Vingt pays parcourus. Neuf cents photos et dessins de visages, des sourires enfantins qui nous disent -sans un mot- l’espoir d’un monde dans lequel ils et elles vivent. Et qui ne cessent de nous interroger, nous adultes, sur celui de demain que nous leur préparons.
Alors que l’humanité célèbre, le 20 novembre 2009, le 20ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant ratifiée par 191 pays, le photographe Gilles Porte et les Editions du Seuil offrent au public un ouvrage particulièrement émouvant, sous la forme de ce que l’auteur appelle un diptyque : sur une page, la photo d’un de ces enfants du monde, de l’autre, le dessin au crayon qu’il exécute. D’un côté, la couleur, de l’autre, du noir et du blanc aussi pur l’un que l’autre. Rires, étonnement, tristesse, malice ou désarroi, ces « portraits » tour à tour nous amusent, nous désarçonnent ou nous inquiètent. Comme en réponse, les « autoportraits » dessinés par les enfants montrent ce qu’ils ne peuvent ou ne veulent dire. Il suffit pourtant d’un simple coup d’œil pour que nous les comprenions. Sans effort. Comme savent le faire si facilement les tout-petits.
Ancien assistant à la réalisation caméra pour les plus grands metteurs en scène, c’est en « aidant sa fille à se rhabiller dans les couloirs de son école maternelle » que Gilles Porte « constate que chaque portemanteau est identifié par un bonhomme différent ». Point de départ d’une réflexion dont l’auteur nous rend complice dans une introduction convaincante, véritable clef d’accès aux multiples et latentes significations de ces regards et de ces attitudes. Parfois, il ajoute quelques lignes pour conter l’aventure : comment le petit garçon ou la petite fille en est venue à dessiner, utilisant -peut-être sans le savoir- le « Squiggle » de D. W. Winnicott, un jeu où c’est le thérapeute qui réalise le premier trait et invite l’enfant à lui succéder pour compléter son dessin.
On ne résistera pas à citer, parmi tant d’autres, l’exemple de la petite Zaratou du Niger, 5 ans, emmitouflée dans un foulard plus grand qu’elle et qui ne laisse finalement apparaître sur son dessin que sa tête, seule partie d’elle-même visible à l’œil du photographe. On mentionnera aussi la petite israélienne de 4 ans qui retraduit dans son dessin combien l’adulte est perçu comme grand et éloigné. Ou encore, celui du petit malien de 6 ans dont le corps handicapé rejaillit sur celui, complètement morcelé, de l’esquisse.
Une exposition se tiendra Place du Palais Royal à Paris du 20 novembre 2009 au 10 décembre 2010 et, simultanément, dans 20 villes de France.
Gilles Porte, « Syrine, Ibrahim, Malo et tous les autres… Portraits, autoportraits », Editions du Seuil, 2009.