Mais qui est Chantal Julien ?
Née à Grenoble, elle réside à Mandelieu dans les Alpes-Maritimes où elle travaille comme éducatrice en APS à la mairie de Mandelieu. Elle a été une joueuse de très bon niveau puisqu’elle a passé plusieurs années sur les parquets de la ligue féminine à Challes les Eaux, Chenôve puis Tarbes avant de rejoindre Vence puis terminer sa carrière de joueuse au Mandelieu BC.
Elle est BE2. Elle a été championne de France de NF2 avec Challes, en 1986 puis de 1B avec Tarbes 1992. Elle a gagné la Coupe de France en 1987 avec Challes.
Elle se destine vers l’arbitrage en débutant parallèlement à sa carrière de joueuse en 1988. Après être passée dans les filières de détection nationale, elle débute en NM1 en 1994, puis en pro B en 1996 et Pro A l’année suivante en 1997.
Elle devient, la même année, Arbitre Internationale. Sa carrière d’arbitre de haut niveau prend de suite de l’ampleur. Elle siffle le Championnat d’Europe Junior Féminin en Turquie en 98, puis en 99 le Final Four Féminin à Brno (Slovaquie). 2000, le Championnat d’Europe Féminin des moins de 20 ans en Slovaquie avec la finale en bout.
2001, le championnat d’Asie Féminin à Bangkok, avec une finale en prime. 2002, les Championnats d’Europe Junior et des moins de 20 ans et la désignation pour arbitrer le championnat du Monde Féminin en Chine où elle aura l’honneur d’arbitrer la finale de ce championnat.
Première du genre pour une femme arbitre à la FIBA. Elle enchaînera par les jeux asiatiques, en Corée, en 2003, avant de recevoir la désignation suprême d’arbitrer la finale féminine des Jeux Olympiques à Athènes.
Elle est la première femme à être désignée par FIBA Europe pour arbitrer le dernier Championnat d’Europe Masculin en Serbie.
Chantal Julien a bien entendu arbitrer de très nombreuses finales du championnat de France de la LNB et également 3 finales de Pro B.
Elle est membre du Bureau de la Ligue Côte d’Azur de Basket et Responsable de la formation à la CRAMC Côte d’Azur depuis 2006.
Pour lire son carnet de bord de Chantal, il vous suffit d’aller sur le site de l’Union Nationale des Arbitres de Basket.
Elle encadre aussi les stages d’arbitres organisés par FIBA Monde. Nice-Première a interviewé Chantal Julien pour mieux comprendre sa passion pour l’arbitrage.
Nice-Première : On a plutôt l’habitude de voir des sportifs se reconvertir en entraîneur ou en consultant. Vous, vous vous êtes « reconvertie » en arbitre. Comment passe-t-on de joueuse à arbitre et comment prend on cette décision? Est-ce un déclic un matin en se réveillant?
Chantal Julien : C’est en fait en côtoyant des arbitres , tout en jouant, que je me suis rendu compte qu’il pouvait y avoir une bonne ambiance et une certaine convivialité (un peu comme en équipe). Passer arbitre me permettait de rester dans le milieu du Haut-Niveau mais vu sous une autre façade. L’entraînement est aussi une chose qui me plaît mais qui peut attendre. Pour arbitrer, je dois toujours être dans le coup physiquement et me lancer des défis personnels. De plus, en ayant un passé de joueuse de Haut-Niveau, on m’avait dit que j’aurai beaucoup de facilités à diriger le jeu surtout sur le plan technique.
NP : Comment se comportait Chantal Julien la basketteuse avec les arbitres et comment se comporte l’arbitre Chantal Julien avec les sportifs?
CJ : En tant que joueuse, j’étais odieuse et contestais tout le temps. C’est seulement après être devenue arbitre que je me suis « un peu » calmée, mais pas arrêtée. Le fait de bien connaître le règlement n’arrange pas quand un collègue sur le terrain fait une erreur. On le dit par contre sur un ton plus respectueux.
Ma relation avec les sportifs est, je crois, très cool, trop cool !!! C’est souvent ce qui m’est reproché quand je suis évaluée. Pas assez de discipline envers certains joueurs. J’essaye de discuter avec eux plutôt que de les sanctionner tout de suite. Au début, je jouais plus que je n’arbitrais.
NP : Vous arbitrez des hommes et avec des hommes. Est-ce toujours facile? Quel est votre discours pour vous imposer?
CJ : Avoir une forte personnalité reste ma clé fondamentale pour m’imposer. Soit résister à un joueur qui m’agresse verbalement, le regarder dans les yeux, l’affronter, ne pas avoir peur de le sanctionner. Dans tous les cas, ne jamais montrer que j’ai peur (et ça m’arrive des fois sur des matchs « chauds »). Toujours montrer qu’on est sûre même si ce n’est pas le cas !
Arbitrer avec des hommes n’est pas toujours facile. Généralement, mes collègues en France ont un grand respect pour ce que je fais. Il y a eu (et il y en a encore 1 ou 2) qui n’accepte pas d’être aide-arbitre derrière moi (quand je suis arbitre principal). Et ils essayent de me le faire comprendre sur le terrain. Alors là, je leur dis et en général, je ne pèse pas mes mots.
