André Barthe, adjoint à la culture de la ville de Nice a accepté de recevoir Nice Première. Dans sa permanence au Vieux Nice, il répond aux questions sur sa profession. Mais aussi sur des sujets d’actualité.
Nice-Première : Quel est le quotidien d’un adjoint à la culture ?
André Barthe : C’est le stress dès le matin. Je me lève à 6H et je termine vers 22H. A 8H30, je mets en place le programme de la journée avec mon collaborateur : assister aux réunions de travail, répondre au téléphone, passer des coups de fil, écouter les projets des personnes et gérer les demandes de subventions.
Il est nécessaire parfois de faire des déplacements à Paris ou à Aix en Provence et rencontrer les services de la ville. J’assiste également à des inaugurations. Celles-ci se font généralement à 18H. Sans oublier les visites dans les centres culturels et les assemblées d’associations auxquelles j’assiste. La pause- déjeuner, elle, se compose parfois d’un bon repas, d’autres fois d’un sandwiche acheté au coin de la rue.
L’emploi du temps est finallement assez bien rempli.
NP : Depuis le début février, vous êtes également adjoint au territoire les trois collines. Pouvez-vous nous en parler un peu ?
AB : J’ai laissé délibéremment la délégation des ressources humaines. Ce nouveau poste est davantages dynamique. Je suis plus en contact avec la population et cela me plaît. Je travaille avec les « forces vives » des quartiers, je les écoute, je dialogue et puis réalise les projets. Il s’agit d’un travail de proximité. C’est passionnant ! Les domaines auxquels je touche sont variés : problème de bruit, de circulation, aide à la police municipale, réunion avec les présidents des conseils de quartiers, …
NP: Si l’occasion se présentait, un changement de délégation serait-il le bienvenu, ou souhaitez-vous rester dans le milieu culturel ?
AB: Si je le peux, je reste dans le domaine culturel. Cela fait trente ans que je suis adjoint à la culture. C’est une véritable passion.
NP: Pensez-vous que la culture tient une place suffisament importante dans la ville de Nice ?
AB: L’adjoint que je suis vous dira qu’il en faudrait plus. Mais si l’on regarde bien, 13% du budget de la ville est consacré à la culture. Je pense donc que c’est déjà bien. Surtout lorsque l’on sait qu’en France, la culture est le 2ème créateur d’emploi après l’automobile. A Nice, plus particulièrement, sur les 6780 employés, il y en a plus de 1100 employés qui travaillent dans les affaires culturelles.
A Nice et depuis vingt ans, deux bâtiments culturels sont ouverts chaque année. C’est dire si ce domaine est une valeur ajoutée pour la ville. D’ailleurs, je reste convaincu que l’on ne vient pas à Nice uniquement pour la plage. Des plages, on en trouve également ailleurs.
NP: Allez-vous aux concerts, au théâtre, à l’opéra par plaisir ou par obligation ?
AB: Je l’avoue : Il m’arrive de ne pas avoir envie d’y aller, souvent par fatigue. Mais quand j’y suis, c’est quasiment toujours un grand plaisir. Je suis pris par la pièce, par la voix, par la scène. Ceci est saisissant et admirable. Donc c’est réellement par plaisir, même si parfois, au départ je me dit que je serait mieux chez moi. Donc neuf fois sur dix, je suis très heureux d’y avoir assister. Et quand cela ne me plaît pas, c’est une histoire de sensibilités, de préférences.
Pour autant, je n’impose pas à la ville mes goûts. A Nice, il y a des personnes qualifiées ( conservateurs, directeurs) pour choisir ce qui doit être présenté à Nice ou pas. Moi je suis en fait un peu comme un chef d’orchestre. Pour mettre en place et en scène l’ensemble de la vie culturelle. C’est à dire de trouver l’argent, le bâtiment, le personnel, les talents, mais certainement pas pour décider à la place des spécialistes. Je fais tout ceci en accord avec tous les directeurs qui sont libres de présenter tout ce qu’ils veulent. Mais aussi avec les commissions culturelles et le directeur central des affaires culturelles, Thierry Martin.
NP: Pour vous, à quoi sert la culture ?
