C’est sous l’affiche géante de la silhouette juvénile (et controversée) de Claudia Cardinale que le bunker a ouvert ses portes au 70e Festival de Cannes.
Au programme des deux premières journées, le film d’ouverture (HC) proposé pour assurer une belle première montée des marches, et deux films, un russe et un américain, qui nous racontent tous les deux l’histoire de petits fugueurs.
Les fantômes d’Ismaël, Arnaud Desplechin (France)
A la veille du tournage de son nouveau film, la vie d’un cinéaste est chamboulée par la réapparition d’un amour disparu il y a vingt ans.
L’exemple même d’un certain cinéma français un peu intello, un peu mode, un peu chichiteux et terriblement bavard. On n’est pas vraiment captivé par le dilemme amoureux d’Ismaël (Mathieu Amalric qui fait du Amalric) qui doit choisir entre l’hystérique Carlotta (Marion Cotillard qui fait du Cotillard) et la sage Sylvia (Charlotte Gainsbourg qui domine la distribution avec retenue et classe). Une partie de la critique a adoré. Why not ? Mais ce sera sans moi.
Nelyubov (Faute d’amour), Andrey Zvyagintsev ( Russie)
Boris et Genia, un couple maudit, sont en train de divorcer. Aucun des deux ne veut prendre la responsabilité d’Aliocha leur fils de 12 ans. Désespéré celui-ci fugue et disparaît.
Zvyagintsev a apparemment bravé la censure pour nous faire plonger au coeur de l’univers impitoyable et glauque de la Russie post soviétique. Une contrée où les mensonges de la propagande pro-Poutine servent d’excitant à une vie sociale d’une brutalité inouïe. On a coutume de dire que chaque être humain a sa part d’ombre et de lumière : chez Poutine, Nelyubov nous explique qu’on a coupé la lumière.
Wonderstruck, Todd Haynes (USA)
A cinquante ans d’intervalle (1927, 1977), deux enfants, Rose et Ben, atteints de surdités font une fugue pour retrouver, l’une une mère, l’autre un père, et entreprennent pour cela, à travers le temps, une quête à la symétrie fascinante en errant dans les quartiers de New York.
Le film est un peu long à démarrer mais petit à petit les deux histoires se rejoignent dans un télescopage émouvant. La double reconstitution de New York (on reconnait la magie des ambiances d’époque que sait si bien distiller le réalisateur de Carol) enchantera ceux qui comme moi sont amoureux de Big Apple.
par Patrick Mottard