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22 novembre 2024

L’Edito du Psy – Vous avez dit indécent?

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jpg_bobine2008-92.jpgUn mot. Un tout petit mot. Discret. Prononcé sur le bout des lèvres. Un vrai mot politique. Puissant par sa retenue même. Une mèche allumée qui chemine lentement avant l’explosion. La preuve? Son parcours: extirpé d’une phrase et d’un contexte déjà dépassés, le mot engraisse à force de picorer à droite ou à gauche : le grain, il est vrai, ne manque pas! L’indécence est un peu comme le fleuve de la Moldau, le poème symphonique de Smetana: rejoint par les nombreux affluents de l’indignation, il enfle et risque de tout embarquer sur son passage. L’intelligence autonome du mot reflète d’ailleurs celle de son auteur: poser la question de la décence permet au stratagème lexical de fonctionner: le pudique euphémisme de la pensée laisse tout l’espace nécessaire à l’appropriation et à l’interprétation ultérieures par d’autres. La jouissance du scandale est offerte sur un plateau au destinataire final. L’indécence ne s’enflamme comme le soufre qu’au contact de l’air: elle requiert la transparence et la publicité. Florilège des derniers jours.

Les émoluments cumulés de l’ancienne Ministre Christine Boutin? Connus d’un nombre respectable de responsables politiques nationaux, il ne sont pas jugés indécents le mardi mais le deviennent, horresco referens, le jeudi, après la parution d’un hebdomadaire satirique qui en révèle leur montant. Le prix exorbitant des chambres d’hôtel pour les Bleus en Afrique du Sud? Intolérable polémique avant le match. Sujet nettement plus discutable après leur piteuse prestation avec l’Uruguay. Le « match a manqué de finitions » a osé Raymond Domenech dans sa conférence de presse: probablement un lapsus après sa découverte d’un indécent article signé Yahoo.auto sur « les bleus et leurs voitures fantastiques »! Est-ce la raison pour laquelle les joueurs, privés de leurs précieux bolides, ne parviennent pas à sortir de leur luxueuse résidence, comme le dénoncent les magazines locaux?

Indécent encore, selon Bernard Henri Lévy, le voile iranien de Laurence Ferrari interviewant à Téhéran Mahmoud Ahmadinéjad. La journaliste est en droit de faire son métier. Il sied en outre d’endosser à Rome les habits des Romains. Reste que les réponses du président iranien, courues d’avance, ne méritaient certainement pas une telle dépense: il y a malhonnêteté à laisser dire et entendre que « l’Iran est un pays libre » et que « les opposants y ont le droit de manifester ». A défaut du chiffrage par TF1 de cette inutile escapade, l’avocate iranienne et lauréate du Prix Nobel de la Paix, Shirin Ebadi, quantifie heureusement l’indécence : 800 prisonniers politiques croupissent dans les geôles de la République islamique. France 2 n’est d’ailleurs pas en reste pour le cynisme. Au journal de 20H00, David Pujadas débute son entretien avec Vladimir Poutine par un indécent « podosuçage », selon l’aimable expression de Bernanos : « la Russie est une démocratie » lance-t-il au premier Ministre russe en visite à Paris. Déconcertante évaluation puisqu’au même moment étaient étendus les pouvoirs du FSB, le successeur du KGB, désormais autorisé à donner, avec un effet juridique contraignant, des avertissements aux particuliers et aux entreprises pour les mettre en garde. En cas de leur non respect, des poursuites pourront être engagées contre des citoyens sans défense. Sans parler d’un rapport du Parquet russe, cité par Marie Jégo, la correspondante du Monde à Moscou, et selon lequel « onze personnes décèdent chaque jour dans les prisons russes, faute de soins ou en raison des mauvais traitements ». Rassurante indécence de la mort. Surtout celle des autres.

Plus qu’indécent, presque obscène en cette période de crise économique mondiale et de plans de rigueur, le projet de budget pour 2011 de la Commission de Bruxelles, qui prévoit une hausse des dépenses de fonctionnement des institutions européennes de 4,5%. Démagogique, et sûrement un tantinet vengeresse pour ses collègues du Gouvernement, la proposition de Jean-Pierre Jouyet, Président de l’Autorité des marchés financiers, de réduire son traitement public de 20% à 30%. Silence embarrassé d’indécence dans les rangs gouvernementaux.

Alors que Martine Aubry cherche à « verrouiller » les primaires socialistes de l’année prochaine et qu’à droite, Nicolas Sarkozy s’évertue à éliminer tactiquement tout autre candidature que la sienne pour 2012, les Français pourraient bien sanctionner les futures échéances présidentielles. Avec un vote, lui aussi, indécent.

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