L’offensive israélienne contre les forces du Hamas n’aura surpris que ceux qui voulaient l’être. En dépit des « appels répétés lancés à Ismaël Haniyeh » par Mahmoud Abbas, le Président de l’Autorité palestinienne, la fin de la trêve décrétée par les responsables de la milice palestinienne aura probablement favorisé la décision de l’Etat hébreu.
Ce dernier a, par surcroît, su profiter d’un « timing » et d’une conjonction exceptionnelle d’opportunités pour lancer cette campagne militaire et tenter de la transformer en autant de gains politiques. En premier lieu, une vacance du pouvoir de l’Administration américaine sans l’aval de laquelle aucune « solution durable » ne saurait être validée dans cette région. Ensuite, un passage de témoin au niveau européen, déjà illustré par le peu d’empressement de la nouvelle présidence tchèque de s’impliquer dans un conflit à l’issue et à la durée très incertaines. Dans le contexte des prochaines élections à la Knesset, ces opérations ont ensuite permis d’inverser le rapport de forces a priori défavorable pour le parti de gouvernement « Kadima » en récupérant une majorité d’Israéliens exaspérés par les tirs de roquettes en provenance de la bande de Gaza et partisans du Likoud de l’ancien premier Ministre Benjamin Netanyahu. La situation au Liban profite également -pour combien de temps ?- à Israël : les discours du Secrétaire général du Hezbollah appelant les Egyptiens au soulèvement trahissent son impuissance du moment : l’interdiction formelle du Président libanais Michel Sleiman d’utiliser le pays du Cèdre comme « arrière-cour » se nourrit d’un progressif renforcement de l’armée régulière laquelle s’apprête à recevoir avions de chasse russes et chars américains, promesses de matériels qui démonétisent les armements pourtant conséquents de la milice de Haret Hreik. Tableau auquel il convient d’ajouter le manque d’enthousiasme exprimé par de nombreuses familles chiites, encore douloureusement meurtries par les souffrances endurées pendant la guerre de juillet 2006. Au point d’atténuer l’envie qui démange probablement Hassan Nasrallah d’ouvrir un second front au Sud Liban. Quant au voisin syrien, la perspective du Tribunal international sur l’assassinat d’Hariri représente encore une menaçante épée de Damoclès au dessus du régime de Bachar El Assad.
Le lien bien établi du Hamas avec la République islamique d’Iran, pays dont les ambitions -pas seulement nucléaires- constituent un autre sujet de vive inquiétude pour de nombreuses pétromonarchies du Golfe, a probablement permis de nouer cette « tacite convergence » entre plusieurs Etats arabes et occidentaux réduits, pour tenir compte des réactions des populations, à de vaines proclamations prônant un cessez-le-feu immédiat et à concentrer leurs préoccupations sur la situation humanitaire dans la bande de Gaza. A ce titre, et en dépit des mises en garde d’Ali Larijani, le président du Majlis iranien sur « le Hamas, ligne rouge pour la sécurité stratégique de l’Iran », Téhéran sait qu’une forme d’engagement plus directe dans ce conflit entraînerait automatiquement une intervention des Etats-Unis, un risque dont le régime des mollahs a su jusqu’alors se préserver. Et ce, malgré des demandes réitérées d’un soutien américain par Israël afin de lancer une opération contre les installations nucléaires iraniennes. Il n’est d’ailleurs pas interdit de penser qu’il puisse s’agir d’un but non avoué -et inavouable- des responsables israéliens.
Dans ces conditions, la tournée régionale au plus fort des hostilités qu’entreprend ces jours-ci Nicolas Sarkozy relève de la mission impossible, certes méritante mais peu susceptible d’aboutir sans être efficacement relayée à l’ONU. Une visite par ailleurs discrètement raillée par des sources américaines à Beyrouth. Il appert finalement qu’un règlement politique et tangible de la situation ne pourra intervenir avant l’entrée officielle en fonction le 20 janvier prochain du nouveau président Barack Obama.