La profondeur de ce roman, taillé avec le soc de la charrue. Un enfant abandonné à la fin du premier conflit mondial. La morale hypocrite de cette période en fait un paria, moins qu’un Bâtard. Recueillit ou plutôt exploité par des paysans au cœur asséché, il n’est pas scolarisé, illettré, l’armée d’une certaine façon le sauvera.
Fidèle à l’homme qui lui a ouvert le mystère des livres et des images, il va le rechercher dans la débâcle de 1940. L’ennemi mitraille, plus par jouissance sadique qu’utilité les réfugiés. Il redescend la France et découvre les lâchetés. Jean Dolin est toujours en quête de son ami l’instituteur.
Enfin il voit la mer, mais on ne lui a pas appris son immensité et Jean disparait sans bruit, en silence, un peu comme il était arrivé sur cette terre, bébé abandonné à la naissance. Une histoire poignante, celle d’un homme, plante poussée sans racines et sans nom. On notera que l’Etat se soucie de lui quand il doit faire son service militaire, l’ayant ignoré durant son enfance et son adolescence. Jean parce que trouvé la nuit de la saint Jean et Dolin, car il vagissait dans une doline.
Un héros dont notre époque égoïste, individualiste et xénophobe devrait prendre pour modèle. Et si ce bébé était une partie de nous ? Chut, surtout n’essayez pas de répondre, seulement de comprendre.
