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22 novembre 2024

La « tribune » d’Eric Borghini, président du District 06 de la FFF: le football français dans tous ses états

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Pour NICE-PREMIUM, Eric BORGHINI revient sur les enjeux de la réforme pour le football français.


borghini.jpg Maître Eric BORGHINI, Président du District de la Côte d’Azur, a été choisi avec quatre autres présidents de district parmi les 101 répartis sur le territoire national, en tant que négociateur de la FFF aux Etats Généraux du Football qui se sont tenus les 28 et 29 octobre 2010 à l’INSEP de VINCENNES.

Le 24 novembre 2010, au siège de la Fédération à Paris, il participera une nouvelle étape dans les négociations entre pros et amateurs pour finaliser la « Loi-cadre » qui doit être présentée à l’Assemblée Fédérale, décisive, du 18 décembre 2010.
La suite du calendrier de la réforme prévoit une Assemblée Fédérale extraordinaire le 02 avril 2011 pour adopter les nouveaux statuts de la FFF et le 18 juin 2011 une Assemblée Fédérale élective devant aboutir à la désignation pour 18 mois, jusqu’au 31 décembre 2012, des dirigeants nationaux de la fédération sur la base des nouveaux texte

Voulus par le Président de la République, Nicolas SARKOZY, les Etats Généraux du Football Français se sont déroulés dans un esprit constructif avec le désir sincère de rapprocher, sur le thème de la gouvernance, les points de vue des pros et des amateurs.
L’affaire n’a pas été simple car les divergences et les non dits, nombreux au départ, ont nécessité pas moins de 4 réunions préalables de concertation et de cadrage pour parvenir le 28 octobre 2010 à une position harmonisée.

Le principal changement est d’ordre « philosophique ». La réforme opère une véritable « révolution culturelle » car nous passons d’un système plutôt autoritaire, dirigiste, et pour tout dire peu démocratique, où seuls prévalaient les parcours individuels (les egos ?), à un système démocratisé fondé sur un Comité Exécutif resserré de 12 membres (l’ancien Conseil Fédéral), soit une vraie équipe cohérente, élue au scrutin de liste, sur un programme discuté et validé par l’Assemblée élective.

Le futur président de la Fédération sera le « capitaine » de l’équipe, c’est-à-dire le chef de file de la liste élue.

Ce principe désormais acté du scrutin de liste, qui était une revendication forte du monde amateur, permet de sortir d’une approche « affective » pour se tourner résolument vers une approche « réflexive » : que veut-on véritablement pour notre football national ?
L’idée est de promouvoir un projet, une équipe de compétences (et pas que de copains !) unis autour d’un programme, d’une feuille de route pour la mandature, voté en même temps que la liste. A côté de cet exécutif renforcé est instituée une Haute Autorité, ou seront représentés tous les acteurs du football (Joueurs, Educateurs, Arbitres, syndicats, associations etc) qui aura pour fonction la surveillance, le contrôle, l’interpellation et l’alerte en cas de dérives.
Ainsi la réforme installe une organisation simple et lisible des instances fédérales : la LFP s’occupera de tout le foot pro, la LFA s’occupera de tout le foot amateur, à cet égard les amateurs obtiennent une quasi indépendance de leur gestion à égalité statutaire avec les pros, et la FFF s’occupera des domaines communs : Equipes de France, Sélections nationales, Coupe de France, DTN, Arbitrage, Relations Internationales, Finances fédérales…

Désormais une seule question, mais qui est double, reste en débat : le rééquilibrage du poids des pros à l’Assemblée Fédérale par une nouvelle répartition de leurs voix qui tienne compte de la puissance économique du secteur professionnel et sa contrepartie : la nouvelle équation financière qui doit permettre au secteur amateur qui a la puissance du nombre de licenciés de pérenniser les actions qui sont les siennes au profit de l’intérêt général pour lui permettre d’assumer pleinement la mission de service public sportif dévolue à la FFF par l’Etat.

Les discussions sont âpres car les pros veulent 40% des voix là où ils n’en détiennent que 25%; et de leur côté, les amateurs veulent que l’aide financière que leur octroient ces mêmes pros passe à 16,7 millions d’euros pour la saison 2010/2011 là où il n’étaient prévus que 10,5 millions d’euros. Ce qui ramené en pourcentage des droits TV et paris en ligne représente 2,5% environ de ces recettes. En outre la réunion commune des collèges des présidents de ligue et de district du 12 novembre 2010 a donné mission aux négociateurs d’obtenir en sus, un « plancher » autour de 12 millions d’euros au cas où les recettes des droits TV et paris en ligne venaient à baisser significativement. Car dans ce cas 2,5% de rien cela ferait toujours rien ! Et le monde amateur a besoin de garanties financières pour la lisibilité budgétaire de ses actions.

Naturellement comme rien n’est simple dans la vie et pour compliquer notre travail nous devons faire face aux intégristes des deux camps. Les « talibans amateurs » ne veulent pas entendre parler de la moindre augmentation du pourcentage de voix des pros aux Assemblées Fédérales, arguant du nombre de licenciés (plus de 2 millions) à la FFF ; et les « ayatollahs pros » considèrent qu’ils en font déjà trop dans un contexte de crise économique du football professionnel qui se traduit par un déficit cumulé à ce jour pour la L1 et la L2 de 177 millions d’euros !

Mais en filigrane la crainte majeure du monde amateur telle qu’elle a d’ailleurs été clairement exprimée le 12 novembre par quelques présidents de district courageux est que la nouvelle répartition des voix porte à germe la possibilité, qui est désormais plus qu’une éventualité crédible, d’avoir un jour un président de la fédération issu du monde professionnel !

