Militante et dirigeante politique expérimentée, Dominique Boy-Mottard anime avec son mari Patrick le collectif citoyen Gauche Autrement, particulièrement actif dans les quartiers Nord de la ville.
Bien qu’adhérente au PRG, elle a intégrée la liste socialiste et écologiste au Conseil
Municipal.
Nous lui avons demandé de s’exprimer avant la rentrée politique de demain avec le premier Conseil Municipal d’après vacances.
Nice Premium: Quels sont les thèmes principaux pour cet automne ?
Dominique Boy-Mottard Au-delà des problématiques générales qui sont des priorités pour notre ville , cette période de l’année pousse à s’intéresser à la rentrée scolaire, surtout, comme ça a été le cas, quand elle connaît des cafouillages. Après les débats – qui auraient dû se clore plus tôt – sur la question des rythmes scolaires, il est plus que temps de se préoccuper du contenu des activités proposées. De ce point de vue, les défaillances ont été graves, pénalisant enfants, parents et enseignants, et doivent encore être surmontées.
En matière d’aménagement, il est certain que l’avenir des terrains du stade du Ray reste encore marqué d’un grand point d’interrogation : le moins qu’on puisse dire est que le maire reste très évasif sur cette question.
Enfin, plus globalement, je souhaite que cette rentrée marque le début d’un rééquilibrage des moyens de la municipalité en matière de sécurité et de propreté entre l’hyper centre et le reste de la ville et j’ai bien l’intention d’œuvrer en ce sens.
NP: Après les élections municipales de mars dernier, le contexte politique national a beaucoup changé. Pensez-vous qu’il aura une influence sur la vie politique locale ?
DBM: Le contexte politique national a toujours, au moins pour partie, une influence sur la vie politique locale. Tout simplement parce que la situation économique et sociale affecte toutes les régions de notre pays et que les réponses politiques qui sont apportées touchent l’ensemble du territoire national.
Pour autant, les choix politiques que l’on peut faire localement gardent leur spécificité de par la proximité qu’ils supposent. C’est pourquoi on peut se retrouver entre gens de bonne volonté, au-delà des clivages partisans, dans l’intérêt des habitants de notre ville. Et je dois dire que climat particulièrement lourd de cette rentrée doit nous conduire à avoir un esprit de responsabilité encore plus affirmé qu’à l’ordinaire.
NP: Ce dimanche il y aura l’élection pour le renouvellement de la représentation sénatoriale des A-M. Vous-même, vous êtes candidate sur la liste conduite par Marc Daunis. Quel est votre prévision ? La gauche républicaine réussira-t-elle à garder son seul représentant national ?
DBM: Je ne me hasarderai pas à faire des pronostics. On pourrait penser que cela est assez simple car le corps électoral est limité : seuls les grands électeurs votent, c’est-à-dire les élus (ainsi que les délégués supplémentaires désignés dans les conseillers municipaux des villes les plus importantes du département) et le scrutin est à la proportionnelle.
Mais en fait, il y a plus d’incertitudes qu’on ne l’imagine. Dans les petites communes, il y a beaucoup d’élus sans étiquette dont on ne sait trop de quel côté ils vont pencher. Jouent également aussi les relations personnelles, bonnes ou mauvaises, que les candidats entretiennent avec les autres élus électeurs : dans le secret de l’isoloir, tout est possible… Sinon, Marc Daunis n’aurait jamais pu être élu lors du précédent scrutin ! Je ne peux que souhaiter qu’il en ira de même cette fois, même si, sur le papier, la situation est encore plus délicate pour nos couleurs. Car à défaut, la gauche n’aurait plus aucun parlementaire pour la représenter sur les 14 que compte notre département (9 députés et 5 sénateurs) et cela serait une très mauvaise nouvelle pour la démocratie.
NP: Comment jugez-vous l’activité du Maire de Nice ? Quelles sont les erreurs et ensuffisances que vous lui reprochez le plus ? Et quelles sont vos propositions que vous jugez prioritaires ?
