Ce jour la Cathédrale de Saint-Nicolas ouvre ses portes aux visiteurs après une longue période pendant laquelle la gestion de ce magnifique lieu a été limité aux seules fonctions religieuses.
On connait tous l’histoire du différend entre l’association niçoise qui a géré ce lieu de culte et historique pendant plusieurs décennies et la Fédération de Russie qui en a réclamé la propriété après un abandon de la même durée.
La justice a tranchée et même si un jugement doit être rendu par la Cassation.
Nice Premium avait suivi ce dossier avec beaucoup d’intérêt en donnant la parole aux deux parties.
A cette occasion, nous donnons la parole à Zacharie Van Goey en laissant à nos lecteurs le soin d’apprécier ou pas de ses propos.
Pour qui la honte ?
Pendant plus de quatre-vingt-dix ans, sous l’ère soviétique et postsoviétique, la Cathédrale Saint-Nicolas plus connue sous le nom d’Église Russe de Nice, s’est au fil des ans hissée au rang de site le plus visité de la Ville de Nice.
Depuis six mois maintenant, au prix de quelques contorsions avec le droit et les usages républicains, la justice française décidait certainement sous influence, qu’au nom de la raison d’État, il convenait de reconnaître en la Fédération de Russie le propriétaire de ce patrimoine lové au sein de nos quartiers et entretenu jusqu’alors par l’ACOR (Association Culturelle Orthodoxe Russe), la France, la Région, le Département et la Ville de Nice.
Le changement s’avère radical !
Jusqu’à ce jour , au grand dam de l’Office de Tourisme, ce lieu est interdit au visiteur qu’il soit Niçois ou qu’il ait parcouru la moitié du tour du monde pour admirer cet édifice qui figure toujours en bonne place et occupe encore plusieurs pages dans tous les guides touristiques de la planète.
Seuls les fidèles reconnus par Moscou et filtrés par le « vopos » de service ont la possibilité de franchir les grilles refermées depuis sur cet espace. Le sésame leur ait délivré uniquement pour assister à un office. À ce qu’on dit une partie de ceux-là aurait servi de gardes du corps à la délégation de la Fédération de Russie qui se tenait à Cannes en fin d’année dernière.
Contrairement à ce que beaucoup croient, cette terre n’est plus Française, ceux qui franchissent le portail sont désormais en « Russie », comme se plaisent à le dire les individus tout en muscles, vêtus de noir, s’exprimant avec un fort accent de l’Est et affichant une froideur étrangère à la culture méditerranéenne qui, dans leurs attitudes martiales et leur langage intransigeant, distillent parfois grossièrement à ceux qui oseraient s’aventurer en terre étrangère, qu’ils n’ont rien à faire en ce lieu.
Il arrive même que des « autorisés » d’hier deviennent des « interdits » d’aujourd’hui ; sanction prononcée manu militari par un membre de ce « nouveau » Clergé diligenté par Moscou pour « recadrer » tout ce petit monde.
On confère généralement aux religieux de toutes confessions des paroles et des actes synonymes d’amour de son prochain. On imagine difficilement que ces hommes de « bonté » se laissent aller à des paroles déplacées associées parfois à des violences physiques qui auraient mérités que des plaintes soient déposées ; mais l’aura, la peur, où je ne sais quoi encore ont fait que les hostilités en sont restées là.
Quoi qu’il en soit, passer en quelques mois seulement, de plus de cent mille visiteurs à zéro, voici un exploit qui mériterait de figurer au Guinness World Records.
Comment en est-on arrivé là ?
A vrai dire il fallait une longue expérience forgée à l’aune des méthodes de l’époque soviétique pour espérer une telle réussite. Signe des temps sans doute, un soupçon d’humanité abrite désormais des intempéries, du froid ou du chaud ces « cerbères ». Il prend la forme d’un bungalow en bois ressemblant plus à un chalet suisse qu’à une datcha. Une construction qui ne manque pas de dépareiller dans ce paysage urbain unique et jadis très activement protégé par ceux que l’on n’a pas hésité à chasser ; des marchands du temple a-t-on même dit !
A cette époque là, encore toute récente, l’Église était un lieu de rencontre et de convivialité complètement intégré dans la vie du quartier. En compléments aux offices, aux cérémonies, se tenaient ici, tous les mercredis, des conférences culturelles multilingues. Elles initiaient les plus curieux à la situation qui régnait au début du siècle dernier, aux aléas qui présidèrent à la naissance de ce lieu et aux péripéties de toutes natures qui émaillèrent le parcours unique de ce patrimoine, depuis sa gestation jusqu’à nos jours.
De quelque confession qu’il puisse être, celui qui entrait ici était accueilli avec respect, il y avait même des rires d’Enfants dans les jardins qui entourent l’édifice. Certes ceux qui souhaitaient visiter l’intérieur devaient s’acquitter d’une obole de trois Euros. Moscou ayant occulté les besoins financiers de ce lieu de culte hors frontière, il fallait bien engranger des recettes pour assurer l’essentiel de l’entretien du bâti et pour garantir les salaires des neuf salariés en charge de l’accompagnement ou de la sécurité du site et qui sont tous aujourd’hui licenciés, ce qui fait dire à certains : « c’était la belle époque » !
En son temps la Cathédrale fût édifiée par des Entreprises et des matériaux essentiellement issus de France, voire d’Italie pour certains, comme les majoliques qui ornent la façade par exemple. C’était la volonté du Tzar qui, dans le cadre de cette démarche affirmait vouloir intégrer le bâtiment et la colonie Russe dans le microcosme Niçois.
L’ambiance actuelle semble prendre une direction opposée, tout porte à le croire. Le projet de grande restauration que Moscou et le « nouveau clergé » entendent mettre en œuvre ne fera appel qu’à des Entreprises et à des matériaux en provenance de la Fédération de Russie, aucun appel d’offre n’a été lancé sur la région.
Gageons que Monsieur l’Architecte des Bâtiments de France et Monsieur l’Adjoint au Maire en charge du Patrimoine, qui par ailleurs confesse à qui veut l’entendre « qu’il ne s’endort pas sur le patrimoine Niçois », ne seront pas de trop pour faire respecter la qualité de la prestation que ce monument requiert du seul fait de sa spécificité à laquelle est attachée un classement au patrimoine national voulu par la France depuis plusieurs décennies déjà.
Peu à peu, que ce soit au niveau de l’accès ou au niveau de la restauration, on voit que les deux politiques d’intégrations voulues d’une part par le Tzar Nicolas II et par son… « successeur » Vladimir sont résolument opposées.
Quoi qu’il en soit, chacun s’accorde à dire que tout sera fin prêt pour la commémoration du centenaire de la Cathédrale. Mais est-ce bien sûr ?…
En attendant, l’ACOR s’est repliée avec ses Prêtres, ses Fidèles et sa Chorale dans des locaux aimablement mis à sa disposition par les Responsables d’une École Catholique Niçoise, le temps que les travaux de réhabilitation se terminent et lui permettent de réintégrer l’Église Saint-Nicolas et Sainte-Alexandra sise Rue Longchamp à Nice.
Vous voyez bien que le climat est serein, détendu et que l’entente Chrétienne existe… sauf au delà de ce qu’était naguère le rideau de fer ; alors, à qui la honte ?
par Zacharie Van Goey