15 matches, 15 finales… C’est le leitmotiv que Franck Giudicelli, nouveau co-président de l’OGC Nice chargé de l’aspect sportif, se plaît à rappeler. Sous sa présidence, les aiglons ont respecté son adage en ramenant un nul à Lyon et en gagnant samedi dernier contre Bordeaux au Ray. Dans quelques jours, Troyes rendra visite au Gym. Pour cette rencontre, Franck Giudicelli espère un stade plein, un soutien des supporters encore plus fort. Il parle d’osmose, d’esprit fédérateur. Celui qui s’est jeté sur Maurice Cohen au coup de sifflet final contre Bordeaux avant que Cédric Varrault ne saute dans ses bras. C’est le Gym que l’on aime. C’est le Gym de Franck Giudicelli et de Maurice Cohen. Avant qu’il ne rejoigne Frédéric Antonetti sur le terrain d’entraînement, le plus jeune président de Ligue1 nous a ouvert sa porte, qu’il ne laisse jamais fermée, pour répondre aux questions de Nice-Premium.
Nice-Premium : Match nul à Lyon, victoire contre Bordeaux, la chance a tourné et le chat noir du ray a été remplacé par le porte-bonheur Giudicelli. Quelle est votre part de responsabilité dans ces résultats ?
Franck Giudicelli : Pas grand-chose. On a eu plus de chance qu’à l’accoutumée. Il ne faut pas se leurrer. On n’a jamais été trop en danger dans le jeu malgré le classement. On n’a jamais fait de matches catastrophiques, jamais perdu pied. On ne s’est jamais noyé dans un match. Aujourd’hui, on a un peu plus de réussite mais il faut la provoquer. Peut-être est-ce un signe ? On ne sait pas.
NP : Que faire pour que cette réussite dure ?
FG : Il faut la provoquer. Pour que ça dure, il faut un état d’esprit. On dirait que les joueurs ont pris conscience de la situation, même si avant ils en avaient sûrement pris conscience aussi. Ils se sont plus imprégnés de cet esprit «maintien». On va prendre match après match. On verra bien.
NP : Il faut provoquer la réussite à l’image d’Ederson samedi contre Bordeaux, oser partir du milieu du terrain, faire cinquante mètres et loger le ballon dans la lucarne ?
FG : Ederson c’est du talent à l’état pur. On a d’autres talents. Il y a eu aussi de la réussite.
NP : Vous êtes le plus jeune président de L1. Est-ce difficile d’assumer ce poste à cet âge et qu’est-ce qui est le plus compliqué ?
FG : Il n’y a pas de complications majeures. La seule chose qui m’embête c’est le classement. Dans mes fonctions proprement dites, il n’y a aucune complication. Vous savez, moi je raisonne football, je pense football. Après la passion l’emporte sur les réels problèmes que peuvent connaître un président ou un staff technique.
NP : Vous continuez d’apprendre en même temps que vous exercez vos fonctions ?
FG : Evidemment. On en apprend tous les jours. Maurice Cohen, Roger Ricort, le staff m’en apprennent régulièrement. Même Jean-Michel Aulas ou Gervais Martel continuent à apprendre pourtant ils ont beaucoup d’expérience. Dans le football, la vérité d’un jour n’est pas celle du lendemain et vice versa.
NP : Vous avez été surpris par la pression, par les médias ?
FG : Non. Les médias font partie intégrante du monde professionnel. J’ai toujours eu de bonnes relations. Ma porte est toujours ouverte. Je refuse rarement une interview même jamais. Je n’ai aucun souci avec eux tant qu’on me parle football et qu’on peut s’exprimer.
NP : Avez-vous été surpris, embêté ou gêné par quelque chose à votre arrivée ?
