Reprise de la pièce Le roman d’un trader au TNN, pour l’occasion filmée par France 2, une pièce grinçante mise en scène par Daniel Benoin, et superbement jouée.
Le roman d’un trader, c’est l’histoire d’un week-end de panique d’une grande banque où le directeur apprend qu’un trader a joué 55 milliards d’euros sur la hausse de l’euro alors que celui-ci s’effondre. C’est la crise. La banque n’a plus de liquidités, le directeur cherche l’appui du gouvernement dans l’espoir de sauver la banque et surtout de sauver sa tête.
Sur ce résumé, se greffe une histoire d’amour, enfin plutôt une histoire d’amour-dollar, un veau d’or, un mariage de cocker, et beaucoup d’argent perdu.
La pièce est superbement jouée, Lorànt Deutsch et Tchéky Karyo en tête, ils sont absolument divins, suivis par Paulo Correia, Hubert Saint-Macary et l’excellente Christiane Cohendy. Tchéky Karyo en directeur de banque est incroyable !
La mise en scène est vivante, ingénieuse, moderne, jouant avec les nouvelles technologies, on y voit l’utilisation de téléphones portables, d’ordinateurs, de vidéo conférence. Les décors sont parfois animés et la vidéo de Lorànt Deutsch vers la fin du spectacle est géniale. Son personnage est formidablement décalé, à la limite de la folie, élevé par le jeu aussi bien les jeux d’argent que les jeux vidéo.
On est stupéfait devant la nonchalance de ce trader qui joue avec l’argent comme si ce n’était rien, comme si c’était sans conséquence. L’angoisse du directeur de tout perdre, surtout sa voiture de fonction avec chauffeur, est aussi révélatrice que révoltante. J’ai plusieurs fois pensé à la chanson de Bernard Lavilliers… « tandis que les banquiers jouent avec la banquise ».
C’est l’illustration parfaite d’un monde dans lequel la notion de l’argent atteint une autre dimension.
Certes, la pièce est une fiction mais on peut s’empêcher de se dire « hum tiens ça pourrait s’être presque passé comme cela ».
C’est drôle, ironique, féroce, les dialogues font mouche, on est immergé dans ce monde où la bourse n’est qu’un simple jeu, où l’argent est abstrait. Le spectacle est brillant, les acteurs à saluer, on ressort évidemment ravi, quoiqu’un brin rattrapé par des relents de réalité, celle-ci bien concrète.