Dernière ligne droite avant la conclusion de samedi avec des films comme s’il en pleuvait (un américain, un ukrainien, un allemand et le dernier français, celui d’Ozon) et le sentiment que malgré une sélection honorable ce 70e Festival ne sera pas un grand cru.
Good time, Josh et Benny Sadie (USA)
Deux frères dont l’un est simple d’esprit font un hold up qui tourne mal. Nick l’attardé se fait arréter et Connie cherche à le faire évader. Dans les bas fonds de New York commence une nuit pleine de rebondissements.
Un peu dans l’esprit de l’After Hours de Scorsese, le héros (Robert Pattinson) accumule les bévues et ne se révèle pas beaucoup plus opérationnel que son frère idiot. Assez rythmé, le film est parfois drôle mais reste dans le format d’un film de genre un peu banal à voir au cinéma de la plage pendant les vacances.
Une femme douce (Krotkaya), Sergei Loznitsa (Ukraine)
Une femme reçoit le colis qu’elle a envoyé quelque temps plus tôt à son mari prisonnier. Inquiète, elle décide de se rendre à la prison dans une région très reculée de Russie afin d’obtenir des informations. Sur place, commence un long chemin de croix où elle sera bousculée, humiliée et menacée.
Krotkaya est la version hard du film Nelyubov présenté le premier jour du festival. Dans les deux cas, il s’agit de faire la radiographie de la Russie souffrant plus que jamais des miasmes du communisme tout en se vautrant dans un nationalisme des plus obtus. Le film de Loznitsa commence comme un long documentaire en camera cachée sur la bureaucratie post stalinienne toujours en place aux marches de l’Empire où se trouve cette prison. « La femme douce » en sera le témoin avant d’en être la victime. Puis le film bascule dans l’onirisme au cours d’une longue scène assez hallucinante (entre Fellini et David Lynch quant à la forme) où on comprend la complexité et l’enracinement de ce nationalisme russe qui justifie toutes les dérives autoritaires qui font des victimes leurs propres bourreaux, des vrais enfants de Poutine.
La Russie contemporaine ne peut sortir immaculée de ce festival : il faut qu’un (les deux ?) film russe soit distingué.
Aus dem nichts (In the fade), Fatih Aken (Allemagne)
Katia, Allemande de souche, épouse un Allemand d’origine kurde alors que celui-ci est encore en prison pour trafic de drogue. Quelques années plus tard, le couple vit une existence paisible entre activité commerciale et vie de famille. Mais son mari et son jeune garçon vont être victimes d’un attentat perpétré par l’extrême droite. Après le deuil et l’injustice, vient le temps de la vengeance.
Cinéaste d’origine germano-turque, Fatih Akin dépasse la simple dénonciation des crimes racistes en Allemagne pour nous offrir un film plein de péripéties avec une héroïne (Diane Kruger convaincante) qui, après avoir hésité entre confiance en la justice et vendetta personnelle, va opter pour une troisième voie qui surprend le spectateur.
Une petite remarque toutefois : le terrorisme d’extrême droite bien réel n’est peut être pas le plus dangereux actuellement pour nos démocraties. Aussi on peut s’étonner que le festival, qui s’honore régulièrement d’être le miroir du monde, n’ait présenté aucun film traitant du terrorisme islamique. Autocensure politiquement correcte ?
L’amant double, François Ozon (France)
Chloé, une jeune femme fragile, tombe amoureuse de son psychothérapeute, Paul. Quelques mois plus tard, ils s’installent ensemble, mais elle découvre que son amant lui a caché une partie de son identité.
François Ozon signe un film tout à fait inattendu avec des ruptures de ton étonnantes et un final surprenant (n’en parlez pas à ceux qui n’ont pas vu le film, évitez les bandes annonces). L’occasion de retrouver Jacqueline Bisset face aux magnifiques premiers rôles, Marina Vaech et Jeremy Renier.
par Patrick Mottard