DBM:Le maire de Nice est quelqu’un d’intelligent et qui a de grandes capacités de travail. Je pense que son principal défaut, en tant que maire, est de ne pas avoir une vraie vision pour notre ville. Il fait beaucoup de choses (peut-être moins que ce que l’on imagine car, en fait, il communique beaucoup), mais j’ai du mal à trouver une cohérence dans tout ce qu’il lance (qui reste d’ailleurs parfois à l’état de simple annonce non suivie d’effets).
Je reconnais qu’il a quelques belles réalisations à son actif mais qui se trouvent être concentrées pour l’essentiel dans le centre ville. Par ailleurs, il a une politique résolument tournée vers l’événementiel. Tout cela peut se comprendre car Nice est une ville touristique, mais tous les quartiers et tous les habitants de la ville n’en bénéficient pas à l’identique et certains se sentent parfois un peu oubliés. Pourtant, je crois qu’il sait écouter (il lui arrive de reprendre des propositions y compris quand elles viennent de l’opposition), mais il a parfois des postures qui donnent de lui une image sectaire. Je le regrette car je ne suis pas certaine qu’elle corresponde toujours à la réalité.
La crise que traverse, comme bien d’autres, notre pays fragilise encore davantage les populations les moins favorisées. Contrairement à ce que l’on pense quand on imagine la Côte d’Azur, il y a une grande partie de la population niçoise qui a des revenus extrêmement faibles, ce qui est d’autant plus choquant qu’une minorité des habitants dispose de très importantes ressources. En période de crise, les collectivités publiques ont des moyens plus faibles qu’à l’ordinaire ce qui doit les conduire à faire des choix : il est manifeste qu’à Nice, on n’a pas toujours fait le choix de la solidarité… Les réalisations, aussi belles soient-elles, ne doivent pas être jugées dans l’absolu : on peut trouver que c’est une bonne idée de faire passer la ligne 2 du tram en souterrain, mais, comme cela coûte très cher aux finances de la ville (alimentées, ne l’oublions pas, par nos impôts), on doit se demander ce qu’on aurait pu faire à la place avec cet énorme investissement et si, finalement, ça n’aurait pas été mieux pour nos concitoyens.
La priorité des priorités est vraisemblablement le logement. Ce n’est pas simple dans une ville qui ne dispose pas d’un foncier illimité et où les prix sont très élevés. Mais le défi doit être relevé pour toutes les catégories de la population : jeunes ou vieux, actifs ou non. Des efforts sont faits, je ne le nie pas, mais ils sont encore bien insuffisants.
D’autre part, j’aimerais que notre ville ait une politique plus ambitieuse tournée vers le développement de son Université. Nice n’est pas vraiment une ville universitaire même si elle peut être fière de la renommée de certaines filières. Faire rayonner l’Université, c’est se tourner résolument vers l’avenir et se préoccuper de la jeunesse.
NP:Vous faites partie d’une opposition municipale fractionnée en quatre groupes. Pensez-vous qu’une coordination entre ces groupes, au delà des clivages politiques, pourrait rendre plus efficace leur action ?
DBM: Ce n’est pas parce qu’il y a plusieurs groupes dans l’opposition que ceux-ci doivent travailler ensemble. La coordination n’est pas une fin en soi et il y a des groupes avec lesquels j’ai vraiment du mal à imaginer qu’il puisse y avoir des actions communes tant nos valeurs sont en contradiction. Les miennes (les nôtres) sont imprégnées de solidarité et de tolérance quand les leurs ne tendent qu’à l’exclusion et à l’opposition entre les communautés. Je pense, vous l’aurez compris, à l’extrême droite. Par contre, je ne vois pas au nom de quel sectarisme il ne serait pas possible de travailler ponctuellement avec des élus qui ont fait d’autres choix que les nôtres tout en s’inscrivant dans une démarche démocratique. Et cela vaut tout autant pour certains élus d’opposition que pour les élus de la majorité. Etre dans l’opposition nécessite d’être vigilant mais, quand on a le privilège d’avoir reçu un mandat des électrices et des électeurs, on doit agir dans le sens qui nous paraît le plus conforme à leurs besoins. Et cela vaut pour la majorité comme pour l’opposition : le travail en commun ne m’a jamais fait peur et si de la confrontation des idées peut jaillir la lumière, tout le monde pourra y gagner.