Les épreuves furent nombreuses et difficiles à traverser. L’annonce, d’abord, qu’elle ne réalise pas. Le ras le bol, ensuite. La perte d’identité, un peu plus tard puis la dépression qui suit. La douleur, la transformation de son corps et enfin la reconstruction, pas à pas. Des étapes que beaucoup de femmes, atteintes d’un cancer du sein, sont amenées à traverser chaque année en France et dans le monde entier.
A travers son livre témoignage, « La victoire en soi », Françoise Bitton nous plonge dans un récit poignant, au coeur de la maladie. Rencontre avec une rescapée dans le cadre d’octobre rose.
Comment avez-vous découvert que vous étiez atteinte d’un cancer du sein ?
Lorsque le médecin m’a annoncé le verdict, je n’ai pas réalisé. Depuis un an déjà, je me sentais très fatiguée mais je me disais que ce n’était rien. J’avais fait une mammographie une dizaine de mois avant la découverte du cancer, une mammographie « à surveiller» dont je ne m’étais pas vraiment souciée… Un jour, ma fille décide de me « tirer les cartes ». Que les gens y croient ou non, elle ma dit qu’elle y voyait la maladie, j’ai donc été consulter sur ses conseils. J’ai fait une nouvelle mammographie qui devait être envoyée à l’hôpital Saint-Louis (Paris) pour « vérification ». Une simple vérification… qui a conduit à l’annonce de mon médecin. Aujourd’hui, je peux affirmer que dès ce jour, j’étais dans le déni total.
Y-a-t-il un moment où vous avez finalement réalisé que vous étiez malade ?
Oui, à la perte de mes cheveux. Durant les première séances de chimiothérapie donc. J’étais persuadée d’avoir la force de porter une sorte de casque pour éviter justement une perte trop importante. A la première séance de chimio, j’ai seulement tenu quelques minutes avec cet étau glacé sur la tête et j’ai presque hurlé pour qu’on me le retire. Au début, on ne pense pas que l’on va devenir chauve. Et puis, j’avais l’impression de vivre l’histoire d’une autre, tout cela n’était pas réel. Jusqu’au jour ou je suis directement allée chez le coiffeur pour me faire entièrement raser. Je ne fais pas les choses à moitié, j’ai donc décidé de prendre les devants.
Avant la perte des cheveux, vous êtes passée par de nombreux états d’esprits, quels étaient-ils ?
Il y a donc eu le déni, d’abord, pendant très longtemps. Un moment de ras-le-bol aussi. Tout le monde me disait « vas voir untel, untel est mieux, tu te fais suivre par untel ? ». Heureusement, mon mari m’a beaucoup soutenue et m’a dit : « Tu es entre de bonnes mains, pas la peine d’aller voir ailleurs ! » Là, ont commencé à se créer des relations à l’hôpital, de véritables rencontres humaines, jusqu’à mon opération, une mastectomie, réalisée par le Professeur Barranger. Il a ensuite fallu réapprendre son corps. C’est là qu’il faut avoir de la patience, car j’ai fait face à une réelle perte d’identité. C’était très long et le soutien est indispensable, qu’il soit familial, amical, médical, psychologique et même grâce aux associations. Quelques mois plus tard, j’ai également du faire face à la dépression. Mes cheveux ne repoussaient pas, on ne m’avait pas assez mise en garde contre les effets secondaires de la chimiothérapie. C’est là qu’il faut prendre conscience de sa maladie, l’accepter, accepter aussi que ce n’est pas de la faute des autres et qu’il faut se responsabiliser. Enfin, vint la reconstruction, physique grâce à la chirurgie reconstructrice et mentale. Vous êtes guérie. La dépression s’envole, les effets secondaires encore présents passent au second plan. Seul bémol, je n’avais toujours pas de cheveux… Cela fait six ans maintenant, et ils ont encore du mal à repousser.
Quel regard portez-vous aujourd’hui sur votre parcours du combattant ?
Aujourd’hui, c’est la joie de vivre qui prime. Je n’ai plus peur de rien, je suis très tolérante, j’ai beaucoup médité et je suis encore plus croyante qu’auparavant. Pour moi, ce cancer était une étape dans ma vie. La maladie m’a beaucoup appris, sur moi-même, mon comportement et les mémoires généalogiques ou cosmiques qu’on porte. J’ai eu de véritables révélations durant cette période. Aujourd’hui, à travers ce livre témoignage, je veux partager mon expérience avec toutes ces autres personnes qui ont pu vivre ou risquent de vivre une expérience similaire à la mienne. Mon but est d’organiser des conférences pour parler de mon vécu et aider les gens.