On verra tout d’abord un étonnant contraste entre ces vieux bidons, dont certains portent les logos des compagnies pétrolières italiennes et leur intérieur. Ils sont en effet éventrés, ouverts et offrent leurs entrailles au regard du public. On songera à la parabole biblique où Jésus fustige le contenant et donne la priorité au contenu.
Un de ces bidons évoque un film italien : La chambre du fils. Le décor est en rouge, couleur du sang, du cœur, de l’amour. Le fils est mort, mais ce rouge écarlate est, à travers la tragédie de la disparition d’un enfant, un espoir, le rouge c’est la vie !
Chaque bidon a ainsi son histoire, ils sont tous l’émanation des émotions de cette artiste, chacun étant l’évocation d’un film, une nouvelle découverte. Une image est fixe au fond de ce bidon, un visage, un regard et tout est dit.
Cette exposition sur le cinéma ou plutôt sur le ressenti de Paola Risoli. D’une certaine façon, elle revisite les films, leur donne une autre dimension à l’intérieur de ses bidons. Vous devenez acteur du film, le pénétrez et le vivez. Des photographies accompagnent les bidons, des images, des textes, une exposition du cinéma, du rêve et de l’émotion. Habituellement une sculpture explose vers l’extérieur et irradie de ses lignes l’espace. Ici, c’est tout le contraire, la sculpture s’intériorise, se fait discrète.
On dira : ce n’est qu’un vieux bidon rouillé et le badaud peu curieux ne se penchera pas pour regarder à l’intérieur. Il aura tout manqué, tout raté. Paola finalement se mérite. Il faut accepter de se pencher, d’oublier ses fausses certitudes. On est alors comme le promeneur qui découvre un beau paysage, on a envie de partager et en même temps de garder pour soi cette découverte. Les bidons, la coupe ignorée et délaissée, abandonnée est pourtant le Graal. L’habit ne fait pas le moine et Paola nous le démontre.
Ces vieux bidons : d’essence, d’huile ou de pétrole, symboles de la société matérialiste, futs rouillés rejetés et ignorés, sont, grâce à Paola, réhabilités et deviennent l’écrin des émotions d’une artiste et les souvenirs de films. Une exposition du cinéma, nous avions les tambours du Bronx où là aussi on donnait une âme à ces futs, nous avons maintenant les bidons du cinéma, chut écoutez tourner la pellicule, battre votre cœur.
La chambre du fils est l’âme de cette exposition que l’on peut voir jusqu’au 18 janvier 2015. Merci Paola pour nous avoir offert ce magnifique cadeau.
Thierry Jan