Un jeune de vingt-cinq ans, avec quelques quinze condamnations ornant son casier judiciaire, l’écrasante majorité pour des vols, se pointe à la barre, cette fois-ci, pour une conduite en état d’ivresse : 0,92 milligrammes d’alcool par litre d’air expiré, soit 1,80 gramme par litre de sang, soit plus du double de la seconde limite légale (0,40mg ou 0,80g). Par ailleurs, il est en fin de peine, dix-sept mois d’incarcération pour vol, en état de récidive légale de vol, et avec les peines de sursis mis à l’épreuve qui tombent, ça fait mal. Il est sous surveillance électronique depuis quelques mois, il ne lui restait que trois semaines avant la fin de sa peine.
Il ne nie pas l’état d’ivresse, en effet incontestable, mais conteste la conduite ; il dit simplement qu’il était à califourchon sur son scooter, afin de le déplacer, rue de la Préfecture, la veille du 15 août. S’ajoute à cela le fait qu’il doive rentrer chez lui à une heure précise, eu égard aux obligations que confèrent le port du bracelet électronique. Il ne l’a pas fait, du moins, le soir de son interpellation. De plus, le problème pour lui, c’est qu’il a « omis » de préciser au juge d’application des peines que le contrat de travail qui lui permettait de rentrer à telle heure chez lui, était rompu (il a aussi l’obligation de travailler). Enfin, il n’a pas honoré un rendez-vous avec un conseiller en probation, agent qui contrôle et accompagne les condamnés après leur peine de prison.
Bon, d’accord, ça fait beaucoup, de nombreuses entorses légales, mais au final, on a retrouvé un mec bourré un soir, rue de la Préfecture, comme il y en des dizaines. Le vrai problème pour lui, aujourd’hui, c’est qu’il est en état de récidive légale (délit renouvelé dans les cinq ans qui suivent la fin de la peine précédente) pour une infraction assimilée : une conduite sans permis, il y a près de deux ans. La peine maximale prévue pour ce délit est de deux ans d’emprisonnement.
La peine plancher, innovation du nouveau gouvernement, d’après la récente loi DATI, correspond donc à une peine incompressible en cas de récidive. La loi précise qu’elle est d’un an d’emprisonnement pour un délit dont la peine maximum est de trois ans, de deux ans pour un délit dont la peine maximale est de cinq ans, et ainsi de suite, soit environ, un tiers de la peine maximale. Sauf que la peine plancher est, en outre, d’un an d’emprisonnement, au minimum pour les autres délits, soit la moitié, et non plus le tiers, pour une conduite en état d’ivresse, passible de deux ans.
Tout ça est un peu complexe et même pour l’avocat commis d’office qui avoue au Président, en audience, devant le prévenu, qu’il vient à peine de rentrer de vacances, et qu’il n’a pas encore eu le temps de lire la nouvelle loi. Toujours est-il que l’accusé écope, ce jour-là, d’un an d’emprisonnement, dont six fermes, sans preuve concrète, alors même qu’il conteste avoir conduit, et qu’il s’agit là, du principal chef d’inculpation qui justifie la récidive légale (en outre, il peut sembler difficile de sincèrement conduire, un soir d’été, à 23 heures, rue de la Préfecture, mais ce détail n’a été relevé, pas même par son avocat…). L’assesseur du président du tribunal correctionnel se contentant de dire qu’ « on ne peut pas remettre en cause la parole de policiers et qu’ils n’ont aucun intérêt à mentir ».
Six mois fermes, prix à débattre, qui dit mieux ?
Article posté Par Nico