La garde à vue est une mesure grave qui devrait seulement être limitée aux nécessités d’une enquête lorsqu’il existe contre une personne des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Mais, en pratique, cette mesure est souvent utilisée pour garder une personne à disposition même si sa présence n’est plus réellement nécessaire à la poursuite d’une enquête en cours.
Le régime actuel
Quelle est la durée d’une garde à vue ?
La durée de la garde à vue est de 24 heures et peut être prolongée de 24 heures ou 48 heures sur autorisation du Procureur de la République. Pour les affaires de stupéfiants, de délinquance organisée et de terrorisme, la durée peut être de 96 heures maximum.
Quels sont les droits de la personne gardée à vue ?
La personne gardée à vue doit être immédiatement informée dans une langue qu’elle comprend :
- de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête,
- des dispositions relatives à la durée de la garde à vue,
- et de ses droits, c’est-à-dire :
Le droit de faire prévenir par téléphone la personne avec laquelle elle vit habituellement, sa famille, ou son employeur, dans un délai de 3 heures à compter de son placement en garde à vue,
Le droit d’être examiné par un médecin,
Le droit de s’entretenir avec un avocat de son choix dès la première heure de la garde à vue, l’entretien étant confidentiel et ne pouvant excéder une durée de 30 minutes. L’avocat ne pouvant intervenir qu’à la fin d’un délai de 48 heures pour les personnes gardées à vue pour des affaires de délinquance organisée ou de 72 heures pour des affaires de trafic de stupéfiants ou de terrorisme.
Alors qu’en 2001, le nombre de gardes à vue était de 336.718, plus de 790 000 mesures de gardes à vue ont été décidées en 2009, dont plus de 170 000 pour les seuls délits routiers.
Aussi, le 7 septembre dernier, le garde des Sceaux a indiqué que deux textes, l’un relatif à la garde à vue et l’autre portant sur la première partie de la réforme de la procédure pénale allaient être déposés au Conseil d’État.
Les mesures proposées
L’avant projet de loi relatif à la garde à vue répond à plusieurs objectifs :
- le droit à la présence d’un avocat durant toute la garde à vue pour toutes les gardes à vue de droit commun,
- la diminution du nombre de gardes à vue : seules les personnes soupçonnées d’un crime ou d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement pouvant être placées en garde à vue,
-
la possibilité pour une personne suspectée d’être interrogée au cours d’une d’audition libre en dehors du régime de la garde à vue. La prolongation de garde à vue ne sera plus possible pour les délits punis de moins d’un an d’emprisonnement ;
-
enfin, l'interdiction des fouilles à corps intégrales et la notification du droit au silence.
Si ce projet de loi peut sembler constituer une avancée, plusieurs dérogations sont prévues pour empêcher l’application de son intérêt principal, à savoir la présence de l’avocat durant toute la garde à vue.
En effet, le Procureur aura la possibilité de différer la présence de l’avocat, à la demande de l’officier de police judiciaire, pendant une durée maximale de douze heures « en considération des circonstances particulières tenant à la nécessité de rassembler ou conserver les preuves ».
Quelle sera alors la marge de manœuvre laissée aux enquêteurs de demander au procureur de repousser l’arrivée de l’avocat à la douzième heure de la garde à vue ? Le terme de « nécessités de l’enquête» revêt une définition imprécise et large qui mérite d’être définie. A défaut, tout porte à croire que l’exception deviendra la règle.
De même, le principe de l’audition libre ne garantit nullement le respect de droits inhérents à la garde à vue, tels que la présence d’un avocat au début, le fait de pouvoir prévenir la famille ou le droit à un examen médical.