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15 septembre 2024

Yannick Alléno : « j’ai vécu une scène d’attentat quand Antoine est parti »


En 2025, le projet artistique éphémère « ALIVE », initié par l’artiste JR et l’Association Antoine Alléno, prendra vie sur le pont de l’Alma à Paris. À travers un collage monumental de 3 000 portraits de proches de victimes de violence routière, l’œuvre offrira un espace de mémoire et de recueillement. Un Tour de France est actuellement en cours pour collecter les photographies des familles endeuillées. Une séance photo s’est tenue à Nice, le 13 septembre, en présence de Yannick Alléno.


Le 8 mai 2022, Antoine Alléno, âgé de 24 ans, perdait la vie suite à un acte de violence routière tragique. Bouleversée, sa famille a décidé de transformer cette douleur en une force d’action en créant, quelques mois plus tard, l’Association Antoine Alléno. Depuis septembre 2022, l’association combat les violences routières. Elle aide les victimes de moins de 25 ans et leurs familles. Vendredi 13 septembre 2024, à Nice, l’association est de passage dans le cadre de l’hommage « Alive » qui aura lieu sur le pont de l’Alma à Paris. De plus, une étape importante sera franchie ce jour-là. La ville de Nice signé une convention de partenariat pour venir en aide aux familles des victimes. Yannick Alléno parle de son engagement et de la mission de l’association lors d’une interview.

Pouvez-vous nous donner l’origine de la création de l’association Antoine Alléno et les raisons qui vous poussent à vous engager ?

L’origine est bien évidemment mortifère. C’est le jour où j’ai perdu mon fils, le 8 mai 2022, suite à un homicide routier. Il a pris une voiture volée dans le dos un soir où il rentrait tranquillement se reposer après le travail un dimanche soir. Bien sûr, c’est un drame incroyable et puis quand j’ai vu enfaite tout ce que ce drame procurer dans ma famille. Je me suis dit “il faut que j’utilise ma notoriété pour que les gens prennent connaissance que lorsque arrive un drame comme cela, il faut absolument venir en aide aux familles des victimes”, ce qu’on appelle les covictimes. Moi, j’ai vécu une scène d’attentat quand Antoine est parti. En bas de la maison, j’ai vu un amas de métaux. Des voitures étaient impliquées dans l’accident. Mon fils était allongé par terre dans son sang. Il y avait des ambulances partout. La scène ressemblait à celle d’un attentat. Quand cela arrive, comme dans un attentat, une chaîne de solidarité se met en place. Une cellule de crise est formée. Elle communique avec les forces de l’ordre et les victimes. Dans ces cas précis, il n’y a rien de fait. C’est un acte qu’on ne prend pas en main. Et donc vous vous retrouvez après cela avec tout le problème psychologique que cela représente, de violence administrative derrière. Je me suis dit “Écoutez, si au moins tout ce que la vie m’a donné peut servir aux autres”, alors avec la famille, on a décidé de garder en mémoire Antoine, c’est important, mais surtout qu’Antoine, et tout ce qu’il représentait. Il est un peu devenu l’enfant de tout le monde lorsqu’il est parti, tout le monde a pris conscience que cela pouvait lui arriver. Donc, on a décidé d’aider les autres.

Quels sont les principaux objectifs de l’association Antoine Alléno ?

Les objectifs sont multiples. Le premier objectif est d’aider les victimes. Les gens ont réalisé qu’ils n’étaient pas seuls. La médiatisation réduit la mort d’un enfant à trois lignes dans la presse régionale. Il est important d’en parler tous les jours pour sensibiliser tout le monde. Chacun doit réaliser que cela peut arriver. Demain, ce pourrait être votre enfant, victime d’un conducteur imprudent. Le but de l’association est de travailler sur la qualification de l’acte par la création d’une infraction autonome. L’homicide routier est une demande des associations. Nous ne sommes pas les premiers à la réclamer. Cependant, moi, Yannick Alléno président de l’association, a accéléré les choses. Mon statut de chef reconnu mondialement a joué un rôle clé. Ensuite, il y a beaucoup de choses à faire. On doit trouver comment réduire les morts sur la route. Il y a une augmentation de 48% sur la Côte d’Azur, donc ce n’est pas près de se tarir. Et je pense qu’ensemble, en parlant de cela, ensemble, on peut, collectivement, trouver des solutions. L’année dernière, il y a eu 700 morts ayant moins de 24 ans.

Comment les personnes concernées par la violence routière peuvent-elles rejoindre ou bénéficier du soutien de l’association ?

Nous avons créé une structure importante avec une assistance sociale. Tout le monde est là pour réguler les personnes professionnellement. Grâce à l’association, on peut donner de l’argent pour un accompagnement psychologique. Mais ce n’est pas tout. Il y a aussi des conseillers et des avocats disponibles pour fournir de bons conseils. En effet, il faut penser au procès après l’acte. Une équipe de bénévoles qualifiés est là pour aider. Éléonore Giscard d’Estaing, avocate spécialiste en victimes corporelles, et Nicole Guedj, avocate engagée dans ce domaine, sont des exemples de ces professionnels. Donc, on a mis autour des covictimes tout un maillage de gens extrêmement qualifiés et approuvés par l’association. Car il faut le dire, il y a là-dedans pas mal de charlatan qui essaie de profiter de la situation pour prendre l’argent des gens. Et ça, c’est insupportable pour moi.