FG : Pas spécialement. Il y a eu ces polémiques, ces rumeurs, ces amalgames et ces tensions. C’est dommage que ce soit sorti sur la place publique. C’est peut-être un mal pour un bien. On sent maintenant un discours beaucoup plus mobilisateur et fédérateur. Tout ça fait également partie du milieu professionnel. Tous les clubs traversent des crises. Le PSG et l’OM en traversent même quand ils sont dans le haut du classement. Même Lyon n’est pas à l’abri des critiques. C’est comme ça.
NP : À votre arrivée, qu’avez-vous dit aux joueurs aux joueurs, au staff ? Y a-t-il eu un discours précis ?
FG : À Frédéric Antonetti, je n’ai pas besoin de lui dire grand-chose. Il connaît son métier sur le bout des doigts. J’ai beaucoup de complicité avec lui, non pas par rapport à nos origines corses, mais parce que c’est quelqu’un de très consciencieux et compétent. Il fait son métier avec tout son cœur et sa dévotion. Mais on a beaucoup de contacts. C’est évident !
Aux joueurs, je leur ai dit que la situation était un peu critique. On avait 16 points. Je leur ai dit qu’ils avaient du talent, que la confiance faisait défaut dans leur jeu et leur implication sur le terrain, que c’était un problème mental. Ce n’est pas un problème de qualité. Je leur ai dit de jouer et de se libérer. On les sent généreux. Il reste des matches. Vous avez vu que contre Bordeaux on a souffert mais par peur parce qu’on n’est pas guéri.
NP : C’était Bordeaux, un gros morceau…
FG : Je les ai trouvés peu dangereux avec peu d’occasions. J’ai été assez impressionné par leur contrôle du ballon. Ils ont été très bons et j’ai la prétention de dire que je m’y entends en football.
NP : Vous avez cherché à rassurer le staff ?
FG : Oui comme pour les joueurs. Il fallait qu’on soit tous solidaires. On ne peut s’en sortir que comme ça. C’est le message que je veux faire passer au sein du club, de la ville et des supporters. Il faut une osmose parfaite sinon je ne vois pas comment on pourra s’en sortir.
NP : Vous avez commencé votre présidence avec la fin du mercato. C’est un début mouvementé. Pouvez-vous nous en parler avec un peu plus de recul ? On peut évoquer Fortuné, Monterrubio…
FG : Fortuné c’est dommage. Le coach le voulait depuis des années. Il a du potentiel, beaucoup de qualités. Il est méconnu du grand public. Je pense que si on avait déjà été en place comme on l’est aujourd’hui, Fortuné serait à Nice. Il y a eu beaucoup d’indécisions de la part du club. Ça fait partie du métier que l’on apprend.
Pour Monterrubio : le matin, on l’a au téléphone. Il est disposé à venir. Lens se met sur les rangs et puis c’est la concurrence. Si on ne l’a pas eu, c’est dû au classement. Ce n’est pas financier car notre offre était sensiblement la même que celle du RC Lens. Quand on est un petit club comme le nôtre, avec un plus petit budget, c’est dur d’approcher des joueurs de cette catégorie.
En 48 heures, on a beaucoup travaillé. On n’a pas eu de résultats mais ce n’est pas grave. On a eu beaucoup d’offres, une cinquantaine de joueurs. Prendre pour prendre ça ne m’intéresse pas. Je voulais prendre pour apporter un plus. On nous a proposé des joueurs connus et des inconnus. On nous a proposé Mario Jardel. C’était un grand buteur. On a failli prendre Reinaldo mais on nous a averti qu’il avait un problème physique. On n’allait pas faire venir un joueur qui n’était pas prêt à 100%. S’il faut faire les choses, il faut les faire bien. Il vaut mieux ne rien faire, que faire mal les choses.
NP : Vous avez quand même eu Lionel Létizi. Ça s’est décidé rapidement ?
FG : Oui très rapidement. J’ai beaucoup apprécié Lionel. Il va nous apporter de la sérénité dans le vestiaire par rapport à son vécu.
