Jean-Luc Vannier, Psychanaliste, viendra, régulièrement dans nos colonnes, expliquer un comportement. Il répondra également à vos questions.
A l’adolescence, les jeunes connaissent des transformations physiques que leur psyché, encore plongée dans l’infantile, n’est pas à même de comprendre. Les corps se forment, les systèmes pileux se développent tandis que les premiers émois trahissent le réinvestissement des pulsions par la dimension sexuelle.
Si les chiffres officiels estiment que 80% des ados vont bien , encore faut-il s’entendre sur la définition de la bonne santé. Pour les adultes confrontés au défi du vieillissement, cela veut dire un corps exempt de maladies organiques. Pour les ados en revanche, c’est être « bien dans sa tête » qui est le plus important. A son âge, l’adolescent n’estime pas son corps en danger. Et pour cause. Il a suffisamment à s’occuper avec celui-ci et à satisfaire ses nouvelles exigences. Le corps qui s’ouvre à la vie réclame son dû. L’étape de la puberté constitue en ce sens un authentique cataclysme. Face à ces mutations en apparence inexplicables, le jeune se lance dans de nouvelles quêtes identificatoires dont les parents sont exclus. Parfois incapables de fournir des réponses, ces derniers conservent un silence d’autant plus embarrassé que cette époque les renvoie souvent à leurs propres expériences traumatiques.
La violence de ces changements, l’ado va tenter dans certains cas de se la réapproprier. Aux moyens de comportements dangereux – ceux pour exister au risque d’en mourir – qui appellent comme l’indiquait le célèbre psychanalyste Winnicott « une résistance de l’environnement » . Conduire une voiture à toute vitesse, envisager le suicide, voire passer à l’acte suicidaire, absorber des substances psycho-actives comme des médicaments avant de s’essayer à la drogue, témoignent d’expérimentations aux limites de l’humain ce dont l’ado ne saisit pas toute la dangerosité pour lui-même comme pour les autres mais qui correspondent à l’éprouvé de cet état transitoire. C’est en ce sens que les ados « font peur ». Cette toute puissance dont ils semblent disposer à leur guise, cette ignorance de la mort – d’autant plus feinte qu’elle s’accompagne de provocations, laissent les parents dans un profond désarroi.
L’ado reste pourtant demandeur de repères, de marques et de valeurs. La clinique psychanalytique apporte fréquemment la preuve de l’intérêt du jeune pour l’expérience familiale à condition que celle-ci ne soit pas assénée de manière péremptoire. Racontée sur le mode intimiste de la transmission d’un savoir – une forme d’initiation, l’expérience « des anciens » touche au plus pres les adolescents même s’ils ne le manifestent pas sur le moment. Mais les remaniements psychiques sous la forme d’une référence indirecte dans une conversation ultérieure, voire sous couvert d’une boutade non dénuée d’ironie, prouve l’acquisition – l’incorporation dirait-on en psychanalyse – des vieilles histoires à partir desquelles le jeune va s’en construire de nouvelles.
Jean-Luc Vannier
Psychanalyste – Nice
06 16 52 55 20
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