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21 novembre 2024

Le FlairBartending, qu’est ce que c’est?

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Sur notre belle côte d’azur, le milieu de la nuit regorge d’une multitude de personnages tout aussi intéressants les uns que les autres. Fredéric Raton fait partie de ceux là. Amoureux d’un art trop méconnu en France alors que mondialement reconnu, il a accepté de partager sa passion avec nous.


bartending-itw.jpg Nice-Première : Fred, d’abord peux-tu nous expliquer ce qu’est le flair ?

Fredéric Raton : Le flair c’est très simple c’est l’art de jongler avec les bouteilles. Mais en fait le terme exact est flair bartending. Il ne s’agit pas uniquement de faire un show mais avant tout de faire un cocktail. Il y a 2 styles de flair : le working flair qui est celui que je pratique et l’ Exibition Flair. Comme son nom l’indique le working flair c’est du flair qui sert à faire un cocktail. C’est une manière de travailler, une façon de rendre la préparation d’un coctail agréable à regarder pour le client qui attend son verre. L’exibition Flair lui n’a pas pour vocation première de faire des cocktails. Pour moi ça s’apparente plus à du jonglage qu’autre chose et ça ne m’intéresse pas.

N.P. : Comment as-tu eu envie de faire ce métier ?

F.R. : J’ai toujours eu envie de faire ce métier. Quand j’étais gosse, mon père avait construit un véritable bar dans la maison et on passait nos dimanches à faire des cocktails. J’avais 12 ans. C’est de là que m’est venue mon envie de découvrir cette façon de faire et aussi l’amour des produits. J’ai toujours essayé des nouveaux cocktails en variant les ingrédients. Mais à l’époque, je ne me doutais pas que j’en ferais mon métier.

N.P. : Parle nous un peu de ton parcours.

F.R. : Je suis originaire de Pornic. C’est là-bas que j’ai commencé à travailler et dans la restauration comme serveur car en n’ayant aucune expérience professionnelle, c’est l’un des seuls métiers où l’on vous donne votre chance. Donc serveur pendant 3 ans et ensuite le saut derrière le bar en tant que saisonnier dans une station de ski. Et après mon bac, je suis parti sur Paris où j’ai travaillé d’abord au Bistro Romain sur les Champs Elysés, puis au Planet Hollywood. C’est d’ailleurs là que j’ai rencontré des gens qui faisaient du flair. En particulier, Xavier Simonet, Steeve Brenes et John Dopéré. Ces mecs m’ont appris les rudiments du flair mais aussi surtout le vrai métier de bartender. Je m’explique : la connaissance des produits, la gestion des stocks, le nettoyage et bien sûr le service. Et après le Planet, j’ai été embauché au FBI.

N.P. : Le FBI ?

F.R. : Oui le FBI. Ce qui voulait dire le Freestyle Bartending Institute. Je parle au passé parce que l’endroit est fermé aujourd’hui. C’était le seul bar où tous les barmans faisaient du flair. D’ailleurs tout était fait pour le flair. C’était un vrai bar à l’américaine. J’ y ai d’ailleurs beaucoup progressé là-bas avec Xavier. Je finis mon parcours. Après le FBI j’ai été débauché pour devenir le manager d’un bar qui allait ouvrir à l’époque le Backstages Café, rue de la gaieté toujours sur Paris. C’est moi qui ai dessiné le plan du bar en fonction de ce que je voulais pour pouvoir bien travailler. Mais au bout d’un an je suis parti parce que la politique des patrons ne correspondait plus à ma façon de voir le flair. C’est là que je suis venu sur la côte d’Azur. J’ai travaillé un an au Star’s and Bar’s puis après j’ai fait un court séjour de 6 mois à Londres au Planet Hollywood. Retour à Monaco au Karément où je suis resté jusqu’en octobre 2005.

bartending.jpg N.P. : Donc, si je suis bien, tu as travaillé à Londres, à Paris, à Monaco et à Pornic ?

F.R. : Oui c’est ça (rires). J’ai aussi travaillé sur Nice, au Karpedie’M dans le vieux nice. C’est important de bouger dans ce métier ne serait-ce que pour sa propre expérience personnelle. Il faut savoir qu’en France il y a encore beaucoup de boulot avant d’être à la hauteur des bars américains ou anglais. Que ce soit de la part des marques d’alcools qui ne voient que le nombre de bouteilles vendues sans se soucier de la qualité, souvent très médiocre ou de la part des patrons d’établissements qui ne comprennent pas que l’on puisse travailler comme ça.

NP. : Que fais-tu maintenant ?

F.R. : Aujourd’hui je ne travaille plus derrière un bar tous les soirs, car justement je n’y trouve plus d’intérêt. Il y a peu d’établissements sur la côte qui permettent de travailler correctement. Je veux dire par là que les bars sont très mal agencés et c’est normal car ce sont des architectes qui les construisent alors que ça devrait être les bartenders. Donc je bosse que au coup par coup. J’ai intégré une société d’évènementiel « Spirits Awards ». Nous faisons de la formation, du consulting, de l’agencement et des soirées privées. J’y travaille aux côtés de Johan Bouard qui fait surtout du working flair, de William Longhurst qui s’occupe de tout ce qui est « contacts » avec les établissements et les fournisseurs. Il y a aussi Nicolas Saint Jean, le champion du monde de flair qui travaille avec nous sur les soirées que l’on organise.

