Il faut faire appel au glossaire de l’escrime pour commenter ce combat à l’arme blanche qui a comme protagonistes, Christian Estrosi, dans ses multiples et variées fonctions publiques , et le Préfet Adolphe Colrat qui doit regretter sa nomination dans la capitale des Alpes-maritimes qui est bien loin d’être ce territoire somnolent, avec des hommes politiques indolents.
Le premier, habitué à des préfets zélés, s’indispose de plus en plus de l’attitude de ce dernier qui à la « belle idée » de s’opposer aux desiderata de celui qui a plutôt l’habitude de ne pas voir ses volontés freinées .
Attaque, parade et riposte continueront à caractériser ce duel qui amuse peut-être la galerie mais qui n’est pas à la hauteur du niveau des duellistes.
Le dossier de la salle de culte de la rue Pontremoli revient donc sur la table à l’initiative de Christian Estrosi par le biais d’un raisonnement spécieux qui a comme seul but de mettre en porte-à-faux le Préfet Colrat.
De son côté , ce dernier ne peut qu’ affirmer son obligation de se référer au droit et , dans ce cas d’espèce, aux décisions des tribunaux.
En attendant la prochaine prise de bec, on laisse à ceux qui aiment ce genre de querelles , la possibilité de s’agrémenter avec la lecture intégrale des textes.
Communiqué de Christian Estrosi:
Dans un communiqué datant du 2 avril 2016 le Préfet des Alpes Maritimes avait accepté l’ouverture du centre cultuel En Nour à deux conditions :
- que cet équipement ne dépende en aucune façon d’une influence étrangère, que ce soit sur le plan de la propriété des locaux, du financement, ou de la doctrine religieuse ;
-
que sa gouvernance s’inscrive clairement dans le cadre de la loi de 1905, en y associant la collégialité représentative du culte musulman à Nice et dans le département, faisant ainsi de l’institut un équipement pleinement représentatif d’un islam départemental unitaire.
Ces deux conditions permettraient, selon ce communiqué, d’assurer que cet établissement soit l’expression exemplaire d’un islam de France pleinement respectueux des lois et des valeurs de la République, apte à dialoguer dans la confiance avec les représentants des pouvoirs publics.
Malgré cela, début juillet 2016, le Préfet des Alpes-Maritimes s’est substitué au Maire de Nice, pour autoriser l’ouverture prématurée de ce lieu de culte, sans communiquer sur l’évolution du respect de ces deux conditions.
Le préfet avait fixé jusqu’au mois d’Aout 2016 pour que le promoteur du projet réponde à ces conditions. A ce jour, malgré nos relances, je n’ai toujours pas de réponse du préfet pour savoir si ces conditions sont remplies.
Parallèlement, le Premier ministre Manuel Valls a déclaré qu’il était favorable à l’interdiction temporaire du financement étranger des mosquées. Or, la transparence des fonds de l’institut En Nour pose toujours question. L’Etat doit avoir une position claire. Je me refuse de croire que dans notre République un préfet puisse désavouer à ce point le Premier ministre.
Je demande donc solennellement au Préfet des Alpes Maritimes de respecter sa parole en nous annonçant si ces conditions sont remplies, ainsi que de nous faire connaître sa décision quant au maintien de ce lieu de culte qui, je le rappelle, a ouvert prématurément.
Dans l’hypothèse où il constaterait que ces conditions ne sont pas remplies, je demande au représentant de l’Etat de donner la priorité au pôle petite enfance en signant la déclaration d’utilité publique comme celui-ci s’y était engagé.
Réponse de M. Adolphe Corlat , Préfet des Alpes-Marritimes qu’appelle le communiqué de M. Christian ESTROSI, Premier adjoint au Maire de Nice.
M. ESTROSI se réfère au communiqué de la Préfecture en date du 2 avril 2016.
Il convient cependant de rappeler qu’est intervenu depuis cette date un élément décisif, l’ordonnance rendue le 6 juin 2016 par le juge des référés du Tribunal administratif de Nice, confirmée le 30 juin 2016 par le Conseil d’État.
Saisi par l’association En-nour, le juge administratif, considérant que le Maire de Nice avait porté atteinte à une liberté fondamentale, lui a fait injonction d’autoriser l’ouverture de l’Institut culturel et cultuel au titre des établissements recevant du public, dans un délai de 5 jours et sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Le juge a en effet considéré qu’en refusant de délivrer cette autorisation, le Maire de Nice avait entaché sa décision d’un détournement de procédure.
Par communiqué en date du 1er juillet 2016, M. ESTROSI a notamment déclaré que « le Conseil d’Etat aura donc fait le choix de laisser ouvrir, dans notre pays, un nouveau lieu de culte financé par l’Arabie Saoudite »…. « Nous ne signerons pas l’arrêté d’ouverture du public », a-t-il poursuivi dans ce même communiqué, après avoir pourtant écrit le 6 juin: « Nous n’exécuterons une décision de justice que lorsqu’elle sera devenue définitive ».
Dès lors, conformément à la jurisprudence, le préfet était tenu de se substituer au maire défaillant : les décisions d’un juge des référés sont des décisions de justice exécutoires et obligatoires, a fortiori celles du Conseil d’État. Les autorités administratives ont l’obligation de prendre les mesures qu’elles impliquent (cf l’ordonnance du Conseil d’Etat n° 396003 du 19 janvier 2016 – Association El Fath contre commune de Fréjus). C’est dans ce cadre qu’a été signé l’arrêté préfectoral du 2 juillet 2016.
•M. ESTROSI demande aujourd’hui au préfet de signer la déclaration d’utilité publique relative au projet du pôle petite enfance. Mais le 3 mai dernier, la Ville a attaqué devant le Tribunal administratif de Nice le refus qu’avait selon elle opposé le préfet à cette demande.
La Ville de Nice a donc choisi de demander au juge administratif de trancher cette question de droit.
S’agissant de la propriété des locaux de l’Institut En-nour, le préfet confirme qu’il partage le sentiment du Maire de Nice sur l’opportunité d’une clarification. Il a eu l’occasion à plusieurs reprises de rappeler ce point au Président de l’association culturelle et cultuelle En-nour.
Pour autant, le Préfet ne dispose pas, pas plus que la Ville, des moyens juridiques de contraindre le propriétaire à céder son bien.