AB: A mes yeux, la culture est indispensable à l’être humain. Elle est porteuse de tolérance et permet de mieux apréhender le monde. En fin de compte, elle est nécessaire à l’épanouissement de l’homme.
NP: Avez-vous en tête des projets à proposer ?
AB: J’aimerais organiser un événementiel culturel plutôt que des bâtiments. Par exemple, l’art dans la rue, développer les musiques actuelles.
Mon souhait est la couverture du théâtre de Verdure. Je trouve cela dommage que du fait qu’il n’est pas couvert, il ne serve pas toute l’année.
NP: Lesquels sont prévus pour bientôt ?
AB: La transformation de la halle Spada, lieux de friche nouvelle. Elle doit permettre dans les 4/5 ans à venir, de créer de nouveaux types d’équipements pour les nouvelles formes culturelles.
Dans peu de temps, il va y avoir la mise en chantier d’une nouvelle cinémathèque. Le dossier est prêt !
La construction d’archives municipales modernes.
Un musée d’histoire naturelle au Parc Phoenix. Nous faisons cela car l’actuel est trop petit et trop vieux.
Et puis aussi peut-être des centres culturels mais là où nous aurons des opportunités.
Tous ces projets ne sont pas encore commencés mais nous intéresse.
NP: Lesquels sont déjà en cours ?
AB: Le conservatoire qui ouvrira en septembre prochain.
Le musée Masséna est en chantier et ouvrira ses portes au mois de mai de l’année prochaine.
Au mois de juin, la bibliothèque de Caucade sera inaugurée.
Ces trois dossiers sont presques achevés.
NP: Racontez-nous une anecdote qui vous a marqué depuis que vous êtes adjoint à la culture.
AB: A la fin des années 1980, je me battais pour que l’on ai un vrai théâtre. Il faut savoir que l’ancien était en préfabriqué. J’ai ainsi fait cette demande au maire de l’époque, Jacques Médecin. A mon grand étonnement, il a accepté. Il a d’ailleurs fait plus : Jacques Médecin en a profité pour m’annoncer une chose que je n’aurais jamais cru possible immédiatement. Il s’agit de la construction du Musée d’Art Moderne et Contemporain. Quelle belle surprise ! Ce jour- là, il a été comme un « Père-Noël ».
Une nouvelle édition « Mars aux Musées » se déroule actuellement. Qu’attendez-vous de celle-ci?
J’attends beaucoup de celle-ci. Mars aux mussées est une très bonne initiative niçoise. Une initiative forte ! La ville travaille en collaboration avec l’université à cette occasion pour faire en sorte que nos jeunes connaissent mieux notre vie culturelle. A Nice, la jeunesse est belle, contrairement à ce que l’on pourrait penser. Nous voyons toujours les jeunes faire des « c…ries ». Mais il n’y a pas que des voyous. Nous devons ouvrir les portes à tous les jeunes.
NP: La Halle Spada, dans le quartier Saint-Roch, a été achetée par la ville. Et le maire a decidé d’en faire un lieu culturel. Depuis, elle a provoqué la polémique. Pouvez-vous nous en toucher un mot?
AB: Il y aura la mise à disposition de locaux pour les artistes, les danseurs et les musiciens. Nous aménagerons l’ERP (Etablissements recevants du public) dans les mois qui viennent. Du moins, je l’éspère. Puis, la halle sera divisée en deux parties : une partie Culture Actuelle avec une salle polyvalente de 300000 places. Et une deuxième partie qui sera consacrée à l’auditorium car il n’y en a pas pour l’orchestre.
Le problème est que certains habitants souhaitaient faire de la halle une crèche, un lieux social. D’autres auraient préféré en faire un parking. D’autres encore voulaient que la halle soit réservée au sport.
Si nous avons choisi d’y installer la culture, c’est parceque le lieux est magique sur le plan de l’architecture. Il correspond à la culture car il y a une mémoire. Mais de toute façon, il ne faut pas s’inquiéter, car nous ne faisons pas cela au détriment du reste. Le reste se fera mais ailleurs.
