Les associations niçoises s’unissent pour tirer la sonnette d’alarme : les logements d’accueil des demandeurs d’asile sont saturés dans le bassin niçois. En cette journée mondiale des réfugiés, elles interpellent les pouvoirs publics sur ce « problème de santé et de dignité ».
« Ce qui nous pose problème aujourd’hui sur Nice, c’est qu‘il n’y a pas possibilité de pouvoir héberger les demandeurs d’asile de façon sécurisée et digne« , alerte Karine Dziwulski, déléguée Départementale du Secours Catholique des Alpes-Maritimes. Une situation critique constatée unanimement par les quatre associations (Secours Catholique, Cimade, Amnesty International, Habitat et Citoyenneté) qui les accueillent et les accompagnent.
Alors, il est temps de tirer la sonnette d’alarme : il y a une pénurie de logements proposés par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII). « La situation a encore empiré ces derniers temps et est devenue intenable », partagent les associations dans un communiqué commun. À Nice, il existe trois centres d’accueil de demandeurs d’asile (CADA), dont un qui aurait une capacité d’accueil de 500 personnes.
Des hébergements d’urgence saturés
Mais ce manque de places touche également les structures d’urgences. Proposées par le 115, ces deux haltes de nuit sont aussi saturées. C’est pourquoi les demandeurs d’asile, des hommes, femmes (enceintes) et enfants dorment dans la rue. « Et il est à prévoir que ces hébergements d’urgence vont aller en diminuant, dès la rentrée », s’inquiète Karine Dziwulski.
De plus, Nicole Sheck, médiatrice sociale à Habitat et Citoyenneté, soulève un autre problème : « L’accueil de nuit est inconditionnel, ce qui n’est pas respecté à Nice« . En effet, elle reproche au CCAS qui gère l’accueil d’urgence de la rue Trachel d’accepter seulement ceux présentant des documents de séjour. « Ce qui est tout à fait illégal », ajoute-t-elle.
Des demandeurs d’asile menacés d’expulsion à l’Église du vœu ?
« Où va-t-on aller si on quitte l’Église du vœu ? », lâche un demandeur d’asile. À la nuit tombée, c’est sur le parvis de cette église située en face de la Coulée de Verte qu’ils établissent leur campement faute de places dans les structures devant les accueillir. Un espace qu’ils occupent seulement quand l’Église est fermée et de manière méthodique. Ils assurent ne pas gêner le voisinage, ne pas créer de problèmes ni de sécurité ni d’hygiène. Étant même « appréciés du curé », ils repartent dès que le jour se lève.
Le 8 juin dernier, Anthony Borré, premier adjoint au maire de Nice annonce sur son compte Twitter lancer « une procédure en référé pour faire évacuer les clandestins qui occupent ses abords ». Il s’agit d’une mesure d’urgence visant à prévenir un dommage ou faire cesser un trouble illicite.
Les associations s’empressent de réagir. « Ce ne sont pas des clandestins, ce sont des personnes en situation régulière qui ont parfaitement le droit d’être sur le territoire », rétablit Christine Panaïotis, présidente de la Cimade 06. Nicole Sheck ajoute avec regret : « C’est l’endroit le plus secure de Nice […] notamment pour les femmes et les enfants. C’est ce qu’on a de mieux à leur offrir« .
En cas d’expulsion, ils confient ne pas avoir de solution de repli d’urgence. Toutefois, les associations ayant été mises au courant par la presse de la situation, une défense est préparée par des avocats. Le référé est, à ce jour, pas encore déposé devant le Tribunal administratif.
Une « cascade de défaillance » de la part des pouvoirs publics
« Nous qui sommes là pour accompagner les demandeurs d’asile dans leur procédure d’asile, on passe de plus en plus de temps à les accompagner dans des démarches administratives qui n’ont pas lieu d’être », témoigne Christine Coupon d’Amnesty International. Des démarches auprès de la Préfecture de Marseille qui ne délivrerait pas le renouvellement des demandes d’asile à temps entraînant l’expulsion des demandeurs d’asile notamment de la rue Trachel.
La loi française garantit le droit à l’hébergement à tout demandeur d’asile, en fonction de sa situation et durant toute la durée de l’examen de sa demande. Démuni face à une situation « dramatique » relevant d' »une cascade de défaillance » notamment de la part des pouvoirs publics, le Secours Catholique opte pour des solutions de fortune. Avec la Cimade, ils fournissent des tentes à ceux qui ne bénéficient pas d’un endroit pour dormir. « Mais distribuer des tentes est un cache-misère, pas une solution. »
Les Alpes-Maritimes ne font pas partie des départements recevant le plus de demandes d’asiles. Ils sont vingtième au classement, le département étant surtout un territoire de passage. « Il n’y a pas de corrélation entre le nombre de demandes d’asile déposés et la proximité avec la frontière« , met au claire Nicole Sheck. En 2022, 3 642 personnes se sont présentées à la Structure du Premier Accueil des Demandeurs d’Asile (SPADA) sur le territoire niçois.