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24 novembre 2024

Patron, remettez-nous une tournée avec modération…

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Grosse discussion, au café du commerce à l’heure de l’apéro, où nous étions plusieurs appuyés au comptoir. Et plus on avançait, plus les idées géniales – forcément géniales – fusaient pour que notre État endetté fasse, enfin, de vraies économies.

Patron, une tournée ! Premier sujet abordé : les députés, jugés à l’unanimité en trop grand nombre. C’est vrai que 577 élus pour représenter plus de soixante millions de Français et voter des milliers de textes souvent complexes, cela fait beaucoup. Tout le monde est tombé d’accord pour réduire les effectifs de ces privilégiés qui assistent à des séances interminables et vont se faire secouer les puces lorsqu’ils reviennent dans leurs circonscriptions. S’est posée la question fondamentale : « Combien en faut-il ? » Une large majorité des convives a fixé à une centaine, grand maximum. Estimant qu’au delà, ce serait pur gaspillage.

Patron, une tournée !
Et maintenant au tour du Sénat : une deuxième chambre, finalement, à quoi cela sert-il sinon à embêter les députés, à les forcer à une deuxième lecture, à des commissions mixtes paritaires, pour décider de questions aussi futiles que les libertés, la fiscalité, la justice, la défense…. Allez, zou, vendu : abolition du Sénat.

Patron, une autre tournée !
Légèrement imbibée, la docte assemblée a alors étudié le cas des régions, des départements, des villes et des villages. Pour convenir qu’au lieu d’embêter régulièrement le corps électoral pour désigner des gens qui vont organiser le ramassage des poubelles, la construction des écoles, la solidarité avec les personnes âgées ou dépendantes et ce genre de questions futiles, il serait bien suffisant qu’un seul, un préfet par exemple, décide seul dans son coin. Ce serait gage d’efficacité et de rapidité, au lieu de se perdre dans des palabres sans fin, des commissions, des contrôles… Adopté.

Patron, remettez-nous ça !
Ces libations répétées ont aussi permis de dégager des pistes intéressantes pour l’avenir : pourquoi continuer à financer l’agriculture qui nous nourrit ? Les énergies « douces » ? La recherche médicale, puisque les « labos » s’en chargent très bien de façon désintéressée ? Pourquoi s’évertuer à rouler à 80 km/h alors qu’à 30km/h il y aurait encore moins de morts sur les routes. À repêcher des migrants qui se noient, alors qu’on ne peut leur promettre aucun avenir ici ? Et aussi pourquoi une Justice, alors qu’il suffirait de construire des centres de rétention dont la vue aurait forcément un effet dissuasif sur les délinquants.

Patron… driiing !
J’en étais là de ces élucubrations lorsque le réveil a sonné, me sortant de ce cauchemar sans doute causé par un abus de rosé bien frais. Moralité : il faut boire avec modération les soirs d’été… Patron, remettez-nous une tournée avec modération…

Jean-Marie Chevallier, Les Petites Affiches

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