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27 janvier 2025

Cédric Klapich aux commandes de la Flûte enchantée de Mozart à l’Opéra de Nice 

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Cédric Klapisch met en scène La Flûte enchantée de Mozart à l’Opéra de Nice, sa première expérience dans l’univers lyrique. Entre modernité et poésie, il revisite l’œuvre avec humour, des dialogues actuels et des décors enchanteurs, célébrant l’harmonie entre Nature et Civilisation.

On avait quitté Klapich sur le film En corps en 2022, l’histoire émouvante d’une danseuse fauchée en pleine carrière par un accident qui l’handicape et qui tente de se reconstruire. On le retrouve avec joie dans sa première mise en scène d’un Opéra, le plus populaire de Mozart, écrit peu avant sa mort que le Théâtre du Chatelet lui a commandé. La gageure pour le réalisateur de L’auberge espagnole, d’Un air de famille ou de Deux moi était de sortir du Réalisme de ses films pour se plonger dans une fable poétique sur un espace symbolique qu’est une scène de Théâtre.

Tout est parti d’une collaboration avec Laura Bachman, danseuse et chorégraphe, proche de Marion Barbeau, héroïne du film En corps, qui a aidé le metteur en scène à dessiner de manière chorégraphique les déplacements et les positionnements des solistes. Ensuite s’opérait la magie de la direction des chanteurs, la complicité, le jeu pour Klapich comme s’il s’agissait d’acteurs.

D’autant que la part laissée aux récitatifs est grande dans cette oeuvre, ces textes de liaison qui accompagnent le récit théâtral et pour lesquels la musique de Mozart se met au service, spécificité de La Flûte, un singspiel avec des textes de liaison, la version allemande de l’Opéra comique français. La musique elle même se doit de continuer à mettre en scène l’œuvre comme le souligne le chef d’orchestre Jean Christophe Spinosi qui l’a dirigée de nombreuses fois. D’où faire en sorte que les instruments n’aillent pas dans les vibratos ou que les airs fameux de la Reine de la Nuit ne soient pas poussés à l’extrême, ce qui peut-être enlève un peu de solennité au personnage interprété magnifiquement néanmoins par la soprano Tetiana Zhuravel.

Justement, en traduisant et adaptant ces textes parlés, Cédric Klapich et son équipe ont rendu plus proches de nous l’action non sans humour et sens du dialogue. Ainsi, par exemple Papageno à qui on demande d’être un homme répond « Voilà une injonction tellement genrée ! » Papagena après le premier baiser à Papageno interroge ce dernier : « t’as kiffé ? » et tombe encore plus amoureuse que son partenaire se soucie de son « consentement. »

Des décors aux couleurs enchantées

Ces contrastes dans la musique à la fois virevoltante et tragique permettent cela. La fantaisie et les idées philosophiques du siècle des Lumières s’entremêlent agréablement. Les décors signés Clémence Bezat, quant à eux, racontent, sans verser dans le trop contemporain ni dans le trop classique, cette confrontation entre la Reine de la Nuit qui symbolise la Nature avec la forêt vierge chaotique aux arbres bleus torsadés et la Civilisation de Zarastro interprété par la basse Antonio di Matteo qui demeure un peu trop statique, symbolisant un monde fermé dans ses rideaux, ses filets, ses grillages, une sorte de maillage, celui d’un data center aux nœuds de connectivité omniprésents. Klapich a évité ainsi la symbolique de la Franc-maçonnerie.

Rappelons que le livret de la Flûte est d’Emmanuel Schikaneder, franc maçon, ami de Mozart. Le symbolisme des couleurs nous frappe aussi : la moitié haute du visage en rouge pour la Reine de la Nuit, ses trois dames et sa fille Pamina, belle interprétation de la soprano Sydney Mancasola, rouge qui fait écho à la tenue qui l’est entièrement pour Tamino, interprété brillamment par le ténor Joël Prieto, lequel se plie à l’initiation de Sarastro, seule condition pour retrouver Pamina. Serait-ce comme un air de famille, un lien d’alliance ?

Les costumes dignes de Haute Couture sont étonnants (la traîne étincelante de la Reine notamment). Stéphane Rolland et Pierre Martinez jouent avec les couleurs et les matières qui font vibrer les lumières d’Alexis Kavyrchine, collaborateur de Klapich au cinéma. Le vert truculent l’oiseleur Papageno, le très bon baryton Joan-Martin Royo proche de la Nature, fait contraste.

Au final, l’affrontement s’efface et fait triompher l’amour du jeune couple. Une harmonie est donc possible entre les deux mondes comme on le voit dans le tableau final avec en toile de fond une ville moderne avec plein d’arbres. Faut-il compter sur le rôle fédérateur de l’Opéra pour y parvenir comme le pense Mozart ?

Représentations jusqu’au 30 janvier.

R. Haugades.

Auteur/autrice

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