Comme chaque année, des milliers de touristes et de fêtards pullulent dans les rues du Vieux Nice, de commerce en commerce, dans une chaleur étouffante. Dans certaines ruelles, l’odeur pestilentielle est insoutenable. Les détritus et les sacs poubelles s’empilent ça et là en totale impunité. Et pour couronner le tout, les rats et cafards s’incrustent sans scrupules à la fête…
Comment le Vieux Nice, haut lieu du tourisme niçois, faut-il le préciser, a-t-il pu en arriver là ? Cette situation est-elle inévitable et irréversible ? Pas vraiment.
Daniel Silvetti fait partie, bien plus que des mécontents, des victimes de l’insalubrité générale. Propriétaire d’un restaurant de spécialités niçoises, « Lu Fran-Calin », situé à quelques mètres seulement d’un local à poubelles, il se plaint régulièrement, entre autres, de l’odeur infâme qui se dégage de celui-ci. Et les fortes chaleurs du moment n’arrangent rien à l’affaire. « En terrasse, je suis souvent contraint de changer les gens de place », déplore-t-il. « J’ai essayé tout types de produits pour masquer l’odeur, dont des bâtonnets d’encens disposés un peu partout. Mais rien n’y fait ».
Si la situation n’a jamais été, et ne sera sûrement jamais, parfaite dans le Vieux, elle devient aujourd’hui critique. Et l’hygiène dans certains endroits laisse vraiment à désirer. Pourtant, les principaux facteurs du phénomène sont bien connus.
Tout d’abord, comment passer à côté de ce fameux problème des locaux à poubelles. Il y a quelques semaines, des containers en fer faisaient encore office de décharge. Les locaux restaient ouverts en permanence, permettant leur accès aux commerçants et riverains à toute heure du jour et de la nuit. Mais un départ d’incendie a contraint le remplacement des containers en fer par des bennes en plastique, et, surtout, la fermeture des locaux après la dernière tournée des éboueurs, aux alentours de 19h.
« Je comprend les raisons de sécurité de cette nouvelle mesure », explique Daniel Silvetti. « Mais aujourd’hui, les gens ne veulent plus rentrer dans cette puanteur, ils balancent leurs sacs poubelle qui, une fois sur deux, tombe sur le sol. La nuit, une montagne de déchets s’empile devant la grille. Il faut vite trouver une solution, je ne pourrai pas imposer ce spectacle à mes clients encore très longtemps ». Et plus la situation se dégrade, plus l’incivisme de la population se fait sentir. « La municipalité nous a promis qu’elle allait repeindre et recarreler tous les locaux, peut-être cela incitera les gens à plus de respect », poursuit le restaurateur. « Mais de toute façon, la solution est simple : il faut nettoyer ces lieux de fond en comble quatre ou cinq fois par jour, au lieu d’une seule fois comme actuellement, et une grande partie de nos problèmes seront réglés… ».
Les poubelles ne sont pas l’unique cause de l’insalubrité de la vieille ville. On peut noter également l’absence de toilettes publiques, les pavés nettoyés à l’aide d’une petite voiturette de la CANCA, moins efficace que le traditionnel karsher utilisé encore il y a quelques années, les tags et affiches qui squattent sauvagement murs, colonnes ou rideaux de fer, ou encore ces scooters ou appareils ménagers que l’on voit traîner au fil des allées des semaines durant, dans un état de délabrement avancé.
Chez les habitants du Vieux, mais bien plus encore pour les commerçants, qui comptent sur la saison estivale pour remplir les caisses, la colère monte. Les discussions sont en cours, mais comme toujours, les mesures concrètes tardent à arriver. Et avec la canicule qui se profile pour les prochains jours, il commence à y avoir urgence. Le mot de la fin revient à Daniel Silvetti, à propos du sénateur-maire Jacques Peyrat : « Au lieu de tuer des rats agonisants à coups de pelle, il ferait mieux de passer un peu le jet d’eau dans la rue… ».
Nicolas Pelazza