bien de la famille de Savoie sera légué par Umberto II, le dernier roi d’Italie au Pape Jean Paul II en 1983. Le Saint Suaire est à nouveau victime d’un incendie le 11 avril 1997 dans la cathédrale de Turin. En 2002 il est restauré, on étire le tissu de lin afin d’estomper les traces des 48 plis faits suite à l’incendie de la nuit du 3 au 4 décembre 1532.
Les diverses analyses corroborent le caractère sacré de ce tissu : on a retrouvé des traces de pollen connus seulement au moyen orient. Les marques correspondent à un corps enveloppé et des scientifiques ont conclu qu’il s’agissait d’un homme ayant été flagellé et crucifié. Le groupe sanguin relevé sur le tissu est le même que ceux de l’hostie profanée à Chieti et du suaire d’Oviedo en Espagne. Ce suaire est toujours le sujet d’âpres débats. Comme tout ce qui touche à la Foi, on ne peut ni le prouver, ni l’infirmer.
Pour notre part, nous avons ressenti comme un séisme intérieur en approchant de ce linceul exposé à la vénération des fidèles. On n’est plus tout à fait pareil après notre visite.
Alors : Foi ou hypnotisme ? Nous n’avons heureusement pas la réponse, car la Foi ne se prouve pas, elle se vit et là, à Turin on l’a vécue.
Thierry Jan