700 milliards de dollars ! L’annonce spectaculaire par le gouvernement des Etats-Unis d’une récupération des créances douteuses afin d’apurer les comptes des institutions bancaires a, nous dit-on, sonné la fin de la crise financière mondiale et consacré le grand retour de l’Etat. Ce plan de sauvetage hors norme envisagé par l’Administration américaine avec l’accord probable du Congrès donne, il est vrai, la mesure des dangers qui guettaient le « système financier international ». Union sacrée oblige, les deux candidats à la Maison Blanche ont d’ailleurs avalisé sans broncher cette initiative. Ce qui au passage en dit long sur le fait que Démocrates comme Républicains savent se plier aux impératifs, qu’ils soient sécuritaires, commerciaux ou monétaires, définis par les invariants de la politique américaine.
Reste à savoir si la démarche pleinement responsable suffira à calmer les mouvements complètement irrationnels des spéculateurs qui retrouvent aussi promptement qu’ils l’ont quitté, le chemin des investissements boursiers.
Car l’euphorie qui a salué ce « retour de l’Etat » ne semble pas de mise. Les propos du président George Bush sur les conséquences autrement dramatiques pour le citoyen américain d’un quelconque « laissez faire » et d’un attentisme si cher à la pensée libérale outre-atlantique, attestent du fait que c’est bien contrainte et forcée que l’Administration Bush a dû recourir à ces montants astronomiques. En fait de retour de l’Etat, c’est plutôt un Etat otage d’une économie réelle chancelante qui doit intervenir pour tenter de limiter les dégâts : ceux des excès d’enthousiasme de quelques milliers de spéculateurs imprudents et dont les contribuables – américains aujourd’hui, européens demain – devront sans doute régler douloureusement la facture.
Pour leur part, Les Français ne s’y trompent pas malgré des déclarations éternellement rassurantes de la Ministre de l’économie qui affirmait encore en septembre 2007 que « la crise n’était pas un krach mais une simple correction financière ». Force a pourtant été à la locataire de Bercy de reconnaître le 15 septembre dernier, la gravité des événements.
Deux sondages, celui du Figaro (Politoscope Figaro/LCI du 18 septembre) et celui du Journal du Dimanche (JDD du 21 septembre) fournissent des chiffres éloquents : 80% des personnes interrogées estiment que les difficultés actuelles des banques et des emprunteurs vont entraîner une crise économique grave. Même son de cloche pour 81% des sondés du JDD qui se disent inquiets pour l’avenir de l’économie française. Preuve s’il en est que les Etats subissent plus qu’ils n’agissent dans cette crise financière, 66% des Français questionnés par le Figaro, toutes tendances politiques confondues, ne font d’ailleurs pas confiance au Gouvernement pour les protéger de la crise.
Dans l’attente de l’important discours sur l’économie que Nicolas Sarkozy doit prononcer jeudi prochain à Toulon, on ne peut que comprendre et partager les inquiétudes qui portent sur les répercussions à venir de cette crise en terme d’emploi et de risques accrus de défaillances d’entreprise. Avec une croissance d’à peine 1% pour 2008 et « également molle en 2009 », on peut à tout le moins espérer du chef de l’Etat un discours aussi clair et réaliste que celui qu’il a tenu autrefois sur les « caisses vides ». Mais quelle que soit la portée des mesures susceptibles d’être annoncées, une certitude demeure : Si la crise financière est terminée, la crise économique ne fait, quant à elle, que débuter.