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22 novembre 2024

L’Edito du Psy – Spécial Liban – From Beyrouth with love…

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Beyrouth
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« Restitution du Golan contre lâchage du Hezbollah ». L’équation paraît simple. Trop dans cet Orient compliqué. Bilatéraux, les balbutiements de pourparlers entre Israël et la Syrie – par la Turquie et la Norvège interposées – impliquent d’autres puissances, régionales et mondiales. Et le Liban, toujours au cœur d’enjeux qui le dépassent. Dans n’importe quel autre contexte, ces discussions indirectes réjouiraient la population qui y verrait une avancée pour la paix. Vues de Beyrouth, elles ne laissent d’inquiéter tant elles semblent préparer la guerre.

Il suffit de poser la question aux représentants du Hezbollah, suspicieux sur les réelles intentions du voisin syrien depuis l’assassinat, dans des conditions encore inexpliquées, de leur chef opérationnel Imad Moughniyé. « Refus de commenter », explique circonspect le Député Hossein Hadj Hassan, conseiller politique du Secrétaire général Hassan Nasrallah. Réponse pour le moins inhabituelle d’un homme plutôt à l’aise avec la rhétorique. Attente d’instructions et d’éclaircissements de la part de Damas ou réel embarras, toujours est-il qu’au sein de la milice chiite se multiplient doutes et interrogations, doublés d’une paranoïa qui conduit leur service de sécurité à contrôler des visiteurs, à l’image de cet étudiant français de Sciences Po de Bordeaux, retenu deux heures dans le sud du pays. Il existe des discussions serrées au plus haut niveau du Parti de Dieu, précise-t-on dans les milieux libanais de sécurité, sur la manière de réagir à la situation.

Faut-il en effet donner du crédit à l’initiative – pas vraiment nouvelle – des autorités israéliennes, plutôt enclines à maintenir en place un régime minoritaire alaouite aux abois, moins dangereux qu’une armée de généraux sunnites au pouvoir ? Dans les cercles onusiens locaux, on doute en effet de l’intérêt syrien pour cette offre, moins valorisante en dépit de son fort symbolisme que les atouts inhérents à la carte libanaise.

La crainte d’un nouvel embrasement au sud Liban afin de torpiller ce dialogue rejoint en tout cas celle d’une réaction violente de Damas à la radicalisation de ses principaux ennemis politiques au Liban. D’autant plus que prévaut le sentiment d’une inexorable désagrégation des forces pro syriennes du 8 mars laquelle laisse finalement émerger le seul noyau dur du Hezbollah : l’échec d’une concertation nationale, initiative lancée par le président du Parlement Berry toujours tenté de jouer sur la vieille rivalité au sein des Chiites entre Amal et la formation milicienne concurrente en fonction de la situation régionale, l’a plutôt marginalisé. Le soutien retiré au Général Aoun par le député Michel Murr confirme cette tendance.

Simultanément, la majorité anti-syrienne du 14 mars se radicalise avec le soutien probable de Washington : l’annonce, même illusoire, de finaliser coûte que coûte l’échéance présidentielle le 13 mai prochain, les déclarations enflammées du leader druze Walid Jumblat sur les moyens iraniens de communications autonomes et sophistiqués du Hezbollah et son contrôle sécuritaire de l’aéroport – informations largement connues mais jamais explicitées – alimentent la psychose d’un retour des attentats, hypothèse accréditée dans les milieux de l’ONU.

Commémoration du retrait syrien Place Sassine
Commémoration du retrait syrien Place Sassine
C’est dans cette ambiance pour le moins tendue qu’à Achrafiyé, le cœur chrétien de Beyrouth, les Forces libanaises et les Kataëb commémoraient le retrait des troupes syriennes d’avril 2005. Manifestation de quartier qui trahit la difficulté de ces milices chrétiennes à sortir de la résistance pour devenir un mouvement d’ampleur nationale.

Signe probable d’une grande lassitude des Libanais pour les affaires politiques, une part croissance de la population admet « très bien se débrouiller sans président ». Si ce n’était la question des salaires et celle des nominations, le pays du Cèdre donnerait, il est vrai, le sentiment de continuer à tourner à plein régime : constructions de routes et de ponts se succèdent tandis que surgissent un peu partout de luxueux immeubles même si on ne sait pas exactement quels en seront les heureux propriétaires. Un trop plein d’argent, notamment en provenance des pays du Golfe, qui n’est pas sans lien avec les rivalités politiques entre majorité et opposition sur la mainmise des environnements sociaux et humains.

Il n’empêche, risque d’attentats ou pas, rien ne semble venir perturber la volonté des Libanais de veiller le soir. Les rues festives de Gemmayzé ou de Monnot ne désemplissent pas. Assis à mes côtés dans l’avion, un jeune diplomate américain, tout droit sorti de « l’école des fourchettes et des couteaux » – passage obligé pour les militaires qui intègrent le Département d’Etat – venait de quitter sa première affectation : la zone verte de Bagdad. « Formation accélérée », plaisante prudemment l’intéressé, venu s’encanailler dans la capitale libanaise. Nul doute que son séjour au cœur du Levant lui permettra de parachever utilement son éducation. Qui sait, sans incident, conduire une voiture à Beyrouth, peut ensuite tranquillement rouler dans le monde entier.

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