Du côté de l’auditorium, cela a engendré une polémique car les jeunes qui s’occupent du collectif des musiques actuelles, des associations de peintre ou autre, auraient voulu l’ensemble de la halle pour eux.
NP: Dans les écoles, l’art est présent mais n’est que secondaire. Quel est votre sentiment?
AB: Cette question est simple et compliquée à la fois. Je considère que l’école est faite pour apprendre les bases de la vie : lire, écrire compter. L’école est là pour éveiller, donner le savoir. Concernant l’art, je considère que c’est aux parents d’emmener leur enfant dans les musées, les expositions. Pour autant, il est normal que l’école leur donne le goût du beau sans que cela soit son rôle premier. (Le beau étant différent selon les goûts). D’ailleurs, la ville et les enseignants font déjà des efforts dans ce domaine. Beaucoups de sorties scolaires sont organisées chaque année malgré les charges. J’entends par charges, surtout le temps dépensé dans les sorties. Certes, on peut sûrement faire mieux, trouver un meilleur équilibre. Mais plus de temps dans les musées, signifie plus d’heures passées dans l’école. Je reste donc persuadé que l’art n’est pas le rôle essentiel de l’enseignement. Il est seulement indispensable.
NP: Une association a eu l’idée d’organiser un festival de la musique italienne à Nice. L’Italie étant un voisin proche de la France, quelle est votre opinion? Seriez-vous d’accord pour une telle manifestation?
AB: Pourquoi pas ! Les relations avec l’Italie sont excellentes.
Pour que ce projet soit possible il suffit de cadrer avec la volonté de la ville, voir ce qu’une telle manifestation peut apporter. Sans oublier de tenir compte des cadres juridique et financier. Deux questions sont surtout à se poser avant de se lancer dans cette aventure : est-ce que ce sera un loisir apprécié par un grand nombre ? Sera-t-il un vecteur économique ?
Mais personnellement, je trouve que c’est une idée preneuse.
NP: L’idée d’organiser un Festival du film policier à Nice a été avancée. Qu’en pensez-vous ?
AB: Au départ, j’ai ressenti de la gêne. Ce Festival se déroulant habituellement dans la ville de Cogniac, je ne voulait pas « piquer » la manifestation d’une autre ville. Mais Cogniac ne voit pas d’incovénient. Nous allons donc sans doute le faire. Un tel événement à Nice me paraît un bon créneau car ce serait l’occasion d’organiser des conférences, des dédicaces, … Pour l’heure, la décision n’est pas encore prise. Elle le sera certainement le mois prochain. Si la réponse est positive, le Festival du film policier aura lieu vers octobre/novembre.
NP: L’été approche, et les municipales aussi. Comment est l’ambiance au sein de la mairie à ce sujet?
AB: L’ambiance est sympathique. Nice est une ville calme à mes yeux. La population est attachante mais a également du caractère et est gâtée.
Il me semble que le bilan est positif sur le plan financier, les impôts n’ont pas été augmentés.
Concernant les travaux du tramway, cela peut déplaire à beaucoups d’habitants, mais ils changeront d’avis une fois que tout sera fini. Et il serait d’ailleurs souhaitable qu’ils arrivent à terme dans les délais. Ainsi chacun verra la différence. Nice sera une nouvelle ville. Des oeuvres d’art seront implantées le long du trajet du tramway et il y aura moins de pollution. Le tramway résoudra une grande partie des problèmes. Les Niçois sont certes un peu « gueulards » mais finallement c’est une preuve d’attachement. Ils ne sont pas idiots et verront que le tramway est la meilleure solution. C’est le pied ! Ils commencent d’ailleurs à moins « râler ».
Quant aux commerçants, je les comprend : la situation est difficile pour eux. Ils ont vocation à toujours pleurer, mais n’oublions pas qu’ensuite ils obtiendront 30% de plus value. Il faut tenir le coup jusque là.
Pour en venir aux municipales, la vie d’un élu est de se demander s’il va être réelu. Mais si déjà il fait son travail et réalise ses promesses, les électeurs en tiendront compte.
NP: Si vous vous compariez à une oeuvre d’art, ce serait ?
AB: J’en suis une ! Et incomparable qui plus est, car je suis modeste ! (Rires!)