Diplômé de l’Ecole Nationale de la Magistrature, c’est à Doaui, à Chartres et à Créteil que le juge Halphen construira sa carrière avec en point d’orgue la vice-présidence du Tribunal de Nanterre. Sept années de travail dans l’un des plus importants scandale politico-financier de ces dernières années, celui des HLM de Paris, le mettront à la une du payage média français.
Désaisi du dossier en 2001, il quittera la magistrature pour se consacrer à l’écriture avec à la clef des titres tels « Sept ans de solitude », « Mitterand, ombre et lumière » ou « Baisers Maudits ».
Eric Halphen sera présent à Nice, aujourd’hui, pour présenter son nouvel ouvrage, « Le bal des outrés », un recueil de 44 propositions de fond pour améliorer tout ce qui pourrait l’être dans la justice, mais aussi pour participer à une conférence débat en compagnie de Eric de Montglofier concernant « Les réformes de la justice ». Cette conférence débat est organisée par Jean Christophe Picard, candidat à la prochaine élection municipale niçoise sous les couleurs du Parti Radical de Gauche.
Si vous souhaitez rencontrer Eric Halphen, il vous faudra vous rendre au forum de la FNAC de Nice à partir de 17h30 et si vous désirez lui poser quelques questions ce sera à l’hôtel Splendid (BD Victor Hugo – Nice) à partir de 20h00.
Eric Halphen s’est prêté au jeu de l’interview virtuelle Nice Première en attendant la rencontré réelle de demain.
En savoir plus sur Eric Halphen.
Nice Première : M. Eric Halphen, quels sont les premiers conseils que vous porteriez à la justice d’aujourd’hui en France ?
Eric Halphen : Le « pouvoir judicaire », évoqué par Montesquieu comme étant une des composantes essentielles de notre démocratie, a été remplacé, dans notre constitution, par la notion d' »autorité judiciaire », ce qui était déjà un déclassement. Maintenant, on parle seulement de « service public de la justice ». Cela montre que notre justice n’est plus considérée comme elle devrait l’être. Il est donc urgent, pour rétablir son image, de la moderniser (refonte de la carte judiciaire, unification des justices judiciaire, administrative et financière), de la responsabiliser (à une indépendance accrue des magistrats du siège, assurée par un CSM rénové, devrait correspondre une mise en cause plus efficace de la responsabilité de ceux qui ne travaillent pas comme il devrait), de la rendre plus accessible et plus ouverte sur le monde extérieur.
NP : Clearstream et Outreau, votre opinion sur ces deux affaires ?
EH : Outreau, plutôt que de focaliser sur le seul juge d’instruction, a montré que les gardes-fou prévus dans toute la chaîne judiciaire n’ont pas fonctionné. Dans mon livre, Le Bal des outrés, je me suis donc attaché à trouver des solutions, du début de cette chaîne (garde à vue) à la fin (les assises et la prison). Mais je trouve aussi que les politiques ont été prompts à se saisir de l’opportunité pour stigmatiser une justice à qui, depuis quelques années, ils reprochent une trop grande émancipation.
Cleastream, c’est d’abord la corruption, dont je regrette qu’on ne l’évoque qu’en périodes préélectorales, pour trouver des armes contre les adversaires ou « amis » politiques, et non le reste du temps pour lutter vraiment contre ce fléau (notamment en améliorant enfin la coopération judiciaire internationale). Mais Clearstream, c’est aussi l’utilisation, au plus haut niveau, des services de l’Etat à des fins individuelles.
NP : Existe-t-il en France des villes où la justice est plus difficilement appliquée ?
EH : Ce n’est pas une question de villes mais de régions. Dans certaines d’entre elles, en particulier le sud-est, on constate l’existence de réseaux influents, d’un véritable milieu, et des connections entre ces deux mondes qu’on voit moins ailleurs.
NP : Quel est votre avis sur le rôle de la presse dans la justice, et vice-versa ?
EH : Le secret de l’instruction, et je le regrette car j’y étais attaché, n’existe plus. En un quart d’heures, une cinquantaine de personnes sont au courant d’un acte censé confidentiel. Il faut arrêter avec l’hypocrisie en le supprimant. Pour le reste, l’affaire d’Outreau a montré le rôle néfaste joué parfois par la presse. Dans une démocratie, pas de pouvoir sans contrepouvoir. La presse n’en a pas. C’est pourquoi je propose la création d’un conseil de l’éthique de la presse, qui mettrait en oeuvre la responsabilité des journalistes.
NP : Quel est votre position sur les conditions carcerales françaises ? quelles sont les améliorations immédiates à apporter ?
EH : Cela fait des années que les magistrats attirent l’attention des parlementaires et ministres sur l’état désastreux de nos prisons, indigne d’une démocratie telle que la nôtre. Et cela fait des années qu’on ne fait rien. Mais ce n’est pas qu’une question de locaux. Certains droits fondamentaux de l’individu sont bafoués en prison. Je propose la création, dans chaque département, d’une commission indépendante chargée d’inspecter à l’improviste les prisons, et de signaler tout manquement constaté.
NP : Vous intervenez à Nice ce soir avec Eric de Montgolfier, l’actuel Procureur de la Ville de Nice. Comment définiriez-vous la personne comme le personnage ?
EH : J’apprécie l’homme que je connais un peu, et j’estime son travail en tant que procureur, exercé avec courage dans un environnement difficile.
NP : D’après-vous quels seront les candidats majeurs à l’élection présidentielle à venir ?
EH : Celle et ceux auxquels vous pensez…
NP : Enfin, si on vous propose demain le poste de Ministre de la Justice. Vous en diriez quoi ?
Je doute fort que quiconque me le propose…