Aux ateliers de la Diacosmie de l’Opéra de Nice, la 1ère oeuvre de la saison était celle de François Adrien Boieldieu, » la Dame Blanche » ressortie du XIXè siècle et qui inspira Rossini, Wagner ou Bizet .
Initialement prévue à l Opéra et diffusé en streaming pour raison de Covid il y a un an c’est sur une scène sans fosse pour les musiciens que la cheffe d Orchestre, Alexandra Cravero dirige, tournant le dos aux chanteurs et aux chœurs eux mêmes de chaque côté du plateau, mais ayant un retour caméra. S ‘y joue le sort du château des Comtes d’Avenel en Ecosse. Une histoire pleine de péripéties tirée de deux romans de Walter Scott « Le Monastère » et « Guy Mannering » sur un livret d Eugène Scribe. Point de décor dans ce dispositif minimaliste mais qui offre une proximité intéressante avec le public et entre les acteurs/actrices eux-mêmes : chœurs, chanteurs et Orchestre.
Les scènes sont entrecoupées de texte comme au Théâtre et non de récitatifs comme chez Mozart. L’attention du public est davantage captée. C est d ‘ailleurs une maîtresse en scène de Théâtre, Pauline Bureau qui a collaboré à la mise en espace signée Valérie Nègre. Les personnages dont on explore la psychologie au cours des 3 actes, sont fantasques, surprenants .
C’ est le cas de la Mezzo soprano, Sophie Marin Degor qui campe Jenny s’occupant de son petit avec beaucoup de naturel auprès de son mari le fermier pusillanime qui craint de tomber sur la Dame Blanche, fantôme de la jeune fille qu’ont élevé le Comte et la Comtesse, statue à retrouver dans le Château ou véritable amoureuse du soldat George Brown qu’elle se souvient d avoir soigné autrefois et qui n’est autre que le fameux Julien, le fils mystérieusement disparu et qui va briguer l’héritage .
Incarné par le ténor rossinien Patrick Kabongo à l’allant engageant, ce héros positif s’il en est, conjugue l’Art Romantique et fantastique de cet Opéra avec la délicatesse de la musique française de cette époque. On sent poindre aussi le bel canto notamment dans des passages aux tonalités très hautes qu’imposent la partition.
Le rôle de l’opposant Gavestone est tenu comme souvent par un baryton. Ici, Laurent Kubla assez charismatique en ancien serviteur du Comte qui voudrait s’approprier le domaine.
Enfin le rôle titre d’ Anna est tenu par la grande Amélie Robins soprano colorature dont la fraîcheur de la voix nous plonge entre l’onirisme et le réel. Fantaisie, rires, clins d’œil parfois à d’autres œuvres rappellent le caractère comique de cet Opéra très joué à sa sortie en 1825 et abandonné depuis. La cheffe d’Orchestre accompagne par moments le début de certains airs en chantonnant.
C’est une chance qu’il ait été revisité en ces lieux peuplés d’autres fantômes, les costumes et objets scéniques d’œuvres des saisons passées que l’on peut admirer pour se rendre jusqu’à la salle Jedrinsky, sur l’initiative du Directeur de l’Opéra, Bertrand Rossi.
Innovante que cette deuxième scène dans les ateliers de la Diacosmie et ce format semi scénique pour cette co-production Opéra Comique, Opéra Nice Côte d’Azur, Opéra de Limoges mais conséquence de l’utilisation provisoire de l’Opéra à des fins de pièces de Théâtre suite à la triste et fort discutable démolition prochaine du Centre dramatique national TNN .
Roland Haugade