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21 novembre 2024

Eric Borghini revient sur les sanctions de la Coupe du Monde de la honte

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jpg_borgini.jpg Nice Premium : Pensez-vous que l’action disciplinaire envers les joueurs pour leur comportement lors de la Coupe du Monde en Afrique du Sud était indispensable, en quelque sorte un acte dû, ou qu’il aurait été plutôt préférable de « tourner la page » ?

La sanction disciplinaire était non seulement indispensable mais également capitale pour redonner un début de crédibilité à la Fédération à la suite du désastre de la Coupe du Monde en Afrique du Sud. Ces sanctions auraient dû intervenir beaucoup plus rapidement. C’est immédiatement, aux alentours du 20 juillet, que l’instance disciplinaire aurait dû être saisie, même par un ESCALETTE démissionnaire, ce qui ne l’empêchait pas « d’expédier les affaires courantes ».

Au lieu de nommer une commission d’enquête (non règlementaire), heureusement transformée en « commission d’information » (légale celle-là) par le Président DUCHAUSSOY, il fallait nommé un instructeur, prévu par le code disciplinaire, chargé de faire toute la lumière sur cette sordide et déshonorante affaire. Ainsi l’instance disciplinaire aurait pu prendre sa décision au maximum la première semaine d’août, c’est-à-dire dans un temps proche de l’action. Et là on aurait enfin pu « tourner la page ».

NP : Pensez-vous que la Commission de Discipline a pu mener une enquête suffisamment approfondie pour que les responsabilités de chacun puissent être clairement établies ?

Il est certain que l’absence volontaire de certains protagonistes a pu nuire partiellement à la recherche de la vérité. La commission a fait avec ses moyens. C’est-à-dire l’acte matériel de saisine par le Conseil Fédéral (à partir des conclusions de la commission d’information) ; l’audition des témoins : ESCALETTE, DOMENECH, VALENTIN, BOGHOSSIAN ; l’audition des joueurs présents et des avocats qui les assistaient ou représentaient certains absents. Par ailleurs les médias ont largement repris les déclarations des uns et des autres avant la réunion du 17 août, si bien que finalement je pense que les membres de la commission ont pu se faire une idée à peu près exacte de ce qu’il s’est réellement passé en Afrique du Sud. C’est pourquoi, on peut admettre que les responsabilités de chacun ont pu être établies avec un degré suffisant de certitude pour justifier une sanction disciplinaire.

NP : Pensez-vous que les décisions de la Commission de Discipline ont été équitables ou plutôt axées sur des préjugés ayant le but de satisfaire la demande de l’opinion publique ?

En tout cas il est évident que la « demande » de l’opinion footballistique de la base n’a pas été satisfaite tant les sanctions paraissent douces pour réparer l’affront au Drapeau et au maillot, le déshonneur et la honte, qui se sont abattus sur le football français ! Si préjugé il y a eu, c’est surtout l’idée absurde, à mon sens, de vouloir « tourner la page » à tout prix. D’ailleurs si on lit bien les déclarations successives de Laurent BLANC, notamment dans le journal « L’Equipe » et dans le magazine « France Football » ; elles se résument à la formule suivante qui semble fonder sa doctrine : « la fin justifie les moyens ». Dès lors qu’il a décidé que, ce qui était important était la qualification et si possible une bonne performance à l’Euro 2012, alors il aurait fallu, par tous les moyens, que les joueurs qu’il estime indispensables à la sélection nationale ne soient pas punis ou alors symboliquement. J’aurais, pour ma part, préféré que le sélectionneur, en liaison avec la DTN, songe à refonder complètement l’Equipe de France, quitte à faire l’impasse sur l’Euro 2012 !, pour se concentrer sur la Coupe du Monde 2014 afin de laver en 2014 l’affront fait au pays en 2012. En travaillant dans la durée à la constitution d’une équipe forte, unie, moralement propre, jeune, solidaire, respirant la joie de vivre, simple, proche des gens, un peu comme les magnifiques Equipes de France d’athlétisme et de natation, la Fédération aurait bel et bien œuvré à la reconquête du cœurs des amoureux de notre discipline, et vraiment satisfait l’opinion publique.