NP : Vous avez donc beaucoup de contacts pour le prochain marché des transferts?
FG : oui. On va commencer à y travailler en tenant compte soit du maintien ou de la descente et je croise les doigts pour que ça ne soit pas le cas.
NP : Quelles sont vos activités actuelles maintenant que le mercato est achevé ?
FG : On est entrain de faire l’organigramme sportif, de voir ce qu’on peut améliorer et où on peut améliorer. Il y déjà eu beaucoup de travail effectué par Maurice Cohen. On essaie d’affiner. On travaille sur la saison à venir.
NP : Qu’est-ce qui va changer dans l’organigramme ?
FG : J’ai surtout voulu étoffer la cellule recrutement. Il y a déjà José Cobos qui est d’ailleurs en voyage. Tant qu’on n’a pas ce grand stade, on n’a pas le budget nécessaire et on n’est jamais à l’abri d’une erreur. Cette année, il y a eu le cas Moussilou. Ce n’est pas une erreur, c’est un échec.
Demain, on n’aura plus le temps de pouvoir se tromper autant pour un budget tel que le nôtre. Il faut prendre des jeunes qui ont du talent comme Roger Ricort a su le faire avec Apam, Diakité et Ederson. On vise le long terme. On est un club sain financièrement. Si demain, il faut prendre un joueur confirmé, on n’hésitera pas.
NP : Les actionnaires seraient prêts à mettre la main à la pâte ?
FG : C’est envisageable.
NP : Quel genre de supporter êtes-vous ? Plutôt celui qui crie et encourage 90 minutes ou plutôt celui qui refait les actions en modifiant les schémas tactico-tactiques ?
FG : Je suis ingérable en tant que supporter. J’ai été un peu obligé de me calmer par la force des choses et par ma fonction. Je crie et je saute beaucoup moins. Je me lève et rouspète beaucoup moins. Intérieurement, j’explose constamment.
NP : Qu’avez-vous fait au coup de sifflet final contre Bordeaux ?
FG : Je n’ai pas pu m’empêcher de crier les points rageurs.
NP : Il me semble que vous avez sauté sur Maurice Cohen ?
FG : Oui c’est vrai.
NP : Et dans les vestiaires ?
FG : Je suis descendu féliciter tout le monde. La première personne que j’ai vu en descendant c’est Cédric Varrault qui s’est jeté dans mes bras.
NP : Vous avez fait un peu comme Jacques Kachkar, nouveau président de l’OM ?
FG : Non. Mais les joueurs savent depuis 2002 que j’aime ce club. Je suis profondément attaché au club, aux joueurs. Quelque chose passe entre eux et moi. Ils savent que je suis là pour les aider si je peux et dans les limites de ce que je peux faire.
« Ici, c’est quand même Nice : la Côte d’Azur, la cinquième ville de France. On a les moyens d’attirer de bons joueurs. »
NP : La BSN a mis un terme à sa grève. Que pensez-vous de ce mouvement initié par les ultras niçois ?
FG : Les supporters ont toujours droit à la parole. J’ai appelé tous les corps de supporters. Je sais qu’on a leur soutien et on l’a toujours eu. Je leur ai demandé d’être encore plus actifs. On en avait vraiment besoin. Et samedi on a vu le résultat. Il y a un public fantastique. Je m’entends très bien avec tous les supporters. Je les reçois régulièrement et si je peux les aider je le ferais dans la limite de ce que je peux faire.
NP : Parlons d’un sujet important : le stade. Jacques Peyrat livrera son verdict pour le projet Cohen vers le 15 février. Qu’en espérez-vous ?
FG : ça c’est le domaine de Maurice ! C’est avec lui qu’il faut en discuter.
NP : Vous en attendez quand même beaucoup ?
