Le Théâtre des Muses proposait une version modernisée de la célèbre pièce de Molière . La silhouette d’un Président de la République patelin , bien assis dans sa fonction, dressée sur la scène, donne le ton .
Nous avons loisir d’imaginer Alceste , autrefois au service de son mentor tel un secrétaire général de l’Elysée et qui , las de ces jeux de pouvoir pour complaire aux puissants ,le fait savoir et notamment à celle qui le fait souffrir et qu’il aime , Célimène, jeune veuve de ce Président , intrigante, manipulatrice .
Nous sommes dans l’ambiance des cabinets ministériels et sans pourfendre tel ou tel nom en particulier c’est ne pas trahir l’oeuvre que de s’appuyer complètement sur les vers de l’auteur pour dénoncer flatteries, injustices , trahisons, fourberies , choses qu’ a connues Molière qui présenta sa pièce en 1666 devant une Cour qui lui réserva un accueil très froid et pour cause : la critique a déplu comme le rappelle la metteure en scène ,Claire Guyot .
C’est un honnête homme qu’ Alceste, franc , qui dit ce qu’il pense . Cet affrontement entre idéal et raison, intransigeance et compromission lui vaudra des explications avec son fidèle ou vrai faux ami, Philinte, lequel constate les gesticulations des conseillers et experts de toutes sortes, en costumes cravates et se range à leurs règles .
Et de savourer les arguments déployés avec justesse , véhémence parfois mais rien de la langue de Molière ne suppose le tiède et l’insipide .Les objets transitionnels d’aujourd’hui , whisky, portables, ascenseur, sacs de sport qu’offrent la mise en scène n’ôtent rien de ce désir d’intégrité, de vérité et de force que manifeste Alceste.
Le contraste entre l’atrabilaire amant interprété magistralement par Pierre Margot et sa belle , incarnée par Aurélie Noblesse, légère, amusante , est surprenant . Cette transposition réussie de cette tragi-comédie avec une scénographie digne du cinéma et des lumières de qualité ,nous montre que les travers d’ une Société de courtisans et d’hypocrites propres à graviter dans un milieu politique teinté de corruption et de faux semblants pour acquérir de l’influence, sont permanents d’une époque à l’autre .
Roland Haugade