Après les drames répétés en Méditerranée et la disparition en mer de près de 2 000 exilés en quelques mois, l’Union Européenne a réagi dans le cadre de ses différentes enceintes.
Une réunion d’urgence du Conseil européen s’est tenue le 23 avril et a pris quelques mesures immédiates. Le Parlement européen a adopté une résolution plus ambitieuse le 29 avril.
La Commission européenne a quant à elle présenté le 13 mai un agenda européen décrivant une série de mesures conséquentes ainsi qu’un programme à entreprendre pour les prochaines années.
Le Conseil européen se réunira les 25 et 26 juin prochain pour arrêter les décisions.Malgré les efforts des instances communautaires, force est de constater que la politique européenne en matière d’asile et d’immigration n’est pas encore une réelle politique européenne mais plutôt l’addition de politiques nationales auxquelles s’ajoutent quelques mécanismes communs, très insuffisants pour répondre aux besoins de protection et d’attention que requièrent les migrants et les réfugiés dans la situation internationale troublée que nous connaissons.
La tendance actuelle de certaines opinions publiques, relayées par certains gouvernements, va malheureusement vers un renforcement des prérogatives nationales, au détriment d’une approche collective.
Les conséquences de ces visions purement nationales sont tragiques : elles aboutissent à faire reposer sur certains pays l’essentiel de l’effort de sauvetage, d’accueil et de protection des personnes en détresse ; elles sont en partie responsables des drames que nous déplorons, faute d’avoir en temps voulu déployer les moyens pour les prévenir ou y faire face ; elles freinent voire bloquent toute décision qui pourrait traduire une vision ouverte et généreuse de l’Europe à l’égard des centaines de milliers d’hommes et de femmes qui fuient la guerre, les conflits et la misère ; elles nient les responsabilités et les liens historiques, économiques, culturels de l’Europe avec l’Afrique et le proche et moyen Orient.
Nous sommes conscients des conséquences néfastes du pouvoir d’attraction de l’Europe qui entraine bien des illusions dans les pays d’origine, conscients aussi de la perversité des systèmes de trafics. Mais tout cela ne justifie pas le fait que face à la pression migratoire l’Union européenne renonce à ses valeurs fondatrices.
A la veille du Conseil européen des 25 et 26 juin prochain, sommet qui sera amené à prendre des décisions majeures, nos Eglises invitent les chefs d’Etat et de Gouvernement à traduire par leurs décisions les valeurs essentielles qui sont le socle des sociétés et du projet européen : la solidarité et non le repli sur des intérêts nationalistes ; l’ouverture et non l’élaboration de nouvelles barrières.
A cette fin, nos Eglises demandent aux chefs d’Etat et de Gouvernement de s’engager nettement dans une politique commune visant trois objectifs :
La mise en œuvre effective de tous les moyens de sauvetage, afin que cessent durablement les tragédies et la litanie des morts et des disparus en Méditerranée,
- Une redéfinition commune et européenne de la politique d’accueil des demandeurs d’asile, qui, par une révision en profondeur du règlement Dublin, viserait à permettre à la fois un accueil européen – et donc non national – des demandeurs d’asile et la prise en compte de leur souhait quant au pays d’accueil,
Une action forte de solidarité à l’égard des premiers pays d’accueil des réfugiés, en
répondant – bien au-delà du nombre de 20 000 que suggère la Commission Européenne – à l’impérieuse nécessité de réinstaller dans l’Union Européenne une partie des réfugiés actuellement accueillis notamment au Liban, en Jordanie ou en Turquie.
Conseil de la Solidarité de la Conférence des Evêques de France