Dans le cadre d’un colloque universitaire sur l’utilisation du téléphone portable comme alternative de production audiovisuelle, Joseph Morder a présenté son film J’aimerais partager le printemps avec quelqu’un à la Cinémathèque de Nice.
« Le matériel était imparfait, mais c’est ça qui m’intéressait, je voulais jouer avec ça », révèle Joseph Morder. En 2007, le réalisateur est déjà considéré comme l’un des cinéastes les plus prolifiques du cinéma. C’est alors qu’il reçoit une commande inédite pour le Festival Pocket Films. Il a carte blanche pour réaliser un film sans limite de thème ou de durée. Sa seule contrainte : utiliser uniquement la caméra d’un téléphone portable. L’objet en question est un Nokia à la qualité visuelle et sonore à des années-lumière de nos smartphones actuels, un véritable témoin de son époque.
Alors, dans la lignée du travail qu’il réalise depuis qu’il a 18 ans, il décide de réaliser un journal filmé. Un format qu’il a longtemps tourné en Super 8. Avant-gardiste, il se dit qu’il est possible que le téléphone portable convienne au genre du journal intime filmé. En ce sens, de février à mai 2007, il découvre et s’approprie cette caméra miniature qui lui est prêtée, avec une certaine innocence et ouverture. Avec, il immortalise trois mois de son existence à travers une série d’événements personnels et publics. Il intitule son documentaire J’aimerais partager le printemps avec quelqu’un.
Beaucoup de silence et de pixels
Joseph Morder devient alors un des premiers à réaliser un long-métrage sorti en salles avec ce petit outil d’enregistrement à une époque où faire du cinéma avec un téléphone portable était encore expérimental. « Je partais dans un territoire absolument vierge ! », contextualise-t-il. Au visionnage, le spectateur se doute de rien tant il est plongé dans l’intime, alors qu’en réalité il s’agit d’un faux documentaire, une mise en scène. « Pour moi, le cinéma, c’est se faire avoir », partage-t-il, expliquant l’idée derrière ce faux journal qui a l’air d’un vrai.
« Il y a quelque chose dans ce film qui me rend jeune parce que je retrouvais l’excitation et les enthousiasmes de mes débuts« , confie-t-il devant l’assemblée de la Cinémathèque de Nice. C’est un nouveau langage cinématographique qu’il propose là, un langage avec beaucoup de silence et encore plus de pixels. Il est conscient qu’il réalise une première fois et se doute que ça ne va pas durer. Il ne sait absolument pas se servir de ce téléphone et c’est justement ce qui l’anime. Tout était à découvrir. » Pour moi, c’était un peu comme l’époque où on est passé du cinéma muet au cinéma parlant« , conclut-il.