NP : Pensez-vous que le fait d’avoir sanctionné certains joueurs et pas l’ensemble du groupe a été correcte vis-à-vis de ce qui s’est effectivement passé (les joueurs ayant agi de manière solidaire publiant un communiqué que tous avaient signé).

On peut considérer que la sanction collective est intervenue avec la non sélection du « groupe de la honte » pour le match amical NORVEGE / FRANCE. De plus en droit disciplinaire français (comme en droit pénal d’ailleurs) les sanctions collectives sont illégales. J’ajoute qu’il n’y a pas de pire injustice que de traiter de manière égale des choses inégales. Le principe est celui de l’individualisation des peines et les juges sportifs doivent s’attacher, en fonction des éléments du dossier qui leur est soumis, d’y procéder. Pour donner un exemple, un arbitre ne peut pas infliger un carton jaune collectif à toute une équipe qui se comporterait mal sur le terrain. Il lui faut identifier les joueurs coupables ou ceux qui le sont plus que les autres, les meneurs. Car, comme dans tout groupe humain, au sein de l’Equipe de France il y a des leaders, des cadres, des meneurs. C’est pourquoi il était tout à fait naturel que, sur le strict terrain disciplinaire, tous les joueurs ne soient pas « mis dans le même sac ».

NP : Pensez-vous que la Commission de Discipline a voulu exercer un rôle « politique » pour affirmer l’autorité de la FFF en ce moment de crise institutionnelle du football français ?

La réponse est certaine et c’est NON. Si les membres de la commission de discipline avaient voulu exercer un rôle « politique », ils se seraient comportés comme de vrais politiques. Ils en sont loin. Un politique aurait considéré la situation sur un mode beaucoup plus global en considérant essentiellement l’intérêt général. Que commandait, précisément, l’intérêt général ? De prendre une décision qui opère une véritable restauration de l’image de la Fédération et du football français. Comment fallait-il faire ?

Voici mon opinion :

  • En premier lieu, il fallait « mettre la pression » en amont de la réunion du 17 août en faisant savoir (par l’intermédiaire de membres de la Fédération) que la sanction à intervenir pouvait aller du simple blâme à la radiation à vie en passant par toutes les suspensions – fermes ou avec sursis – non seulement en Equipe de France mais aussi et peut être surtout en club. Car le Conseil Fédéral peut toujours demander l’extension à la FIFA d’une suspension ferme prononcée en France. Je pense que cela était de nature à rappeler, notamment ANELKA
    et le Bayen de Munich, au sentiment des distances et à être plus respectueux de la Fédération Française, et moins arrogants…

  • En second lieu, à côté des interdictions fermes de sélections en Equipe de France, j’aurais bien vu une sanction ferme en club avec – pour les joueurs présents – la proposition à accepter ou refuser sur le champ, de convertir la sanction ferme en club en peine de réparation sous forme de cinq ou six actions au profit du football amateur. Y compris pour les joueurs qui évoluent hors de France. Car en Angleterre ou en Allemagne, que je sache, il y a aussi un football amateur.

Ainsi l’image de la Fédération aurait été rétablie car non seulement les joueurs concernés auraient été privés d’Equipe de France, ce qui est une vraie punition, mais en plus ils auraient dus, pour continuer à jouer en club, œuvrer en direction du foot amateur, c’est-à-dire de l’intérêt général en s’obligeant à animer des stages en provinces, encadrer des écoles de foot, etc… Bref montrer autre chose que de la morgue, de la superbe, des casques et des capuches sur la tête, et revenir à ce que le football peut offrir de plus beau : donner du
bonheur à l’homme.

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