Quelles sont les actions que vous envisagez à l’avenir pour sensibiliser davantage à la violence routière ?

Nous avons déjà entrepris diverses actions. Aujourd’hui, nous travaillons avec l’artiste JR sur une œuvre monumentale pour le pont de l’Alma à Paris. Ce projet impliquera plus de 3 000 portraits. Ce lieu servira au recueillement, mais aussi à sensibiliser sur les 700 disparitions annuelles. Cela met en lumière les dégâts sociétaux. Cela coûte cher à la communauté. Les gens ne peuvent plus travailler après avoir perdu un être cher. Les frères et sœurs restants reçoivent peu d’aide. Les enfants risquent parfois de décrocher de l’école. Cela m’affole, il faut aller voir immédiatement les gens, notamment cette œuvre d’art. Elle est conçue pour cela, et je suis heureux de voir la mobilisation à Nice ; elle est importante. On peut s’inscrire sur le projet impact@lassociationantoinealléno.fr, il n’y a pas de délai d’âge, de temps. Je pense qu’il est important qu’on communie ensemble sur ce moment-là. Donc, on espère pouvoir coller là-dessus d’ici au mois de mai prochain.

Selon vous, quelles sont les mesures les plus urgentes à prendre pour réduire le nombre d’accidents de la route ?

Je crois que la réduction de la vitesse drastique en ville va faire un effet, car l’accidentologie à Lyon est descendue à plus de 30%. Et je pense que si on interroge la maire de Paris, ce sera la même chose. Donc, je pense que dans des zones extrêmement sensibles, il faut absolument réduire la vitesse des véhicules ! Quand on arrive devant une école, il faut absolument que les véhicules soient contraints de rouler à 25 kilomètres heure. Donc l’implantation de radar ou autre, je ne connais pas tout l’arsenal que nous connaissons pour que dans les zones extrêmement sensibles, on puisse drastiquement réduire la vitesse et il y a plein de choses à faire. Il faut être créatif, je crois qu’il faut trouver des chemins inattendus, non contraignants pour l’usager, car la voiture est un moyen de transport. L’éducation est essentielle. Dires aux gamins de banlieue que faire des roues arrière n’est pas amusant. Ça peut tuer. Et ça, je pense que les mesures, c’est aussi à l’ensemble des personnalités publiques, des footballeurs, les pilotes de formule 1 qui représentent quelques choses pour ces jeunes d’arrêter de déconner, arrêter, car vous allez faire des dégâts irréversibles ! Votre vie sera affectée et celle des victimes aussi ! Tout le monde morfle dans ces cas-là.

L’association collabore-t-elle avec d’autres associations ou avec les autorités pour améliorer la prévention et la sécurité routière ?

Bien sûr, tous les ministères sont présents. On a vu le travail incroyable d’Eric Dupond-Moretti pour faire adopter la loi sur l’homicide routier. Pour ma part, j’ai rencontré Madame Macron, qui a perdu sa sœur dans un accident. Peu de personnes le savent, mais elle est très impliquée auprès de nous. Les autorités, bien évidemment, on est très proche de la gendarmerie, des policiers, des pompiers, car ce sont eux les premiers intervenants. Eux aussi ont besoin d’aide, les aidez à faire leur travail convenablement.

Quels sont vos espoirs en ce qui concerne la prévention des violences routière ?

Je pense qu’il faut avoir un objectif 0. Il ne faut pas se contenter de petit bras, il faut un objectif 0. Cela existe, il y a des pays comme l’Angleterre par exemple qui consomme plus d’alcool que nous et il y a moitié moins de morts sur les routes. Il y a une comparaison européenne à regarder et voir comment certains pays s’en sortent mieux que d’autres. La Hollande notamment, donc regardons cela de près et trouvons des solutions qui nous permettront de faire améliorer la situation. Moi, si j’ai un espoir à émettre aujourd’hui, c’est zéro mort sur les routes.

L’engagement de la ville de Nice avec l’association Antoine Alléno répond à l’augmentation préoccupante des violences routières. Elle lutte contre les comportements dangereux. Elle soutient aussi les familles des victimes. Cette initiative symbolise une mobilisation essentielle pour prévenir de nouveaux drames et sensibiliser le public à l’importance d’une conduite responsable. Christian Estrosi affirme que : « le terme « homicide involontaire » est révoltant. Il masque la vraie racine du problème : l’irresponsabilité et l’impunité. » Il a également demandé que le projet de loi d’Eric Pauget soit « remis à l’agenda de l’Assemblée nationale ». Le maire a formulé « sept demandes pour l’installation de radars dans les zones les plus fréquentées de la ville« . Ces demandes ont été envoyées à la préfecture depuis 2022, sans réponse jusqu’à présent. Il a donc annoncé que la ville de Nice financera et installera les radars elle-même. La Préfecture devra les connecter au réseau du ministère de l’Intérieur plus tard. Yannick Alléno a salué cette première convention entre l’association et une commune. Il espère que d’autres maires seront inspirés à faire de même.

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