FG : De toute manière, sans stade, on fera peut-être des saisons à la 8ème place mais beaucoup où on jouera la 15ème et le maintien. Sans stade, il ne faut pas se leurrer, on sera toujours forcément obligé de jouer le maintien et d’être dans la situation à laquelle on est aujourd’hui. Il faut un stade qu’on soit en L1, L2. Si vous avez un stade en L2, vous allez remonter grâce aux infrastructures. Ici, c’est quand même Nice : la Côte d’Azur, la cinquième ville de France. On a les moyens d’attirer de bons joueurs. Et si en plus on a les installations et le budget qui va avec… forcément la donne est changée.
NP : Qu’est-ce qui pourrait être amélioré au club selon vous ? Le marketing et le Merchandising, on peut dire que ces deux secteurs pourraient progresser à Nice…
FG : ça aussi on va l’améliorer. C’est encore une partie qui concerne Maurice. Mais on va s’attacher à l’améliorer.
NP : Vous êtes Corse. C’est une attache très forte ?
FG : Evidemment. Je suis Corse. Mes parents aussi.
NP : ça change beaucoup de choses d’être corse pour le relationnel ici à Nice ?
FG : Non. Je me suis toujours senti bien avec les Niçois et notamment avec les supporters. On a le même côté identitaire. On est méditerranéens. Je suis profondément attaché à la Corse. En matière de football, je suis profondément attaché au Gym. Je m’intéresse aux clubs corses et je suis leur résultat. Si Bastia ou Ajaccio jouent contre Reims ou Sedan, je serais pour Ajaccio ou Bastia.
NP : Et un Bastia-Nice ?
FG : La question ne se pose même pas !
NP : Parlons de la tension avec l’association et la polémique sur son rôle lors de la mini-crise…
FG : Je n’ai aucune tension avec l’Association.
NP : On a entendu beaucoup de choses. C’est le moment de dire ce qu’il en est.
FG : Je n’ai aucun problème particulier avec l’association. Elle est détentrice de la licence, des couleurs du club. Je pense qu’entre personnes raisonnables et intelligentes, on peut s’entendre et on va tout faire pour. Personnellement et en ce qui me concerne, je n’ai aucun souci avec eux.
NP : Quelles sont vos défauts ?
FG : J’en ai plein. Ce serait trop long à énumérer. Je dirais la générosité et la droiture. Ce sont à la fois mes qualités et mes défauts.
NP : Rapidement, si je vous dis :
Maurice Cohen : Très bon président, personne très attachante.
Marcel Governatori : Très sincère avec beaucoup de cœur mais le football ce n’est pas son monde.
Gilbert Stellardo : Très bon gestionnaire, homme de compromis. J’ai beaucoup de respect pour Gilbert.
Franck Giudicelli : point d’interrogation !
NP : Votre meilleur souvenir Foot à Nice ?
FG : Monaco-Nice l’an dernier. J’étais dans les tribunes entrain de me disputer avec les trois-quarts des Monégasques.
NP : Qu’avez-vous envie de dire aux supporters pour le match contre Troyes ?
FG : Faut que le stade soit plein, qu’ils nous encouragent comme ils l’ont fait contre Bordeaux et même plus pour faire comprendre que ça va être dur de venir chercher des points au Ray. C’est le message que je veux faire passer et sans les supporters on ne peut pas le faire passer. C’est eux qui ont les clés.
NP : Vivez-vous sur Nice ?
FG : Je suis sur Beaulieu-sur-Mer. Mais je ne suis pas réellement établi. Je suis en chantier de partout !
NP : Quelles sont vos balades préférées à Nice ?
FG : La Place Masséna et j’aime beaucoup la zone piétonne.
NP : A quelle question refuserez vous toujours de répondre ?
FG : Aucune. A part si ça gène l’intérêt du club.
NP : Samedi c’est Troyes qui vient défier les aiglons au Ray. Pouvez-vous nous donner votre pronostic ?
FG : 2-0 but de Koné… le second d’Ederson. Lilian n’a pas encore marqué mais il va marquer d’ici la fin de la saison.