C’est arrivé lors du Championnat du Monde au Brésil.
NP : Abordons la compétition. Comment se sont déroulés les championnats du monde féminin au Brésil? Quelles équipes et quelles joueuses vous ont impressionée?
CJ : Le Championnat s’est très bien déroulé . Sur le 1er tour, je n’ai pas pu arbitrer de gros matchs (sur le papier) puisque la France était vite concernée par le classement et la qualification pour le tour suivant.
Tous les matchs pouvant influer sur le futur adversaire de la France ne pouvaient pas m’être attribués pour les arbitrer.
L’Australie avec Lauren Jackson m’impressionne beaucoup ainsi que les USA avec leurs stars WNBA, le Brésil avec son public fantastique, la joueuse espagnole Valdemoro.
NP : Etes vous proche des joueuses tricolores? Est-ce que vous êtes consultée par le staff?
CJ : L’équipe de France était à Barueri, à environ 45 Kilomètres de bus de Sao Paulo, où nous logions. Donc il était difficile d’aller les voir, surtout que j’avais souvent des matchs en même temps qu’elles. Je les ai vues la 1ère journée contre les tchèques puisque j’arbitrais juste après le match Russie / Nigéria.
De toute façon, quand on est dans un groupe d’arbitre, mieux vaut rester le plus neutre possible par rapport à son pays, même si le cœur y est forcément.
Le staff ne me demande rien. De toute façon, avec Alain Jardel, le discours est difficile.
NP : Comment jugez-vous globalement l’arbitrage dans cette compétition? En parcourant votre carnet de bord, on peut s’apercevoir que vous arbitrez avec des arbitres très peu expérimentés. Comment êtes-vous sélectionnés?
CJ : L’arbitrage est très hétérogène de part la mixité de pays qui n’ont pas l’habitude d’arbitrer des matchs de ce niveau de compétition chez eux. Certains arbitres n’ont jamais arbitré avec 3 arbitres. On a eu un clinic avant de commencer le tournoi mais cela n’est pas suffisant pour certains. Ils apprennent sur le terrain (dur de commencer sur un Championnat du Monde !!!)
La veille des journées au soir, nous recevons nos désignations pour le lendemain. Je suis souvent avec des non-expérimentés, pour les diriger et les former sur le terrain. La force d’un bon arbitre, c’est aussi être capable de transmettre son savoir-faire aux plus faibles.
NP : Quelle est l’ambiance au Brésil?
CJ : Très bonne ambiance entre nous. Seuls les Européens de l’Est font bande à part dans leur monde, parlant russe à longueur de journée, sachant qu’on ne comprend rien à cette langue.
Les Canadiennes et américaines sont très « bonne vivantes », les soirées n’étaient pas tristes.
NP : Racontez-nous une journée type de Chantal Julien durant ce mondial.
CJ : Petit déjeuner, relaxe dans ma chambre et préparation pour mon match. Si c’est le soir, je vais me balader autour de l’hôtel pour aller prendre mon lunch. En fonction des matchs de la journée, je vais voir un match (si un collègue que j’aime bien arbitre, je vais le supporter) et je me prépare pour le mien. Ou si c’est l’inverse, je rentre à l’hôtel et attends les autres pour aller dîner. C’est pratique car notre hôtel se situait à 3 minutes à pied de la salle de basket.
Les 2 jours de repos que nous avons eu ont été organisés par nos 2 collègues arbitre brésiliens. Le 1er sur une plage à 2h de bus environ, très typique du Brésil. Le 2ème, journée barbecue, à 15 minutes de l’hôtel.
NP : Pour finir, vous avez eu l’occasion de visiter un peu le Brésil et Sao Paulo. Qu’est-ce qui vous a marqué?
CJ : Je reconnais qu’on n’aura pas vu grand chose du Brésil.
Se balader seule ici n’est pas conseillé donc prudence et on reste toujours en groupe.
Le dernier soir, soirée « SAMBA », dans un coin typique. Super ambiance, on aura au moins vu ça !!!
NP : Vous voilà de retour en France. Regrettez vous de ne pas avoir officier lors de la finale ?
CJ : Le 20 septembre, j’ai arbitré le ¼ de finale le plus accroché de la journée (Espagne/Russie) avec tous les évènements qui se sont passés (pluie sur le terrain, match tenu, collègues odieux sur le fait d’être dirigé par une femme, …).
Après ça, il y avait 2 solutions : soit arbitrer une ½ finale, soit la finale. Dans les 2 cas, si on reçoit un de ces 2 matchs, on fait parti des meilleurs du tournoi.
En recevant le match « Brésil/Australie », la ½ finale, le plus beau match du tournoi, ça a été pour moi MA finale et je suis contente d’avoir pu officier sur cette rencontre (match serré, à enjeu, avec une ambiance fantastique digne de l’image qu’on se fait du Brésil).
De plus, j’avais déjà arbitrer il y a 4 ans la finale du Championnat du monde en Chine ainsi que celle des JO à Athènes en 2004.
Il est bon aussi de partager l’émotion que peut procurer une finale, la Canadienne, par exemple, n’en avait jamais arbitré.