Grâce à la correspondance entre Marcel Pagnol, jeune auteur dramatique et Jules Muraire dit Raimu , vedette montante dans l’humour français au Théâtre en 1929 , on va revivre ,dans cette pièce toute une période méconnue du monde du Cinéma, les débuts du parlant et du Théâtre de l’entre deux guerres et jusqu’en 45.
C’est en 2007 que Jean-Claude Carrière et Michel Galabru donnent une première vie à ces lettres rares , quelques unes inédites, au Festival de la Correspondance de Grignan . Philippe Caubère et Galabru lui-même incarneront à merveille les deux compères sur scène ensuite .
Si l’on connaît plus facilement le caractère bien trempé d’un Raimu , la parole de Pagnol, elle , est plus rare , préférant , c’est ce qu’il a dit : « faire parler les autres ». On le verra, au cours de cette représentation, passés les premiers moments de séduction , ils vont s’affronter affectueusement .
Seize ans durant , Raimu remet tout en cause : le cachet , les dates de spectacle , la distribution . Pagnol ,lui , qui a rencontré le méridional pour lui proposer le rôle de Panisse , rôle principal de sa trilogie « Marius , Fanny, César », tempère , joue la montre quand l’autre se voit en César , Jules … César ! Pagnol modifiera le rôle pour Jules.
A travers leur passion commune pour l’Art dramatique ,ils s’admirent réciproquement , s’estiment . L’humour qui les unit pour mieux saisir leur pudeur , leur affection indicible n’empêche pas des colères magnifiques teintées de mauvaise foi ! Leurs disputes sont le moteur stimulant de leur complicité et contribuent à leur créativité .
Le concepteur de la pièce , Tre-Hardy, un maître de la correspondance au Théâtre, a choisi des textes authentiques, lettres et conversations pour donner à voir aux spectateurs l’amitié drôle et tendre qui liait les deux hommes .C’est assis à un petit bureau , chacun de chaque côté de la scène qu’ils se donnent la réplique .
C’est ce qu’a voulu Nicolas Pagnol dans cette version interprétée par Fréd Achard , un Raimu plus vrai que nature lui aussi ,cabot , truculent , adorablement insupportable et Christian Guérin , intelligent ,fin,plus dans la retenue en Pagnol qui aime son partenaire sincèrement .
Entre eux , le narrateur s’imposait tel Jean-Pierre Darras dans « la Gloire de mon père » et « le Château de ma mère » au Cinéma ou Pagnol lui-même dans la trilogie . C’est Gilles Azzopardi qui en a la responsabilité . Il remet en perspective les correspondances dans leurs multiples contextes .
Venez rire, sourire et laissez les vous émouvoir !
Roland Haugade