N.P. : Tu as parlé de formation. Tu peux nous en dire un peu plus ?

F.R. : La formation, c’est un vaste sujet. Pour le flair le plus important c’est d’arriver à maîtriser la bouteille et le shaker. Comme je l’ai déjà dit pour moi je veux avant tout que le flair soit efficace. Il ne s’agit pas uniquement de jongler. Donc on forme les gens qui suivent nos stages au flair mais aussi à tout ce qu’il faut connaître pour être un bon bartender, c’est-à-dire les produits, la préparation des cocktails, apprendre à verser la bonne dose sans aide. Tout ça, ça s’apprend, ce n’est pas inné.

N.P. : Pour avoir un niveau correct, combien faut-il de temps à ton avis ?

F.R. : Pour moi, une formation de 10 heures suffit amplement. Mais dans certaines écoles ils te font faire les 10h en 1 semaine. Je trouve ça inutile. Si tu n’y connais rien, tu viens, je t’apprends pendant 2 heures des mouvements et ensuite on se revoit une semaine après. Ca te laisse le temps de t’entraîner et d’assimiler ce que je t’ai appris. Si on se revoit le lendemain, tu n’auras pas eu de temps pour réviser et donc ça revient à payer pour s’entraîner et non pour apprendre d’autres mouvements.

N.P. : Le milieu de la nuit est un milieu particulier avec ses excès et ses abus. Comment as-tu fait pour gérer ça ?

F.R. : Au début, j’avoue que tu te laisses facilement entraîner. Quand t’as 20 ans que tu as de l’argent facile avec les pourboires et que tu peux rentrer partout parce que tout le monde te connaît, c’est grisant. Mais je ne suis jamais tombé dans l’extrême non plus… Pour moi le bar a toujours était un loisir, c’est pour ça que ça a duré aussi longtemps dans ma vie et que j’avais toujours envie d’aller bosser. Je m’évadais souvent aussi en partant en vacances régulièrement ou en week end. Et depuis 2 ans, j’ai rencontré ma femme, Emilie et elle m’aide aussi à garder les pieds sur terre.

N.P. : Si tu devais résumer, le flair qu’est ce que c’est pour toi ?

F.R. : Le flair c’est une façon de travailler. Ca ne doit pas être du jonglage car la finalité d’une routine de flair c’est que le liquide coule dans le shaker. Ca doit être une valeur ajoutée. Alors c’est vrai que bartender ce n’est pas primordial mais qu’est ce que c’est bien de savoir en faire.

bartending2.jpg N.P. : Même si c’est un peu en retard, en cette période de vœux, qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour cette nouvelle année ?

F.R. : Je me suis marié à la fin de l’année dernière donc un bébé ça serait bien, mais ça n’a rien à voir avec le bar (rires). Pour rester dans le sujet, et bien je dirais du travail bien sur, mais auprès des gens qui croient en notre métier. Et pas des gens qui exploitent notre savoir faire pour se faire de l’argent sur notre dos. On fait un show malgré tout et ça attire le regard, et c’est bon pour l’image de ces endroits, donc il devrait nous respecter un peu plus.

N.P. : On arrive au terme de notre entretien, aurais-tu une anecdote à nous raconter ?

F.R. : Une anecdote ? (Il réfléchit) Ben oui j’en ai une. Comme je te l’ai dit, je me suis marié en Octobre dernier et avec ma femme nous sommes partis en voyage de noces à Anguilla. Et tu sais ce que j’ai trouvé en posant ma serviette sur la plage ? Une bouteille de Bacardi vide !!! Et du coup, je me suis retrouvé à faire du flair sous les cocotiers sous les yeux de ma femme. Comme quoi, le destin… Tu vois après quelques années, peu importe où je sois, je me sens attiré par les objets et j’essaye de faire du flair avec tout ce qui m’entoure, mon téléphone, le gel douche, le tube de dentifrice, etc. mais je ne suis pas malade !!! (rires)

N.P. : Sympa en effet. Un dernier mot pour finir ?

F.R. : Je voudrais préciser quelque chose pour les gens qui voudraient se lancer dans le flair bartending. Il faut être patient et ne pas brûler les étapes. Des gens comme Siphung You, Romain Chassang ou Benoit Boutrou que j’ai formé en partie l’ont très bien compris. Ils sont restés humbles et reconnaissants. Et pour moi c’est très important. Donc ne pas prendre la grosse tête et je voudrais d’ailleurs leur rendre hommage et les remercier pour ça. Et crois moi, c’est loin d’être le cas pour tout le monde. Ils se reconnaîtront…

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