Au fond est-ce si grave ? C’est ce que j’ai répondu à mes collègues inquiets. Avec la réforme, la perspective change. Ce qui compte désormais c’est le programme du candidat, les hommes et les femmes qui l’entourent – peu importe leur appartenance d’origine – seules les compétences doivent guider les choix. Ainsi il ne faut pas craindre l’avenir et faire confiance à l’intelligence, à la détermination à faire vivre la modernité dans le football, à l’esprit de responsabilité qui doit animer les futurs dirigeants de la sphère amateur et professionnelle.

Aussi, les termes de l’alternative de la réforme de la gouvernance sont d’une simplicité biblique :

  • Soit on accompagne le changement et donc on influera sur les transformations qui de toutes façon s’opèreront, avec ou sans nous, les décideurs du football ;
  • Soit on reste est spectateur du changement, auquel cas on se condamne à le subir!
     
    C’est dans ce contexte que le football amateur a rendez-vous avec l’Histoire de notre Fédération. Il est face à son destin. Croire que l’on va pouvoir solder le désastre de KNYSNA par un tour de magie consistant à faire miraculeusement disparaître les vraies responsabilités serait suicidaire pour le football français. On le voit encore avec le rebondissement récent des polémiques sur les fameuses « primes » des Bleus ! La déflagration qui a suivi la trainée de boue laissée dans le sillage du «bus de la honte» a largement dépassé le cas des 23 «rebelles» inconscients et immatures.

Aujourd’hui, si la réponse que l’on apporte à la crise n’est pas à la hauteur des enjeux, alors à la faillite sportive et morale s’ajoutera le ridicule. Et le football français ne s’en relèvera pas, pour longtemps!

Réduire la question de la réforme des institutions du football et de sa gouvernance à ce débat d’arrière garde et totalement obsolète d’une
guerre picrocholine entre «Pros» et «Amateurs» c’est se tromper de combat.
La vraie question – la seule en fait – est : serons-nous capables de trouver ensemble, pros et amateurs, un fonctionnement refondé de notre institution qui soit à la fois plus démocratique, plus apaisé mais aussi plus efficace pour qu’un nouveau «KNYSNA» ne se reproduise plus jamais ?

A cette question capitale les Etats Généraux du Football français des 28 et 29 octobre 2010 ont apporté une réponse claire, pragmatique et consensuelle.

C’est pourquoi sur ce chantier de la réforme de la gouvernance du football, on n’a pas le droit d’avancer à reculons. Nous ne devons pas être autistes et entendre les aspirations de nos 2 millions de licenciés qui ne nous pardonneraient pas que la montagne accouche d’une souris. Ils nous pardonneraient moins encore que cette «réforme» soit perçue comme un «petit arrangement entre amis». Et pas davantage qu’elle soit sacrifiée sur l’autel des égoïsmes et du conservatisme. Etre à la hauteur de l’enjeu en étant capable de dépasser la «polka des egos» en ayant toujours à l’esprit l’intérêt général qui doit rester le moteur de notre réflexion et de nos actions.

La réforme de la gouvernance du football ne peut se limiter à un simple habillage du système existant qui a failli. Lamentablement. Ayons l’intelligence de conserver ce qui dans notre maison fonctionne. Et le courage de tourner sans complaisance le dos aux causes réelles de nos dysfonctionnements. Et arrêtons de nous faire croire que «tout va bien» au sein de notre maison. Si tel était le cas, on n’en serait pas là aujourd’hui !

Prétendre aujourd’hui que JP ESCALETTES est le seul responsable de cet échec et des dysfonctionnements dans notre fédération ayant conduit à la faillite sportive et morale que traverse le football relève non seulement de la malhonnêteté intellectuelle mais également de la lâcheté.
Ayons le courage de nous dépasser pour relever le défi qui se présente à nous. Nous ne pouvons pas nous permettre le luxe de faire échouer l’entreprise de rénovation de notre fédération.

Soyons capables tous ensemble de nous hisser à la hauteur des ambitions affichées : mener à bien cette entreprise de rénovation de notre fédération qui a soulevé tellement d’espérance. Nous porterions une responsabilité coupable si demain la réforme que nous présenterons s’avère être incolore, inodore et sans saveur.

On n’a plus le droit décevoir ni nos licenciés, ni nos milliers de bénévoles qui croient en notre football et qui sont à l’œuvre dans nos Ligues et nos Districts, ni les millions de spectateurs et de passionnés de notre discipline, ni les pouvoirs publics qui, en embuscade, ne se contenteront certainement pas d’un emplâtre sur une jambe de bois.

On ne soignera pas notre football, bien malade, avec une simple tisane! N’ayons pas peur du souffle fécond de la réforme, n’ayons pas peur du football professionnel qui a besoin de nous et qui ne construira rien sans nous ou contre nous, n’ayons pas peur d’avancer, main dans la main avec les pros, en véritables partenaires adultes qui ont fait le pari de l’intelligence et de la créativité pour assurer la pleine efficacité de la réforme.

C’est pourquoi dans cette négociation, à part le football français, il ne doit y avoir ni vainqueur ni vaincu. Il y a eu la prise en compte de toutes les contraintes et du poids de chacun. La FFF ce sont 2 millions de licenciés, la puissance du nombre, et l’esprit de service public ; la LFP c’est la puissance économique et médiatique dans un cadre marchant.

Nous sommes parvenus jusqu’à présent à un accord équilibré, et porteur d’espoirs pour l’avenir de notre discipline. La dernière ligne droite doit nous permettre de parachever le projet « d’aggiornamento » de notre football.

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