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22 novembre 2024

Une orientation politique plus sociale pour Christian Estrosi ?

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Depuis quelques temps, Christian Estrosi, le Député Maire de Nice et Président de la communauté urbaine Nice Côte d’Azur, a abandonné le style et les thèmes chers à son (ancien ?) mentor et référant, le président de la République, Nicolas Sarkozy. Ecarté du poste et rang de ministre et éloigné de la direction nationale de l’UMP, le maire de Nice a du recentrer son périmètre d’activité et d’influence au niveau local.


estrosi-5.jpg De plus, le bon résultat des candidats étiquetés Nice Ensemble (et non UMP) fortement sponsorisés par lui et son alter-ego au Conseil Général, Eric Ciotti, lors des dernières cantonales, résultat en contre-tendance par rapport à celui assez médiocre de la droite républicaine au niveau national, ont renforcé la conviction que son positionnement sur l’échiquier politique passerait par une primauté locale. D’où l’accélération pour la mise en place du projet « Métropole » dont il sera certainement le futur Président, ce qui lui permettra d’élargir considérablement son champ d’action et de le faire coïncider avec le redécoupage des circonscriptions électorales en vue des élections nationales de 2012 qui suivront la Présidentielle.

Bref, moins de Paris et plus du… Comté de Nice dont il est l’incontestable « seigneur » au sens médiéval du terme. Mais, alors que Nicolas Sarkozy, peine à effacer l’image du « Président des riches » et a choisi de plutôt « droitiser » son action pour contrer le discours populiste du FN new-look de Marine Le Pen, Christian Estrosi, a contrario, a opté pour une « popularisation » de sa stratégie politique. Si dans le passé, il affirmait son volontarisme et son efficacité (« Je dis ce que je fais et je fais ce que je dis »), l’orientation actuelle se veut bien plus sociale : « dire, faire et… populaire » pourrait être le nouveau slogan, avec le corollaire de mots et d’expressions qui vont avec : être contre l’individualisme et son égoïsme, mutualiser les moyens, additionner les forces, faire vivre la proximité, soutenir le pouvoir d’achat avec des actes publics forts. Tout cela pour faire de Nice une ville de référence et un territoire exemplaire.

Naturellement, on le sait bien, comme pour la monnaie, il existe aussi une inflation aussi pour les mots. Comme on sait que Christian Estrosi n’est pas avare de gargarisme lexical. Mais l’homme, auquel ses adversaires reprochent de ne pas avoir une formation culturelle adéquate, est beaucoup plus structuré que ce que les apparences montrent et, en trente ans de vie politique, il a beaucoup appris. Et comme du surcroit il est aussi actif que réactif et qu’il sait humer le vent… Il a bien compris que le temps du « bling-bling » est dévolu et que politiquement ce n’est plus payant. D’où ce changement de cap, ce retour à la réalité des faits plus qu’à la vie en rose. Quand les fins de mois sont difficiles et l’avenir est sombre, le rêve laisse la place à la réalité : « primum vivere, deinde philosophare ». Cette expression en latin n’a pas besoin de traduction !

Alors, « basta » avec ce capitalisme libéral qui dans sa version globale de « turbo-capitalism » a déréglé l’ordre social existant, cette loi du marché sans règle qui a déterminé un individualisme négatif avec autant d’inégalités et d’injustices en préconisant un mouvement massif de désaffiliation où le chacun-pour-soi tend à dominer les autres, à les rendre taillables et corvéables à merci.

Christian Estrosi s’est-il pleinement converti à la solidarité comme principe de base et totem politico-social ? Ou tout simplement a-t-il opté pour une option qui ne coûte rien sauf des bulles de paroles à bon marché afin de se sentir du bon côté ?

Nous estimons que Christian Estrosi, face à cette décadence qui conduit à l’inégalité systématique, a bien compris qu’une société n’est pas considérée comme telle s’il n’y a pas une cohésion sociale, l’anticorps qui la préserve de sa dissolution. Ce n’est pas par hasard si Madame Tatcher, un des chantres du capitalisme « financier », disait que « la société n’existe pas mais existent les individus » et s’appliqua de son mieux à briser tout mouvement syndical qui représentait un des corps sociaux les plus importants de cette « société ».

« Back to fundamentals », il faut revenir à la case départ quand les situations se font difficiles, voir dramatiques et on a besoin de retrouver ces « fondamentaux » pour comprendre et repartir à nouveau après s’être égarés dans des voies qui se sont révélées être sans la moindre issue.

Peter Glotz, philosophe et universitaire allemand, avait déjà théorisé avec sa celébre définition « blockierte gesellschaft », la société des « deux-tiers », en mettant la lumière sur la situation où une partie majoritaire de la population vivait dans une condition économique confortable contre un tiers qui ne l’était pas. Et préconisait une politique économique attentive au social pour arriver à une « société de 9/10″ où seulement le décile inférieur aurait été en difficulté. Cet objectif visait de manière clairvoyante à une condition sociale : quelle meilleur exemple de tutelle des plus faibles que de leur donner la possibilité d’être auto-suffisants ? Quelle meilleure analyse anthropologie politique qu’une vision d’une société équilibré avec une forte cohésion sociale ? Comment ne pas comprendre qu’une société est un organisme complexe où il faut trouver un équilibre entre existences individuelles et vivre collectif ? Et qu’il ne faut pas se tromper entre la fin ( l’ambition de chacun à une vie meilleure) et le moyen (l’agir politique) ?

L’Eglise Catholique, dans sa vision anticipatrice, avait déjà évoqué ces principes avec l’encyclique  » Rerum novarum » en 1891 du Pape Léon XIII quand la société industrielle avait déjà pris le pas sur celle agricole. Pape Jean-Paul II en donna une version modernisée en 1991 avec son encyclique  » Centesimus annus »

Lors de la « Grande crise » des années 30, les États-Unis en sortirent par une politique sociale (le « New deal ») alors qu’en Europe on chercha dans les dictatures la réponse avec les conséquences que l’on connait.

Après la deuxième Guerre mondiale, l’Allemagne se reconstruit avec une politique de « sozialmarkt » * que l’intellectuel catholique français Michel Albert appella « capitalisme rhénan » qui avait les bases théoriques dans les théories de  » l’ordo-liberalismus » des économistes de formation chrétien-sociale de l’Ecole de Fribourg. De cette politique s’inspirèrent toutes les démocraties européennes et elle fut la force constituante de l’Union Européenne d’aujourd’hui.

Alors, pour en revenir à Nice et à son maire, quel futur nous attend ? Un appel conventionnel à plus de solidarité en opposition primaire à son opposé, l’égoïsme, qui serait un slogan pour toutes les saisons ? Ou une politique plus logique que caritative dans laquelle le droit se substitue au compassionnel ? Comme disait le philosophe italien Norberto Bobbio, « Si les hommes ont bien compris que l’égalité entre tous n’est pas un objectif réel, de même, on ne peut pas empêcher à chacun de vouloir être « plus » égal par rapport aux autres ».

Nice est une ville qui à cet égard a des devoirs spéciaux d’exemplarité : ici vit et reçu sa première formation intellectuelle au Lycée Masséna, René Cassin qui fut le principal rédacteur de la Déclaration Universelle des Droits de l’homme en 1948, et qui fût honoré du prix Nobel et enterré au Panthéon ( bizarrement seul un boulevard periphérique porte son nom. Comme quoi, nemo propheta est in patria !!!) De cette figure historique prise en exemple ne peut venir de la part de son premier magistrat, qu’une volonté politique inébranlable et une action sans faille pour une politique de droit et justice sociale.

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