La France ainsi que 32 Etats européens sont assignés par la Cour européenne des droits de l’Homme. Ils sont accusés d’inaction face au changement climatique. Greenpeace dénonce depuis plusieurs années les failles et le manque d’ambition des Etats membres de l’Union européenne face à cette crise mondiale.
Phillipe Spadotto est le coordinateur de l’antenne Niçoise. Lui ainsi que plusieurs associations alertent depuis plusieurs années sur les carences des gouvernements. Plus que les révélations et des protestations, c’est des solutions que veut proposer l’activiste pour tenter de sauver la planète notamment en France.
Que pensez-vous de cette affaire ?
Je crois que c’est une commune maritime au bord de l’océan qui a mis le problème en exergue. La France ne fait pas ce qu’elle devrait faire car les gaz à effet de serre ont continué à augmenter de 2 à 3% en France. Même il y a quelques mois, malgré le confinement, ils n’ont pas baissé. Il y a quelques semaines, c’est une bonne chose, je crois en plus qu’il y a aussi la commune de Grande-Synthe qui avait porté plainte contre l’Etat. [décision du conseil d’Etat du 19 novembre 2020]. Je pense que c’est une victoire ou du moins un premier pas pour obliger la France à prendre ses engagements. D’autres pays ne le font pas mais la France doit porter ce message.
N’avez-vous pas essayé dans le passé de faire de même ?
Il y a quelque temps, Greenpeace ainsi que d’autres associations écologiques ont aussi assigné l’Etat en portant plainte pour la mettre devant ses responsabilités pour son inaction climatique[l’affaire du siècle]. L’idée est de montrer que la France, malgré les accords de Paris qu’elle a signé en 2015, qui aurait dû engendre une baisse drastique des gaz à effets de serre, n’a pas pris ses responsabilités.
Que peut faire l’Europe pour agir efficacement en faveur de l’environnement ?
Il faudrait un vrai plan financier pour le climat plutôt que de dépenser des sommes folles pour privilégier le système EPR qu’utilisent les centrales nucléaires Françaises de dernières générations. Vous savez qu’on est en train de construire de nouveaux réacteurs EPR qui devaient normalement déjà l’être depuis 2012. [EPR de Flamanville]. En 2020, on s’aperçoit qu’il ne fonctionne toujours pas. Initialement ils devaient coûter trois milliards et maintenant c’est plus de 19 milliards. Plutôt que de dépenser dans la filière nucléaire, qui n’est pas l’avenir, il aurait était plus judicieux de chacun des pays membre puissent mettre une somme commune. Le but est qu’il y est suffisamment d’argent pour traiter, premièrement les bâtiments passoires pour faire en sorte de gagner en efficacité énergétique. Il faut donc isoler les bâtiments qui ne le sont pas et fonder notre avenir sur les énergies renouvelables.
Faites-vous confiance au plan de relance français et au pacte vert européen ?
Si je n’y croyais pas un minimum, je n’agirais pas. L’objectif de Greenpeace c’est de faire pression sur les gouvernements et les instances européennes pour arriver à une situation où on aurait, comme disent les Américains progressistes, un vrai green new deal. C’est à dire une vraie politique verte de limitation, en particulier des gaz à effet de serre. C’est incontrôlable donc on ne peut pas faire autrement. Je veux y croire mais on attend de voir. Quand on nous annonce quelque chose et qu’on ne le fait pas, nous on agit derrière.
Pensez-vous que le « délit d’écocide » est une réelle avancée ?
Non, nous on promeut, pas directement, avec d’autres associations le crime d’écocide. Le problème, c’est que le délit d’écocide, c’est quoi les conséquences. Des amendes ou des risques purement financiers. Dans la situation actuelle, les risques sur les populations locales, notamment celles du Sud comme les Maldives ou d’autres territoires, qui entraînent des élévations du niveau de la mer. Cela a des conséquences graves comme les sécheresses, sur la santé et la vie Humaine, ce qui entraîne une augmentation des réfugiés climatique. S’il y avait eu un crime d’écocide, on aurait pu plus agir. Ça ne va pas inciter les grandes entreprises les plus polluantes comme Total. C’est plus un gadget qu’autre chose.
Et le rôle des communes et des métropoles locales dans tout ça ?
Absolument bien sûr, il faut savoir que les principaux émetteurs de gaz à effet de serre se trouvent dans les métropoles à travers la pollution dans le centre des grandes villes mais pas uniquement. Nous avons aussi par exemple une campagne en cours contre les transports à Nice, ce qui nous a valu bien des déboires avec le maire de Nice Christian Estrosi et la métropole. Cette dernière n’en fait pas assez. Elle devrait mettre en place une zone à faible émission. Il faudrait qu’elle ne le fasse réellement, pas de manière à saupoudrer sa politique avec un petit peu de verdissement. On peut en vert, c’est-à-dire on fit beaucoup d’annonces et on n’en fait rien ensuite. Il y aussi la problématique de l’aéroport de Nice. Même si la métropole et la commune de Nice n’ont pas les compétences, ils étaient d’accord pour l’extension du terminal 2 de l’aéroport. Au final, c’est des politiques qui peuvent réellement être mis en place dans les métropoles.
Comment peut-on faire prendre conscience du problème écologique ?
Par l’éducation, dans les établissements scolaires de la primaire jusqu’au lycée. Il faut que le programme scolaire prenne en compte cette question. Je suis professeur dans un lycée. Dans ma classe en seconde où on aborde le sujet du changement climatique global, il y a déjà de nombreux élèves qui sont impliqués qui agissent. Les jeunes sont actifs comme Greta Thunberg ou d’autres qui appellent parfois à la désobéissance civique. Ils vivent directement les conséquences du changement climatique et de l’appauvrissement de la biodiversité. Nos efforts individuels représentent 25% de la solution. Les trois-quarts restants, c’est un changement de paradigme et systémique. Le néolibéralisme est responsable du dérèglement climatique.